Du paiement entre amis à la banque universelle, la fintech Lydia veut changer de dimension

Connue des étudiants, l’application mobile de virement P2P (de pair-à-pair) Lydia a subi de nombreuses métamorphoses en dix ans et souhaite désormais créer une nouvelle franchise de banque numérique en Europe, sous la marque Sumeria. La fintech met 100 millions d’euros sur la table et prévoit cinq millions de clients bancaires d’ici trois ans.
Co-fondateur de Lydia, Cyril Chiche mise sur la simplicité et la légèreté des coûts de structure pour réussir son pari de banque universelle.
Co-fondateur de Lydia, Cyril Chiche mise sur la simplicité et la légèreté des coûts de structure pour réussir son pari de banque universelle. (Crédits : DR)

C'est le fruit d'un long processus de transformation du modèle économique d'une fintech, devenue licorne (en 2021), et qui veut être aujourd'hui une banque. Au départ, en 2014, Lydia est l'un des pionniers du paiement mobile de P2P (pair-à-pair) en France, ciblée sur les étudiants. Le succès est au rendez-vous (le virement est gratuit) et le « fais-moi un Lydia » devient un classique des campus. Très vite, la fintech a cependant cherché à étoffer son offre... et à diversifier ses revenus.

Dès 2016, la start-up écorne son modèle d'origine en proposant une carte de paiement (payante), adossée à un compte Lydia (lui-même adossé à une carte bancaire pour l'alimenter) et pilotée à partir de l'application mobile. Trois ans plus tard, Lydia succombe au modèle de place de marché (de produits financiers), plus communément appelé, « super app ». C'est le choix également de fintechs comme Revolut ou même Klarna.

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Vie et mort de la super app

Cela passe par la mise en place de partenariats afin de bâtir, brique par brique, une plateforme de services financiers, plus ou moins intégrés à l'application mobile. Lydia s'est ainsi diversifiée, avec plus ou moins de réussite, dans l'assurance habitation (avec Luko, disparue aujourd'hui), le coaching financier (avec Papernest), le trading de cryptos (avec Bitpanda) ou bien le crédit à la consommation (avec FLOA). L'idée est bien de transformer les jeunes étudiants consommateurs de virements P2P en consommateurs de services financiers au quotidien.

Mais, en 2023, Lydia a décidé d'opérer un revirement stratégique radical et d'abandonner l'idée de la « super app ». Déjà, son fondateur et dirigeant, Cyril Chiche avait perçu l'importance d'attirer les dépôts pour équilibrer le modèle. C'est même devenu une évidence avec la montée des taux d'intérêt.

Un premier pas a été fait avec le lancement du Compte Lydia, ce qui a eu surtout pour résultat de brouiller la communication auprès des clients sur le contenu même de l'offre de l'entreprise. Du coup, en début d'année, Lydia a dû scinder ses activités en deux, entre Lydia (Lydia Solutions), recentrée sur sa mission d'origine de cagnotte et de virement P2P, avec plus de 8 millions d'utilisateurs, et Lydia Comptes, dont la vocation à terme est d'être une banque universelle.

Ce qui ne change pas en revanche, c'est la volonté de Lydia de rester sur le B2C (vers le client final) alors qu'une écrasante majorité de fintechs se sont tournées vers le B2B pour tenter de trouver un modèle rentable. Or, finalement, ce sont les fintechs ciblées sur le client final qui connaissent les plus fortes croissances, comme Lydia ou Qonto en France, ou Revolut, Wise ou N26 en Europe.

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100 millions d'investissement

L'annonce ce matin du lancement d'une nouvelle marque, Sumeria (en hommage aux sumériens qui inventèrent l'écriture), qui regroupe de fait l'offre bancaire de Lydia Comptes (2 millions de clients actuellement), est donc l'aboutissement de cette nouvelle stratégie. Les ambitions sont clairement affichées : cinq millions de clients « bancaires » d'ici trois ans.

Et les moyens mis sur la table sont conséquents : 100 millions d'euros, financés sur ressources internes. La fintech a levé depuis son lancement quelque 235 millions d'euros et compte toujours parmi ses actionnaires le chinois Tencent (WeChat et WeChat Pay). Coïncidence, la fintech britannique Revolut vient également d'annoncer un plan d'investissement de 100 millions sur la France !

Sumeria, c'est donc un compte courant. La recette ? Un compte rémunéré à 2% - une rareté dans le paysage bancaire français malgré la profusion de comptes à terme et de livrets boostés - mais aussi la simplicité du parcours client, qui est une sorte de « marque de fabrique » de Lydia. Le compte rémunéré est rendu possible par la hausse des taux mais aussi par « la faiblesse des coûts de structure ». La disruption, selon Cyril Chiche, viendra donc de « l'avènement d'un acteur numérique qui, comme Uber, Airbnb ou Spotify, transforme son secteur grâce à une structure de coûts radicalement plus légère ».

La fintech prévoit cependant d'embaucher 400 personnes en trois ans - sur un effectif actuel de 250 personnes. La fintech doit se souvenir des déboires de nombreuses néo-banques qui ont grandi trop vite, à l'instar de N26, sans mettre en face les moyens nécessaires pour assurer la conformité de l'activité bancaire.

La bataille européenne

Toutefois, la fintech a toujours su accompagner son développement grâce aux nouvelles technologies, comme les chatbots, et elle compte aujourd'hui sur l'IA pour accompagner les clients et les chargés de clientèle.

La fintech, qui dispose d'un statut d'établissement de paiement et aussi, plus récemment, celui d'établissement de financement, est en cours d'agrément pour un statut de banque de plein exercice, plus difficile à obtenir. Une banque n'est pas véritablement une banque sans crédit, et surtout sans crédit immobilier. C'est pourquoi d'ailleurs, Revolut se lance dans le crédit immobilier en France.

Elle souhaite faire de sa marque une marque véritablement européenne. Elle aura donc à affronter des fintechs déjà bien installées sous bannière européenne, comme N26 ou Revolut. En France, BoursoBank (Société Générale) rafle la mise avec un nouvel objectif de 8 millions de clients et Hello Bank ! (BNP Paribas) compte sur le transfert du portefeuille d'Orange Bank pour réduire l'écart.

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Commentaires 2
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à écrit le 16/05/2024 à 9:50
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