Voiture électrique : anatomie d'une chute allemande

En décembre dernier, l'Allemagne a décidé de supprimer les aides à l'achat de véhicules électriques, entraînant une chute des ventes de cette motorisation. Doutes sur l'échéance fixée 2035 par Bruxelles, suppression d'emplois, arrêts de projets d'usines... Cette décision a entraîné une multitude de conséquences depuis janvier.
Ce dernier mois, les ventes de voitures électriques ont chuté de 36,8% pour la sixième fois consécutive dans le pays.
Ce dernier mois, les ventes de voitures électriques ont chuté de 36,8% pour la sixième fois consécutive dans le pays. (Crédits : BOB STRONG)

En Allemagne, l'électrique s'enfonce un peu plus chaque jour. Ce dernier mois, le marché a été affecté par une chute de 36,8% des ventes de modèles 100% électriques par rapport au même mois en 2023, plombant les ventes totales de véhicules, en repli de 2,1%. C'est la sixième baisse consécutive sur les voitures électriques dans le pays.

Et pour cause, le 13 décembre, dans un court texte publié sur la page du Ministère fédéral de l'économie et de la protection du climat, le gouvernement allemand a mis un point final aux aides accordées à l'achat de véhicules électriques à hauteur de 4.500 euros pour les véhicules de moins de 40.000 euros et de 3.000 euros pour ceux jusqu'à 65.000 euros. La raison ? L'Etat allemand a été obligé de geler une enveloppe de 60 milliards d'euros versés au Fonds climat et transformation qui finançait la mesure pour respecter la règle dite du « frein à l'endettement ».

Les répercussions ont été immédiates. Les ventes de véhicules électriques outre-Rhin ont chuté de 47,6% en décembre et entraîné avec elles l'ensemble du marché européen à la baisse sur cette motorisation, une première depuis la pandémie de Covid. Le mois suivant, les commercialisations ont repris des couleurs, les constructeurs ayant compensé, pour certains, cette hausse de prix. Mais le répit a été de courte durée. Depuis, les ventes électriques du plus gros marché européen automobile ne cessent de s'effondrer, entraînant l'ensemble de la chaîne de production automobile avec elles.

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Les constructeurs en première ligne

À commencer par les constructeurs, en première ligne. À titre d'exemple, BMW a annoncé des résultats en baisse en juillet, en particulier dans son pays où les ventes sont en recul de 11,5%. Le coup de frein brutal de l'Allemagne sur l'électrique a plongé toute l'Europe dans un doute sur l'objectif de l'arrêt des ventes de voitures thermiques neuves en 2035.

Même Renault qui annonçait des résultats records sur ce premier semestre n'a pas fait d'étincelles sur les marchés financiers. Car le constructeur français a misé gros sur cette motorisation, rapatriant l'ensemble de sa production de ses véhicules électriques en France sur des lignes entièrement dédiées à l'électrique.

Le directeur général du groupe, Luca de Meo, a ainsi appelé les dirigeants européens à mettre en place un outil à l'image d'un « plan Marshall » : « Il s'appuierait sur un fonds européen de redistribution proportionnel aux capacités de chaque pays. À l'exemple du plan de relance post-Covid. À l'échelle nationale, des incitations à l'achat de voitures électrifiées, neuves ou d'occasion seraient mises en œuvre. Pour être efficace, un tel dispositif devrait s'inscrire sur une durée de dix ans. »

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D'autres constructeurs comme Stellantis ou Mercedes ont préféré miser sur des lignes de productions flexibles, c'est-à-dire qui fabriquent à la fois des voitures thermiques et des voitures électriques, pour faire face aux variations constantes du marché.

Des conséquences en cascade

Mais la problématique de l'électrique ne s'arrête pas aux constructeurs. En tout, près de 250 milliards ont été investis dans le virage vers les voitures à batteries, dont une grande partie provient des sous-traitants. En Allemagne, toute la chaîne de production s'inquiète.

L'un des principaux équipementiers automobiles allemands, le groupe ZF, en difficulté dans la transition vers l'électrique, a annoncé fin juillet vouloir supprimer jusqu'à un quart de ses effectifs dans le pays, soit 14.000 postes, invoquant le défi de la compétitivité. Il met en cause « la forte concurrence, la pression sur les coûts et la faible demande de véhicules électriques ». D'autres équipementiers allemands, comme Bosch ou Continental, ont également annoncé des plans sociaux en ce début d'année.

Les difficultés s'étendent même jusqu'aux fabricants de batteries en Europe. En juin, ACC, coentreprise de Stellantis, Mercedes et TotalEnergies a annoncé une « pause » dans la construction de deux usines à Kaiserslautern (Allemagne) et Termoli (Italie). L'une des raisons évoquée par le groupe pour revoir son calendrier industriel : la progression moins rapide que prévue des ventes de voitures électriques sur le Vieux Continent, tirée par l'Allemagne.

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Au-delà de la suppression du bonus écologique, la hausse importante des importations de véhicules électriques chinois en Europe va plomber encore plus la vente des voitures à batteries, en particulier Outre-Rhin. Car les constructeurs allemands sont en retard sur les modèles électriques à bas coûts, Volkswagen ayant annoncé sa voiture à 25.000 euros pour 2025, alors que Stellantis ou Renault auront déjà mis en vente leurs C3 et R5. Le gouvernement allemand a promis la reprise du bonus électrique fin de l'année, ce qui pourrait enrayer la chute des ventes.

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Commentaires 7
à écrit le 08/08/2024 à 11:12
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Si la couche d'ozone a été sauvée c'est parce que la production des gaz qui la détruisait a été tout simplement interdite, ce n'est pas parce qu'on a demandé aux gens d'arrêter d'en acheter. On est en France et pas en Chine en Amérique et encore moin...

à écrit le 08/08/2024 à 9:31
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Les consommateurs n'en veulent pas de ces voitures électriques ! Prix d'achat trop élevé, autonomie encore limitée et qui se réduit recharge après recharge... suffit de voir les fortes décotes de ces véhicules sur le marché d'occasion.

à écrit le 08/08/2024 à 7:53
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Pourquoi s’entêter sur les véhicules électriques et sanctionner les véhicules thermiques alors que l’avion tourne à plein régime sans que personne n’y trouve à redire

à écrit le 07/08/2024 à 21:00
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On comprend de mieux en mieux pourquoi l' Arbeitgeberschaft est de plus en plus tenté par l' A.f.D.

à écrit le 07/08/2024 à 20:43
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Tesla va mettre des robots made in Tesla, dans ses usines des l annee prochaine en 2025. Ca va encore augmenter la rentabilite des voitures Tesla (plus de salaires, plus de conges, peut travailler jour et nuit). Cela devient bien complique pour les c...

à écrit le 07/08/2024 à 19:39
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Marre de payer des impôts pour une technologie stupide et polluante dans la fabrication et le recyclage et la consommation d'électricité au gaz et charbon dans la majorité des pays européens. Arrêtons le massacre et les super profits de quelques uns ...

à écrit le 07/08/2024 à 19:15
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Tant que les constructeurs s'obstineront à vouloir vendre des voitures électriques Grandes- Chères- Lourdes et gadgetisees, ils iront de déconvenues en catastrophes industrielles. La voiture électrique ne peut être que Petite - Pas chere - Légère a...

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