Attentiste, Wall Street scrute les premiers pas de Kamala Harris

Les investisseurs n’ont pas cédé à la panique après l’annonce de désistement de Joe Biden pour la campagne présidentielle américaine, plusieurs indices s'affichant même en légère hausse. Si pour le moment Wall Street attend le début de campagne de Kamala Harris pour évaluer ses chances de victoires face à Trump, un nouveau mandat aux mains des Démocrates pourrait fortement impacter les secteurs pétrolier et technologique, et même les valeurs européennes en Bourse.
Maxime Heuze
« Kamala Harris est connue pour sa réticence envers le secteur pétrolier et son opposition à l'exploitation du pétrole de schiste par fracturation hydraulique », prévient Antoine Andreani, analyste chez XTB.
« Kamala Harris est connue pour sa réticence envers le secteur pétrolier et son opposition à l'exploitation du pétrole de schiste par fracturation hydraulique », prévient Antoine Andreani, analyste chez XTB. (Crédits : Evelyn Hockstein)

La Bourse de New York passe une journée tranquille, légèrement dans le vert. Vers 17h30 (heure de Paris), l'indice S&P 500 oscillait autour de 0,7% quand son petit frère dédié à la technologie, le Nasdaq prenait 0,94%. A croire que l'arrivée des vacances rend les investisseurs doucement optimistes. Une passivité qui dénote avec le désistement soudain du président américain Joe Biden, hier soir, dans la course à sa réélection à la Maison blanche.

Wall Street n'a visiblement pas paniqué ce lundi matin au réveil. « Le retrait de Joe Biden ne constitue pas une grande surprise pour les marchés », confirme Michaël Nizard, Responsable de la gestion d'actifs chez la société de gestion Edmond de Rothschild AM, dans une note.

Et pour cause, après qu'il a confondu le 12 juillet le président ukrainien Volodymyr Zelensky et son homologue russe Vladimir Poutine et, quelques heures après, appelé Kamala Harris la « vice-présidente Trump », les inquiétudes sur les capacités cognitives du candidat démocrate de 81 ans se faisaient de plus en plus pressantes.

Trump toujours loin devant dans les sondages

Surtout, ce passage de relais à Kamala Harris ne change pour l'instant rien à l'anticipation du résultat de l'élection présidentielle qui se tiendra le 5 novembre.

« Donald Trump, dont l'image de héros patriotique et anti-guerre pourrait être décisive, demeure en tête avec une projection de près de 60 % des voix », rappelle Antoine Andreani, analyste chez le courtier XTB, dans une note.

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D'autant que la candidate, bien que désignée par l'actuel président pour le remplacer, n'a pas encore été officialisée par son parti. La potentielle investiture officielle de Kamala Harris n'aura pas lieu avant « la Convention nationale (du Parti démocrate) qui se tiendra du 19 au 22 août ». Une situation qui entretient l'incertitude chez les libéraux, observe Michael Strobaek, responsable de l'investissement chez la banque privée Lombard Odier, dans une note.

Cependant, un début de mouvement en faveur du parti libéral s'est amorcé. « En 24 heures, le marché est passé d'une victoire quasi certaine pour Trump et les Républicains à une course électorale plus incertaine », nuance Antoine Andreani. Les sondages de début de semaine montrent en effet un soutien croissant pour Kamala Harris, projetée à 40 % des voix selon PredictIt, ce qui marque une hausse de 13 points depuis samedi.

Une victoire de Kamala Harris mauvaise pour les actions pétrolières...

Qu'importe l'évolution des sondages pour la Bourse américaine puisque, contrairement à la France où le Rassemblement national et le Nouveau Front populaire sont vus d'un mauvais œil par les investisseurs, Wall Street n'a pas de préférence politique prédéterminée.

En revanche, nombre de secteurs pourraient voir leur cours évoluer à la hausse ou à la baisse en fonction du programme de chaque candidat.

« Donald Trump a focalisé sa campagne sur la croissance économique américaine et le désir de relocalisation. Ce dernier point est notamment bon pour les petites capitalisations américaines en Bourse » explique à La Tribune, Alexandre Hezez, stratégiste chez la banque Richelieu.

Il note aussi que le candidat républicain a « souvent affirmé vouloir déréguler le prix des médicaments et les activités des banques ce qui devrait être positif pour les secteurs pharmaceutiques et bancaires. » Enfin, le conservateur n'a cessé de répéter qu'il allait intensifier les forages pétroliers en cas de réélection, « ce qui pourrait évidemment profiter aux cours des majors, qui sont aujourd'hui assez décotées. »

A l'inverse, « Kamala Harris est connue pour sa réticence envers le secteur pétrolier et son opposition à l'exploitation du pétrole de schiste par fracturation hydraulique », prévient Antoine Andreani.

... et bonne pour la tech et les actions européennes

A rebours de ces secteurs, les valeurs technologiques, véritable carburant des cours américains ces dernières années, pourraient pâtir d'un gouvernement Trump II « si ce dernier venait à relancer les guerres commerciales avec la Chine ou même l'Europe car les entreprises technologiques sont très mondialisées et pourraient donc subir des mesures de rétorsion », met en garde Alexandre Hezez.

« Il ne serait pas étonnant d'assister à un léger rattrapage des actifs risqués européens par rapport aux Etats-Unis après plusieurs semaines de nettes sous-performances. Car, en effet, plusieurs études économétriques montrent des impacts significatifs sur la croissance européenne, de l'ordre de 1%, en cas de résurgence de fortes tensions commerciales liées à Trump II », pointe Michaël Nizard d'Edmond de Rothschild.

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En dehors des ajustements entre secteurs, pour les investisseurs, le point central de la campagne ne sera autre que la lutte contre l'inflation. Or, les promesses de hausses de droits de douane de Donald Trump sont vues comme assez inflationnistes par nombre d'analystes. « Mais pour Kamala Harris, nous n'avons pas encore d'informations sur la place qu'elle va accorder à l'inflation dans son programme », regrette Alexandre Hezez. Si la démocrate se montrait plus concernée par la hausse des prix, Wall Street pourrait finalement la préférer à son opposant Républicain. Car « pour les marchés, l'important est que la ou le prochain président permette à la Réserve fédérale américaine de baisser ses taux en prenant des mesures contre l'inflation », pointe le stratégiste de Richelieu.

Maxime Heuze

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Commentaires 4
à écrit le 23/07/2024 à 12:24
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Vu le charisme et le caractere de la donzelle, les Dems ont du souci a se faire. Trump va gagner haut la main. Les changements a l'ordre du jour seront scrupulement respectes. Ca va saigner dans tous les secteurs de l'administration americaine. Pui...

à écrit le 23/07/2024 à 8:08
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Les marchés savent parfaitement qu'ils ne risquent rien, d'un côté comme de l'autre, enfin pas sûr de l'autre... leur opinion de toutes façons n'a aucun intérêt, une calculatrice c'est pas une boussole.

à écrit le 23/07/2024 à 2:18
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"Après l'abandon de Joe Biden, attentiste, Wall Street scrute les premiers pas de Kamala Harris" Quelle imposture démocratique au parti prétendu démocrate après l'asphyxie financière de la campagne Biden afin de couronner Harris sans vote des a...

à écrit le 22/07/2024 à 19:43
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"Qu'importe l'évolution des sondages pour la Bourse américaine puisque, contrairement à la France où le Rassemblement national et le Nouveau Front populaire sont vus d'un mauvais oeil par les investisseurs, Wall Street n'a pas de préférence politi...

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