Mode : la vérité sur le départ de Virginie Viard de Chanel

La directrice artistique quitte la maison. En cause, le manque de brio de ses collections et une communication atone, loin de la flamboyance de son mentor, Karl Lagerfeld.
Virginie Viard présentant la collection printemps-été 2020 au Grand Palais, à Paris.
Virginie Viard présentant la collection printemps-été 2020 au Grand Palais, à Paris. (Crédits : © LTD / CHRISTOPHE ARCHAMBAULT/AFP)

Ce 5 juin, le bref communiqué de la maison Chanel a littéralement secoué le monde de la mode. Et pour cause, la griffe parisienne annonçait le départ de Virginie Viard de la direction artistique de Chanel. Une nouvelle tombée en pleine nuit, à trois semaines du prochain défilé haute couture et quelques jours à peine après la présentation des résultats record de l'exercice 2023. Un véritable coup de tonnerre s'est abattu sur la maison de la rue Cambon. Car ce désaveu soudain a tout d'un licenciement.

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Jusqu'ici, Chanel laissait raconter le mythe d'une transition douce après l'ère Karl Lagerfeld, avec lequel Virginie Viard formait un duo créatif et fusionnel durant plus de trente années. Elle a 25 ans quand elle débarque, stagiaire, en 1987, dans la division broderie de la marque. Cette grande travailleuse a consacré toute sa vie à l'illustre maison. Sans doute son amour du textile lui vient-il des souvenirs de l'enfance. Lorsque, petite Lyonnaise, elle explorait l'usine de soie de ses grands-parents. « Virginie avait toute la confiance de Karl, il prenait vraiment plaisir à travailler avec elle, confie une proche du couturier. Elle était son maître d'œuvre chez Chanel, et une formidable directrice de studio sur toutes les collections. Son influence sur Karl était réelle. »

Alors quelles sont les raisons de ce départ inattendu ? Les ventes de prêt-à-porter ont explosé depuis que Virginie Viard, qui fêtait ses 62 ans le mois dernier, a succédé au légendaire Lagerfeld à la mort de celui-ci, en 2019. Mais à y regarder de plus près, l'augmentation des prix des sacs, qui atteignent des sommes stratosphériques (environ 10 000 euros pour l'emblématique 2.55), pallie les baisses des ventes d'une mode devenue, au fil des cinq années du règne de la styliste, beaucoup moins désirable. Alain Wertheimer, propriétaire de la marque, avait confié en 2019 à Virginie Viard la mission d'« assurer la création des collections Chanel pour continuer de faire vivre l'héritage de Gabrielle Chanel et de Karl Lagerfeld ».

Chanel

Silhouette printemps-été 2024. (© LTD / Chanel)

Les critiques se sont faites de moins en moins tendres à la présentation de collections parfois décevantes, en particulier lorsque cette grande brune d'un naturel réservé, voire sauvage, se lançait dans ce que les allures des années 1980 - ou « new wave » - ont de hasardeux. Autre grief, Virginie Viard préférait l'ombre à la lumière, restait à l'écart des médias et s'isolait même de ses propres collaborateurs. Ce déficit d'image contrastait avec la flamboyance de son prédécesseur, qui faisait briller le joyau Chanel aux quatre coins de la planète. Mais Virginie Viard a-t-elle jamais vraiment assumé ce poste de directrice artistique, écrasée dans sa légitimité par deux monstres sacrés : son mentor Karl Lagerfeld et l'audacieuse Gabrielle Chanel, qui révolutionna le vestiaire féminin lors-qu'elle créa la maison en 1910. « Un nouveau chapitre s'ouvre pour la division mode de Chanel, a fait savoir la direction le 6 juin. Nous sommes confiants en la capacité des équipes d'assurer la continuité des collections dans cette période de transition. »

De nombreux noms circulent pour la succession

Mais alors, qui pour succéder au poste le plus convoité de la mode ? La machine spéculative va bon train dans le monde feutré du luxe, affichant le nom du génial Hedi Slimane, aujourd'hui chez Celine mais dont le contrat, comme un fait exprès, arrive à échéance. Ce n'est pas nouveau, son nom circule depuis plusieurs années. Karl Lagerfeld adulait les silhouettes « slim rock » de sa période Dior Homme. Slimane, pour sûr, réveillerait la belle, pas encore tout à fait endormie. On parle de Haider Ackermann, maître de la couleur, styliste des lignes pures et ardentes. En 2011, le Kaiser le déclarait comme seule personne à même de pouvoir lui succéder. Sacré Karl ! Il fit de même en 2016 à propos de Jeremy Scott, ex-Moschino dont le nom refait surface comme un potentiel successeur. Sarah Burton, ex-Alexander McQueen, est libre de tout contrat. Une Anglo-Saxonne doperait les ventes aux États-Unis. On parle aussi de Pierpaolo Piccioli, séparé de la prestigieuse maison Valentino après plus de vingt-cinq ans de succès à la tête de sa direction artistique.

Mais il ne suffit pas d'avoir du talent à créer des silhouettes désirables pour projeter la légende Chanel dans un avenir durable. Encore faut-il une vision et un sens créatif puissants qui sauront renouveler les codes et l'imaginaire subtil de la marque tout en inscrivant l'excellence de ses savoir-faire rares dans la communication d'une époque ultra-connectée. Et pourquoi pas un outsider ? « Les critères de la jeunesse ne suffisent pas, il faut que ça dure », confiait Karl en privé. À suivre.

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Commentaires 3
à écrit le 09/06/2024 à 7:38
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D'autant que clientèle riche qui ne connait pas la crise, on ne peut donc pas expliquer la baisse des ventes par la crise mettant encore plus de pression au secteur.

le 11/06/2024 à 7:46
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Chanel marche bien ! En 1/4 d heure ils ont vendu pour 6 millions de sacs et en plus a 5 h du matin ! Vive la france vive la république ! Avenue Montaigne 🤷‍♂️😉👏

le 11/06/2024 à 11:24
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Calmes toi.

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