Le niveau d'endettement de l'Italie, la France et l'Espagne inquiète le FMI, des ajustements budgétaires sont attendus

Par latribune.fr  |   |  858  mots
Pour la directrice générale du FMI, en France, 2024 doit marquer un tournant vers le resserrement budgétaire. (Crédits : MICHELE TANTUSSI)
L'Italie, la France et l'Espagne doivent « procéder à des ajustements budgétaires », estime la directrice générale du FMI Kristalina Georgieva, dans une interview à plusieurs journaux européens. Elle s'inquiéte aussi des conséquences du conflit au Proche-Orient, de la montée du populisme, et de la bataille contre l'inflation qui n'est gagnée.

Le FMI distribue ses bons et, surtout, ses mauvais points. « Contrairement aux Etats-Unis, qui ont retrouvé leur rythme de croisière d'avant la pandémie, la zone euro est toujours 2 % en dessous de sa tendance d'avant la pandémie et la croissance y est très modeste », souligne la directrice générale du FMI Kristalina Georgieva dans une interview accordée à plusieurs journaux européens dont Les Echos, publiée ce jeudi.

La réponse budgétaire au Covid, la hausse des prix de l'énergie à la suite de la guerre en Ukraine, et les tensions sur le marché du travail sont, pour la responsable, autant d'obstacles pour une reprise franche de la croissance dans la zone euro.

Kristalina Georgieva cible particulièrement la France, l'Italie et l'Espagne qui « ont vu leur ratio dette/PIB augmenter considérablement ». Elle les appelle donc à « vraiment procéder à des ajustements budgétaires ».

La France en « meilleure position » que l'Italie

Pour l'Italie, le problème « est aggravé par le ralentissement de la croissance résultant du retrait des mesures de soutien politique, les revenus ne sont donc pas assez élevés et rendent l'ajustement plus difficile ». Notant que la France est « dans une meilleure position car la croissance permet un ajustement budgétaire », la directrice générale du FMI estime toutefois « que 2024 doit marquer un tournant vers le resserrement budgétaire ». L'agence de notation Standard and Poor's (S&P) doit d'ailleurs se prononcer le 1er décembre sur la note de la dette française.

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L'Espagne, qui a bénéficié d'un fort rebond des services et du tourisme, prévoit un ajustement de 0,3%, ce que, dit-elle, le FMI juge « acceptable tant que le pays ne renouvelle pas les mesures de soutien politique qui devraient expirer à la fin de cette année ».

« Je pense que le moment est venu pour les dirigeants de faire ce qu'il faut : plus de courage, plus de force, de leadership, car les temps sont durs, et faire ce qui n'est peut-être pas populaire mais qui est nécessaire. C'est la raison pour laquelle les dirigeants sont aux positions qu'ils occupent. »

Les déclarations de la patronne du FMI trouvent écho à celles formulées lundi par vice-président de la Commission européenne, Valdis Dombrovskis, qui a estimé que la France mais aussi la Belgique, la Croatie et la Finlande, « risquent de ne pas être en ligne avec les recommandations » budgétaires de l'Union européenne pour l'an prochain, en raison de dépenses publiques excessives. Autrement dit, ces quatre pays doivent « réduire les dépenses » pour respecter les limites européennes, lesquelles fixent deux plafonds à ne pas dépasser : celui du déficit public à 3% du produit intérieur brut (PIB) et celui de la dette publique à 60% du PIB.

Outre les quatre pays épinglés ce mardi, Paolo Gentiloni, le commissaire à l'Economie, a souligné que neuf autres Etats membres n'étaient « pas complètement en ligne » avec les recommandations, dont l'Allemagne qui est appelée, comme la France, à supprimer « dès que possible » les mesures d'aides adoptées pour réduire les factures énergétiques des ménages et entreprises.

Proche-Orient et populisme

Evoquant la guerre entre Israël et le Hamas, Kristalina Georgieva relève que si elle « se prolonge ou s'intensifie, elle aura un impact tangible » sur l'économie mondiale. « La croissance en Israël va inévitablement être affectée », ajoute-t-elle, et « il en va de même pour les pays voisins comme le Liban, la Jordanie et l'Egypte, où le tourisme est également important ».

Interrogée sur la montée du populisme, la responsable estime que « si nous ne sommes pas conscients de la nécessité de perfectionner constamment les compétences des gens (...), nous pourrions alimenter encore une fois le populisme ».  Mais elle met aussi en avant « le rôle des réseaux sociaux », « une plateforme pour les plus bruyants, les plus colériques et les plus haineux ».

Et, après l'élection à la tête de l'Argentine de Javier Milei, la patronne du FMI souligne que « le pays a besoin d'un plan de réformes ambitieux, c'est notre message à l'Argentine depuis un certain temps et c'est toujours le même ».

La bataille contre l'inflation n'est pas encore gagnée

Par ailleurs, même si l'on assiste «  à une baisse de l'inflation mondiale depuis le sommet de 11,6 % atteint au deuxième trimestre 2022 », Kristalina Georgieva exhorte les banques centrales à surveiller attentivement les données avant d'agir.

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Elle explique : « Une chose est claire : l'inflation n'est pas un problème homogène. En d'autres termes, ce n'est pas pareil partout. Il existe encore de grandes divergences entre les pays. Les autorités doivent donc calibrer leurs actions en fonction de ce qui se passe concrètement devant elles. Sans stabilité des prix, nous n'avons aucun espoir de hisser la croissance à un niveau suffisamment élevé. En 2024, il y aura encore des pressions inflationnistes qu'il faudra réduire. »

(Avec AFP)