Après l'enquête interne de Nissan, Carlos Ghosn arrêté au Japon pour malversations financières

Par latribune.fr  |   |  1156  mots
A 64 ans, Carlos Ghosn a été renouvelé en juin dernier par l'assemblée générale de Renault pour un nouveau mandat de quatre ans qu'il a promis de mettre à profit pour renforcer l'alliance et préparer la relève. (Crédits : Reuters)
Le parquet de Tokyo vient d'arrêter le Pdg de Renault-Nissan sur des soupçons de fraude fiscale, selon le Yomiuri Shimbun, numéro un de la presse japonaise. A la Bourse de Paris, l'action de Renault s'effondre. Au Japon, le conseil d'administration du constructeur Nissan aurait proposé de démettre au plus vite l'emblématique patron français de son poste de président. Le groupe Nissan est à l'origine de l'arrestation de son Pdg, résultat de plusieurs mois d'enquête interne, après avoir découvert que le Pdg utilisait de l'argent du groupe à des fins personnelles.

[Article publié le lundi 19 novembre 2018, mis à jour à 13h15 avec enquête interne de Nissan]

Carlos Ghosn, Pdg de Nissan, va être arrêté par le parquet de Tokyo pour violation présumée de la réglementation japonaise sur les instruments financiers et la Bourse, rapporte le site internet du journal nippon Asahi, dont la version papier est diffusée à quelque 8 millions d'exemplaires chaque jour.

Le patron de Renault-Nissan aurait sous-évalué sa propre rémunération

Selon le très réputé quotidien japonais, Carlos Ghosn, qui est également le Pdg de Renault (dont l'État français est actionnaire à hauteur de 15%), est suspecté d'avoir sous-évalué sa propre rémunération dans des rapports financiers. Il a accepté de collaborer avec la justice. Un porte-parole de Nissan a dit que le constructeur automobile vérifiait ces informations.

Le titre Renault perdait 6% vers 9h55 à la Bourse de Paris, et dégringolait de plus de 13% à 11h02.

Nissan veut démettre Ghosn de ses fonctions de président

Selon la chaîne de télévision NHK, une perquisition est en cours au siège de Nissan.

Et selon un tweet de cette même chaîne de télévision, le conseil d'administration du constructeur japonais Nissan aurait proposé de démettre de ses fonctions dans les plus brefs délais le charismatique Pdg français.

Selon le Yomiuri Shimbun (numéro un de la presse japonaise et mondial avec 10 millions d'exemplaires quotidiens), le Pdg français vient d'être arrêté par la justice nippone.

 Réactions de l'Elysée : "no comment"

La présidence de la République française a déclaré lundi ne pas avoir de réaction aux informations concernant Carlos Ghosn, le Pdg de Renault, également président de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, soupçonné au Japon d'avoir violé la réglementation financière.

"Pas de réaction de notre côté", a déclaré une source à l'Elysée, soulignant qu'"une procédure est en cours" au Japon.

Nissan a pour sa part déclaré que Carlos Ghosn avait utilisé de l'argent du groupe automobile à des fins personnelles et que son conseil d'administration proposerait qu'il soit rapidement démis de ses fonctions de président.

A la Bourse de Paris, vers 12h15 l'action se redresse légèrement (à -10,48% contre -13% autour de 11h.

A Tokyo, l'action Nissan a clôturé en légère baisse de 0,45%, mais c'était avant les révélations de la presse japonaise sur l'arrestation de Carlos Ghosn.

En Bourse, le secteur automobile européen impacté

Le plongeon de Renault pèse sur l'ensemble du secteur en Europe, dont l'indice Stoxx perd 0,28%. Le concurrent PSA recule au même moment de 0,66%.

L'irruption des démêlés judiciaires de Carlos Ghosn tombe au plus mauvais moment pour le constructeur automobile français et son partenariat avec Nissan et Mitsubishi, l'homme fort de la première alliance automobile mondiale n'ayant pas encore finalisé un plan de succession pour garantir la pérennité cet édifice inédit dans l'éventualité de son départ.

A 64 ans, Carlos Ghosn a été renouvelé en juin dernier par l'assemblée générale de Renault pour un nouveau mandat de quatre ans qu'il a promis de mettre à profit pour renforcer l'alliance et préparer la relève. Mais s'il a nommé un numéro deux en la présence de Thierry Bolloré, il est resté PDG de Renault et d'une alliance qu'il incarne depuis l'entrée de Renault au capital de Nissan en 1999.

Simple amende pour Ghosn, ou début d'un scénario dramatique ?

"En cas d'erreur de reporting, nous pensons que le sujet pourrait se solder par une amende pour Ghosn, et un impact limité pour Renault ou Nissan", commente la société d'investissement Exane dans une note.

 Mais la note envisage également un scénario plus sombre :

"Dans l'hypothèse pessimiste d'un délit plus grave, et si Carlos Ghosn n'est pas en mesure de se maintenir à la tête de Renault et/ou à la présidence de Nissan, alors des questions plus complexes vont se poser sur le futur à long terme de la structure de l'alliance et sur la perspective de toute fusion."

Dans un communiqué, Nissan a annoncé qu'une enquête interne avait établi que Carlos Ghosn avait utilisé de l'argent du groupe japonais à des fins personnelles, et que son conseil d'administration proposerait qu'il soit rapidement démis de ses fonctions de président.

La dissimulation de rémunération aurait débuté en 2011

Le président de Nissan, Carlos Ghosn, a sous-évalué de cinq milliards de yens (38,9 millions d'euros) sa rémunération, qui s'élevait à près de 10 milliards, rapporte lundi l'agence de presse japonaise Jiji. Et selon l'agence de presse Kyodo, cette pratique a commencé en 2011 et a duré plus de cinq ans.

Lire aussi : Renault: les actionnaires votent contre la rémunération de Carlos Ghosn

Renault détient 43,4% de Nissan, qui possède en retour 15% de Renault. Le groupe japonais est ainsi le deuxième actionnaire du constructeur français en terme d'actions, derrière l'État français qui détient 15,01% du capital.

Après la réaction de l'Élysée qui ne souhaite pas réagir à une procédure en cours, une porte-parole de Renault n'était pas en mesure dans l'immédiat de faire un commentaire.

Nissan a enquêté pendant plusieurs mois sur les malversations de son Pdg

Le constructeur japonais dévoilait dans un communiqué vers 13 heures, heure de Paris, avoir mené une enquête interne à la suite d'une information dénonçant des pratiques inappropriées de la part de Carlos Ghosn et de l'administrateur Greg Kelly pendant plusieurs mois. Nissan dit avoir lancé cette enquête après avoir découvert que le Pdg avait utilisé de l'argent du groupe automobile japonais à des fins personnelles et commis d'autres infractions graves.

Nissan a annoncé qu'il allait tenir une conférence de presse au Japon, ajoutant que le groupe coopérait pleinement avec la justice.

"L'enquête a montré qu'au fil des ans, Ghosn et Kelly ont déclaré des montants de rémunération inférieurs aux montants réels dans des rapports à la Bourse de Tokyo afin de réduire le montant déclaré de la rémunération de Carlos Ghosn", a déclaré Nissan dans son communiqué.

Le directeur général de Nissan Hiroto Saikawa proposera que le conseil d'administration démettent Carlos Ghosn et Greg Kelly de leurs fonctions, a poursuivi le groupe.

(Avec Reuters)