En Allemagne, l'électrique s'enfonce un peu plus chaque jour. Ce dernier mois, le marché a été affecté par une chute de 36,8% des ventes de modèles 100% électriques par rapport au même mois en 2023, plombant les ventes totales de véhicules, en repli de 2,1%. C'est la sixième baisse consécutive sur les voitures électriques dans le pays.
Et pour cause, le 13 décembre, dans un court texte publié sur la page du Ministère fédéral de l'économie et de la protection du climat, le gouvernement allemand a mis un point final aux aides accordées à l'achat de véhicules électriques à hauteur de 4.500 euros pour les véhicules de moins de 40.000 euros et de 3.000 euros pour ceux jusqu'à 65.000 euros. La raison ? L'Etat allemand a été obligé de geler une enveloppe de 60 milliards d'euros versés au Fonds climat et transformation qui finançait la mesure pour respecter la règle dite du « frein à l'endettement ».
Les répercussions ont été immédiates. Les ventes de véhicules électriques outre-Rhin ont chuté de 47,6% en décembre et entraîné avec elles l'ensemble du marché européen à la baisse sur cette motorisation, une première depuis la pandémie de Covid. Le mois suivant, les commercialisations ont repris des couleurs, les constructeurs ayant compensé, pour certains, cette hausse de prix. Mais le répit a été de courte durée. Depuis, les ventes électriques du plus gros marché européen automobile ne cessent de s'effondrer, entraînant l'ensemble de la chaîne de production automobile avec elles.
Les constructeurs en première ligne
À commencer par les constructeurs, en première ligne. À titre d'exemple, BMW a annoncé des résultats en baisse en juillet, en particulier dans son pays où les ventes sont en recul de 11,5%. Le coup de frein brutal de l'Allemagne sur l'électrique a plongé toute l'Europe dans un doute sur l'objectif de l'arrêt des ventes de voitures thermiques neuves en 2035.
Même Renault qui annonçait des résultats records sur ce premier semestre n'a pas fait d'étincelles sur les marchés financiers. Car le constructeur français a misé gros sur cette motorisation, rapatriant l'ensemble de sa production de ses véhicules électriques en France sur des lignes entièrement dédiées à l'électrique.
Le directeur général du groupe, Luca de Meo, a ainsi appelé les dirigeants européens à mettre en place un outil à l'image d'un « plan Marshall » : « Il s'appuierait sur un fonds européen de redistribution proportionnel aux capacités de chaque pays. À l'exemple du plan de relance post-Covid. À l'échelle nationale, des incitations à l'achat de voitures électrifiées, neuves ou d'occasion seraient mises en œuvre. Pour être efficace, un tel dispositif devrait s'inscrire sur une durée de dix ans. »
D'autres constructeurs comme Stellantis ou Mercedes ont préféré miser sur des lignes de productions flexibles, c'est-à-dire qui fabriquent à la fois des voitures thermiques et des voitures électriques, pour faire face aux variations constantes du marché.
Des conséquences en cascade
Mais la problématique de l'électrique ne s'arrête pas aux constructeurs. En tout, près de 250 milliards ont été investis dans le virage vers les voitures à batteries, dont une grande partie provient des sous-traitants. En Allemagne, toute la chaîne de production s'inquiète.
L'un des principaux équipementiers automobiles allemands, le groupe ZF, en difficulté dans la transition vers l'électrique, a annoncé fin juillet vouloir supprimer jusqu'à un quart de ses effectifs dans le pays, soit 14.000 postes, invoquant le défi de la compétitivité. Il met en cause « la forte concurrence, la pression sur les coûts et la faible demande de véhicules électriques ». D'autres équipementiers allemands, comme Bosch ou Continental, ont également annoncé des plans sociaux en ce début d'année.
Les difficultés s'étendent même jusqu'aux fabricants de batteries en Europe. En juin, ACC, coentreprise de Stellantis, Mercedes et TotalEnergies a annoncé une « pause » dans la construction de deux usines à Kaiserslautern (Allemagne) et Termoli (Italie). L'une des raisons évoquée par le groupe pour revoir son calendrier industriel : la progression moins rapide que prévue des ventes de voitures électriques sur le Vieux Continent, tirée par l'Allemagne.
Au-delà de la suppression du bonus écologique, la hausse importante des importations de véhicules électriques chinois en Europe va plomber encore plus la vente des voitures à batteries, en particulier Outre-Rhin. Car les constructeurs allemands sont en retard sur les modèles électriques à bas coûts, Volkswagen ayant annoncé sa voiture à 25.000 euros pour 2025, alors que Stellantis ou Renault auront déjà mis en vente leurs C3 et R5. Le gouvernement allemand a promis la reprise du bonus électrique fin de l'année, ce qui pourrait enrayer la chute des ventes.
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