Les entreprises vont enfin pouvoir produire des données harmonisées sur leurs émissions carbone

L'organisme qui gère les normes comptables en usage dans 140 pays et juridictions a publié ce lundi ses premières normes extra-financières, dont une très attendue pour harmoniser les chiffres d'émissions de gaz à effet de serre des entreprises.
La norme climat, baptisée IFRS S2, s'appuie sur une méthode déjà largement utilisée mais pas obligatoire, le Greenhouse Gas Protocol (Photo d'illustration).
La norme climat, baptisée IFRS S2, s'appuie sur une méthode déjà largement utilisée mais pas obligatoire, le Greenhouse Gas Protocol (Photo d'illustration). (Crédits : Reuters)

Vers la fin du greenwashing ? Les entreprises vont enfin pouvoir rapporter leurs chiffres d'émissions de gaz à effet de serre en utilisant les mêmes méthode de calcul, ce qui leur permettra de ne plus entretenir le flou autour des données qu'elles délivrent.

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Pour tenter d'imposer une règle universelle, les fondations IFRS, gestionnaires des normes comptables du même nom, ont lancé à la COP26 en 2021 un Conseil des normes extra-comptables internationales (ISSB), présidé par l'ancien patron de Danone Emmanuel Faber. Ce dernier a dévoilé lundi les deux premières normes, applicables à partir de 2024. La norme climat, baptisée IFRS S2, s'appuie sur une méthode déjà largement utilisée mais pas obligatoire, le Greenhouse Gas Protocol.

Aider les investisseurs

Objectif affiché, faire en sorte les investisseurs aient des données fiables pour savoir s'ils investissent dans des entreprises très exposées au risque climatique et comment leur portefeuille d'actions peut en souffrir : par exemple concernant un équipementier automobile face à la perspective d'interdiction des voitures thermiques neuves dans l'Union européenne en 2035. Une major pétrolière devra ainsi comptabiliser les émissions « indirectes » générées par la combustion de l'essence ou du gaz par ses clients, le « scope 3 » dans le jargon.

Les entreprises devront aussi décrire dans leurs rapports annuels leurs stratégies relatives au climat, même si la norme ne va pas trop dans le détail. La vérification sera « faite par les auditeurs financiers des entreprises de façon à ce que la connexion avec le langage financier soit totale », détaille à l'AFP Emmanuel Faber. « On passe de choses qui sont posées en l'air à un système qui est complètement à l'intérieur des process de l'entreprise ». En 2025, ainsi, de premiers rapports annuels seront publiés par des entreprises avec ces nouvelles normes, portant sur leur exercice 2024, dans lesquels l'empreinte carbone publiée sera censée être aussi « fidèle et sincère » que ses états financiers. Sous peine d'être épinglés par les gendarmes des marchés, protecteurs des actionnaires.

 « Le greenwashing au sens de, « je vends à mes actionnaires de la finance durable qui n'est pas de la finance durable », c'est terminé le jour où nos normes auront pris une place suffisamment importante dans les marchés », anticipe Emmanuel Faber.

L'avènement d'une « comptabilité carbone »

En théorie, les entreprises devront donc avertir leurs actionnaires lorsque leurs trajectoires « carbone » changeront, tout comme aujourd'hui elles doivent lancer des « avertissements sur résultat » (profit warning) quand elles anticipent une chute de rentabilité, ajoute l'ancien patron de Danone, qui revendique l'avènement d'une comptabilité carbone.

Des pays semblent bien partis pour rendre cette norme obligatoire : Japon, Royaume-Uni, Singapour, Hong Kong, Brésil, Nigeria... Emmanuel Faber, espère que la Chine, deuxième puissance économique mondiale, l'appliquera aussi. L'Union européenne développe ses propres normes au périmètre beaucoup plus ambitieux, incluant la biodiversité ou les droits humains. Mais les normes devraient être compatibles, espère l'ISSB, qui s'attaquera à ces autres domaines ensuite. L'ISSB ne va pas aussi loin que d'autres, comme le Royaume-Uni et l'UE, « mais avoir une standardisation de base est une bonne chose », estime Kate Levick, experte du sujet au centre de réflexion E3G, car elle pourrait permettre d'éviter « le cauchemar », pour les multinationales, d'avoir à respecter autant de normes que de pays.

(Avec AFP)

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Commentaires 4
à écrit le 26/06/2023 à 19:44
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Les investisseurs ne sont pas des écologistes (au sens originel, rien à voir avec les écolos politiques de la Nupes), mais des économistes. S'ils s'intéressent à une "notation carbone" des entreprises qu'ils financent, c'est qu'ils craignent qu'une t...

à écrit le 26/06/2023 à 16:04
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mais oui, on attendait ca avec impatience, comme le messie !!! he, ca frise le ridicule! c'est quoi la prochaine harmonisation? le bien etre au travail, ou on pourra compter le nombre de babyfoots, de canapes pour dormir, et de machines a cafe? ou au...

à écrit le 26/06/2023 à 13:31
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On préférerait qu'elles n'emettent pas de CO2. Les chiffres ont une déconcertante facilité à être manipulés.

à écrit le 26/06/2023 à 13:21
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"Emmanuel Faber, espère que la Chine, deuxième puissance économique mondiale, l'appliquera aussi" La Chine connait des milliers de manifestations par an contre la pollution qui tue chaque année plusieurs millions de chinois, dévastant les paysages av...

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