« Nous allons inaugurer notre deuxième site de production en France, à Troyes » (Jonathan Zrihen, PDG de Clarins)

ENTRETIEN - Le discret patron du groupe de cosmétiques familial fondé en 1954 annonce que 80% des ingrédients utilisés par la marque seront bio dès 2025.
Marie-Pierre Gröndahl
Dans les locaux de Clarins à Paris le 22 avril.
Dans les locaux de Clarins à Paris le 22 avril. (Crédits : © LTD / CYRILLE GEORGE JERUSALM)

LA TRIBUNE DIMANCHE - Les résultats des groupes mondiaux de cosmétiques ont été contrastés en début d'année. Comment se porte Clarins ?

JONATHAN ZRIHEN - Contrairement à beaucoup de ses concurrents, l'entreprise n'est plus cotée en Bourse depuis 2008. Notre communication financière est donc réduite. Mais Clarins va bien, comme l'indique sa croissance de 9% en 2023. Elle s'est maintenue à ce niveau pour les trois premiers mois de 2024, grâce à un équilibre géographique solide : l'Europe et l'Asie sont à égalité, avec chacune 35% du chiffre d'affaires, 15% en Amérique et 15% dans le travel retail .

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Avez-vous subi les conséquences de la baisse de la consommation en Chine ?

Non. Malgré ce ralentissement et le fléchissement du travel retail enregistrés dans les derniers mois de l'année dernière, les ventes du groupe sont en hausse dans toutes les régions du monde, y compris en Europe. Le marché américain, en particulier, se confirme très positif pour nos produits, avec une augmentation du chiffre d'affaires de 18% l'an dernier, puis de 30% au premier trimestre de cette année. Nous allons y investir encore davantage à l'avenir, entre autres dans le maquillage. C'est déjà le deuxième marché du groupe, après la Chine. Mais nous pouvons encore nous y renforcer.

Le nombre de points de vente a pourtant diminué aux États-Unis ?

Oui, de 2 000 à 350 magasins. Cette stratégie correspond à la montée en puissance de nos ventes en ligne outre-Atlantique, à 35% du total, ainsi que dans les chaînes spécialisées, dont Sephora et Ulta. Nous misons également davantage sur les influenceurs et influenceuses que sur les points de vente physiques. Leur rôle devient de plus en plus important, car leur audience et leurs followers sont très sensibles tant aux produits qu'aux valeurs de Clarins, en matière de développement durable notamment.

Les soins et le maquillage évoluent-ils au même rythme ?

Le groupe bénéficie d'une position unique dans le soin, avec une première place en Europe pour le haut de gamme de cette catégorie. Cette performance nous donne une légitimité naturelle dans le maquillage, notre deuxième moteur de croissance. Certains produits, comme le gloss pour les lèvres, le « lip oil », lancé il y a dix ans, sont des best-sellers mondiaux. Notre gamme comprend plus de 200 références, sans compter les nuances de couleurs. Le maquillage représente aujourd'hui 12% de notre chiffre d'affaires. Une proportion qui pourrait s'élever à plus de 20% dans les prochaines années.

L'entreprise fête ses 70 ans cette année. Quelles sont vos priorités pour la suite ?

Nous avions annoncé vouloir nous approcher du seuil des 2 milliards d'euros de ventes en 2025. Cet objectif est déjà presque atteint, avec 1,9 milliard réalisé dès 2023. Notre chiffre d'affaires a doublé en neuf ans, voire en sept ans, puisque la crise sanitaire a provoqué une quasi-stagnation dans tous les secteurs, le nôtre compris. Pour poursuivre le développement du groupe, qui croît de 10 à 14% par an, nous allons inaugurer notre deuxième site de production en France, à Troyes. Soit un investissement de 135 millions d'euros.

Quand l'usine ouvrira-t-elle ses portes ?

En fin d'année. Celle de Pontoise ne suffisait plus. La nouvelle usine doublera nos capacités de production et renforcera notre implantation en France, ce qui correspond à notre souhait de vendre des produits fabriqués dans le pays d'origine de la marque. Le centre de logistique d'Amiens alimente le monde entier. Et 120 chercheurs travaillent dans notre centre de recherche et développement de Pontoise. Grâce à ces investissements, Clarins maîtrise toutes les étapes de la conception et de la fabrication de ses produits, des études initiales aux tests, en passant évidemment par le processus de production. L'achat d'un second domaine de 115 hectares, près de Nîmes, après un premier dans les Alpes, nous donne également un accès direct aux plantes. Des laboratoires à ciel ouvert, en quelque sorte.

Pour contrôler les matières premières ?

Les plantes sont à l'origine de la création de l'entreprise. À terme, nous envisageons que 35% des ingrédients utilisés proviennent de ces deux domaines. Le groupe est l'un des seuls au monde à mettre en avant les conditions de culture et les compositions de ses produits. La traçabilité et la transparence, chez Clarins, c'est vraiment « du champ jusqu'à la peau ». De même que notre engagement en faveur du développement durable se traduit dans les actes. Nous visons 80% d'ingrédients bio d'ici à 2025, au lieu de 66% aujourd'hui.

Allez-vous privilégier à l'avenir les ventes en ligne ?

La vente en direct aux consommatrices est en tout cas l'un des axes stratégiques majeurs de ces dernières années. J'ai vu cette transformation s'opérer dans l'ensemble du secteur lorsque j'étais aux États-Unis. Outre les ventes sur les sites des détaillants, un quart du chiffre d'affaires est désormais réalisé sur nos 40 sites d'e-commerce, un taux exceptionnellement élevé dans le domaine des cosmétiques. Les plateformes numériques sont des relais d'interaction directe avec nos clientes, à l'image des dialogues avec les premières consommatrices lors de la création de l'entreprise par Jacques Courtin. L'esprit des débuts reste intact. Sa structure familiale lui donne consistance et cohérence. On peut y grandir : je suis entré dans l'entreprise comme stagiaire, avant d'en devenir le dirigeant, aux côtés d'Olivier et Virginie Courtin.

Quels sont vos best-sellers ?

Le double sérum, dont la version actuelle représente la huitième génération de ce produit, est un succès mondial. Autre grande réussite parmi nos innovations récentes, le masque Cryo-Flash. Le groupe a pour principe fondateur de trouver des solutions de beauté pour chaque moment de la vie.

Clarins en chiffres

1954 : date de création
8 000 salariés
93% des produits fabriqués en France
28 filiales à l'international

Marie-Pierre Gröndahl

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