A321 XLR, le « game changer » d'Airbus est certifié

L'avion dont rêvait Boeing est désormais certifié, mais c'est bien un Airbus. L'A321 XLR pour être précis. Certes, ce n'est qu'avec le moteur Leap et seulement par l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) pour l'instant, mais le constructeur européen ne va pas bouder son plaisir. Après un développement difficile, il est désormais prêt à régner sur le « Middle of the market » sans réelle concurrence.
Léo Barnier
L'A321 XLR d'Airbus est désormais prêt à entrer en service.
L'A321 XLR d'Airbus est désormais prêt à entrer en service. (Crédits : Airbus)

Il aura fallu patienter, mais c'est désormais fait : l'A321 XLR d'Airbus vient d'être certifié par l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) ce vendredi. Alors que va s'ouvrir lundi prochain le salon aéronautique de Farnborough, l'un des plus importants au monde, le constructeur européen est déjà à la fête avec l'obtention du précieux sésame. Et si la nouvelle est de taille, c'est que l'A321 XLR, version à très long rayon d'action (Xtra Long Range) de l'A321 NEO, apparaît comme bien plus qu'une énième déclinaison de la famille A320 NEO. Ce nouvel avion doit relancer un segment de marché dit du « Middle of the market », autrefois occupé par les Boeing 757 et 767 conçus dans les années 1970. Un segment que le géant américain rêvait de reconquérir avant de s'empêtrer dans les déboires du 737 MAX et de renoncer.

Pour ce faire, l'A321 XLR combine les avantages d'un avion monocouloir en termes de flexibilité opérationnelle et de consommation de carburant avec une autonomie le positionnant sur des vols long-courriers. L'avion est ainsi capable de franchir 8 700 km, soit 2.200 km de plus que l'A321 NEO dans sa version classique et 1.300 km de plus que l'A321 LR (Long Range). Il doit ses performances à une masse maximale au décollage accrue à 101 tonnes avec un réservoir central supplémentaire permanent et un autre additionnel qui lui permettent d'emporter 16.000 litres de carburant supplémentaires.

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Les avantages des deux mondes

Sans prétendre remplacer les appareils véritablement long-courriers, Airbus estime que son nouvel avion va « apporter la flexibilité nécessaire pour ajouter de la capacité, ouvrir de nouvelles routes ou même pour continuer à exploiter des routes existantes lorsque la demande est variable ». Il revendique ainsi une consommation par siège réduite de 30 % par rapport à la génération précédente, qui date tout de même d'une quarantaine d'années, mais surtout « un coût du voyage environ deux fois moins élevé que celui des gros-porteurs modernes », selon un communiqué d'Airbus. Sur ce dernier point, l'avionneur parle plus exactement de 45 % de gain. Surtout, il faut préciser qu'il s'agit d'un coût par voyage et non par passager, car un A321 XLR peut emporter entre 180 et 220 passagers à son bord contre 240 à 320 pour un Boeing 787 et 300 à 400 pour un 777. Ce qui réduit considérablement l'avantage.

Cela n'empêche pas Christian Scherer, directeur général de l'activité avions commerciaux d'Airbus, de se réjouir et de décrire l'A321 XLR comme « un produit distinctif qui apporte une valeur nouvelle sur le marché, élargissant le champ des possibles pour les compagnies aériennes clientes et pour les passagers. Grâce à son rayon d'action étendu, l'A321XLR permet d'ouvrir une multitude de routes directes qui donnent des opportunités naturelles de croissance à nos clients et aux voyageurs ».

« Il offre aux compagnies aériennes l'efficacité des caractéristiques communes à la gamme A320/A321 et, grâce à la polyvalence de sa cabine, un éventail de services possibles tout à fait unique. C'est la quintessence d'Airbus », s'est félicité encore Christian Scherer.

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Une certification à compléter

Quelques bémols tout de même. Tout d'abord, seule la version équipée de moteurs Leap-1A de CFM International (coentreprise entre Safran et GE Aerospace) a été certifiée par les autorités européennes. Celle dotée de moteurs Pratt & Whitney n'arrivera que fin 2024. Ensuite, l'avion n'a pas obtenu la certification simultanée de la part de l'Administration fédérale de l'aviation américaine (FAA), le pendant outre-Atlantique de l'AESA. Les deux agences travaillent sur le mode de la réciprocité et les essais menés par l'une d'entre elles sont généralement validés par l'autre. Ce qui les avait conduites à annoncer des certifications simultanées à plusieurs reprises par le passé.

C'est ce qui était visé dans le cas présent, comme l'indiquait un connaisseur du dossier il y a quelques semaines à La Tribune, tout en admettant ne pas savoir si cela se concrétiserait. Il précisait alors que la FAA était « en phase de validation », avant de rappeler qu'il y avait eu un durcissement des protocoles de certification de la part de l'administration américaine suite aux dérives mises en lumière avec l'homologation du Boeing 737 MAX. Guillaume Faury, président exécutif d'Airbus, avait d'ailleurs déclaré en 2022 qu'il y a « beaucoup de pression sur les régulateurs. Les événements de l'année et demie écoulée ont créé un environnement qui va être plus difficile, avec un niveau élevé d'examen. » Le constructeur européen va donc devoir patienter encore un peu avant de voir son avion voler aux Etats-Unis et dans les pays s'appuyant sur la certification de la FAA.

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Plus d'un an de retard

Airbus n'est sans doute plus à quelques semaines près. La mise au point de l'A321 XLR n'a pas été un long fleuve tranquille. Lancé au salon du Bourget, l'avion devait entrer en service en 2023 et prendre ainsi de vitesse un éventuel concurrent de Boeing (qui n'arrivera jamais). Mais les choses ne se sont pas passées comme prévu pour Airbus, qui a d'abord dû faire face aux bouleversements engendrés par le Covid (activité partielle, gel des embauches et des investissements, perturbations des chaînes d'approvisionnement), mais aussi pour le développement du nouveau réservoir. La FAA a d'ailleurs demandé des garanties de sécurité à Airbus concernant son emplacement, craignant des risques d'incendie en cas d'accident. Gary O'Donnell, chef du programme XLR chez Airbus, a ainsi indiqué à l'AFP que l'EASA et la FAA ont mis en place de nouvelles exigences en cours de processus, dont « la dernière n'a été formalisée que vers la fin de l'année dernière », 18 mois après le premier vol du XLR.

Guillaume Faury avait précisé début 2022 que les difficultés rencontrées dans la mise au point du programme et le processus de certification n'auraient aucun impact sur les performances finales de l'avion.

Il reste désormais à Airbus à préparer la mise en service de son appareil dans les prochains mois, lui qui a été commandé à plus de 500 exemplaires à travers le monde.

« Nous avons franchi un jalon clé avec cette certification. La prochaine étape consiste à préparer l'avion pour ses premières missions commerciales avec nos clients du monde entier. Nous sommes impatients de travailler avec les clients du XLR pour soutenir l'intégration de l'avion dans leurs flottes », a déclaré Christian Scherer.

Léo Barnier

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Commentaires 3
à écrit le 20/07/2024 à 14:34
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Merci Mr Barnier pour cet excellent article, une très bonne nouvelle pour Airbus, l'Europe et l'économie. Les bonnes nouvelles sont si rares actuellement. Vos articles sont factuels et c'est toujours avec plaisir que je vous lis.

à écrit le 19/07/2024 à 20:19
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Et qui veut voler aux grandes distances dans un avion à fuselage étroit?

le 20/07/2024 à 19:48
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Concorde n'était pas également étroit ? Mais bon, ça ne durait pas très longtemps, voyage express. Il faut prendre le bateau, y a de la place mais c'est loooong. :-)

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