Le climat responsable des incendies meurtriers en Europe

Par latribune.fr  |   |  1121  mots
Le feu de forêt qui a encerclé Tenerife depuis mercredi ralentissait vendredi grâce à l'action des pompiers et à des conditions météorologiques meilleures, selon les autorités. (Crédits : BORJA SUAREZ)
Grèce, Espagne, Portugal, Italie... Depuis mi-juillet, l'Europe est sujette à des incendies géants impactant l'économie touristique et mettant en danger les populations. L'anticyclone présent depuis ces derniers jours au sud de l'Europe n'améliore pas cette situation.

Environ 26.000 personnes ont été contraintes de quitter leur domicile à Tenerife en raison de l'avancée d'un incendie de forêt gigantesque qui continue de se propager dans cette île touristique de l'archipel espagnol des Canaries, d'après un bilan établi samedi par les services de secours.

Des vents violents et des températures supérieures aux prévisions ont favorisé la propagation du feu durant la nuit de vendredi à samedi, depuis son déclenchement mardi soir dans une région montagneuse du nord-est de l'île.

Les autorités estiment qu'il s'agit de l'incendie « le plus complexe » des quarante dernières années pour l'archipel des Canaries. Les services de secours ont mentionné sur les réseaux sociaux que des évaluations préliminaires suggèrent que plus de 26 000 personnes ont été évacuées.

5.000 hectares touchés

Les autorités avaient annoncé la veille au soir environ 4.500 évacuations, mais samedi matin, cinq nouvelles municipalités ont dû être évacuées dans la zone touchée par l'incendie. Manuel Miranda, un responsable local des services d'urgence, a déclaré : « Le feu et les conditions météorologiques ont évolué, et nous avons dû évacuer cinq municipalités dans le nord de Tenerife », soulignant « le danger et la proximité du feu ».

Jusqu'à présent, l'incendie a touché onze municipalités sur l'île de Ténérife, la plus grande des Canaries. D'après les chiffres de vendredi soir, il a dévoré 5.000 hectares, soit près de 2,5 % de la superficie totale de Tenerife, qui s'étend sur 203.400 hectares au total.

Fernando Clavijo, le président du gouvernement régional des Canaries a déclaré à la presse que les conditions météorologiques de la nuit précédente avaient été « extrêmement extrêmes ».

Bien que l'île ait connu des incendies plus vastes en termes de surface brûlée, notamment en 2007, les conditions météorologiques et la topographie de celui-ci ont conduit M. Clavijo à affirmer que l'archipel faisait face à son incendie "le plus complexe" depuis quarante ans.

Des nuages de fumée

Le responsable des services forestiers, Pedro Martínez, a déclaré aux journalistes que le périmètre du brasier avait « très probablement considérablement augmenté » pendant la nuit et qu'il progressait régulièrement dans la région de Santa Ursula (nord-est). Il a décrit l'incendie comme « un feu de forêt de sixième génération », faisant référence à sa taille. Il a ajouté que « l'incendie dépasse notre capacité à le maîtriser, peut-être pas dans tous les secteurs, mais dans une grande partie d'entre eux », soulignant que les pompiers étaient confrontés à des difficultés sur le terrain en raison du vent et de la forte fumée.

Le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, attendu à Tenerife lundi, et le ministre de l'Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, présent sur place samedi, ont assuré que toutes les ressources de l'État étaient mobilisées pour maîtriser "cette urgence très grave".

Tenerife est la plus grande des sept îles composant l'archipel espagnol des Canaries, situé au large des côtes ouest de l'Afrique. L'incendie a produit un important nuage de fumée s'élevant à huit kilomètres de hauteur, visible sur les images satellites, qui a dépassé le sommet du Teide, le volcan dominant l'île et point culminant de l'Espagne. Ce sinistre survient entre deux vagues de chaleur sur l'île, qui présente de nombreuses zones asséchées, augmentant ainsi le risque d'incendie.

Selon les experts, les phénomènes météorologiques extrêmes se sont intensifiés en raison du réchauffement climatique. Les canicules risquent d'être plus fréquentes, plus intenses et d'avoir un impact plus étendu. En 2022, plus de 300 000 hectares ont été ravagés par plus de 500 incendies en Espagne, un record en Europe, selon le Système européen d'Information sur les Feux de Forêt (Effis). En 2023, près de 76 000 hectares ont déjà brûlé dans le pays, qui est en première ligne face au réchauffement climatique.

Huit villages évacués dans le nord-est en Grèce

Huit villages ont été évacués dans le nord-est de la Grèce ce samedi, et les autorités signalent que le feu se propage en direction de l'aéroport de la cité portuaire d'Alexandroupolis.

« Un minimum de huit villages ont été évacués, et nous mettons en œuvre tous les efforts nécessaires pour préserver la sécurité des habitants », a déclaré Christos Metios, le gouverneur de la Macédoine orientale et de la Thrace, à l'agence Athens News.

Les autorités ont émis une consigne pour que les résidents de la cité portuaire d'Alexandroupolis restent chez eux.

« Nous prévoyons une nuit difficile en raison de rafales de vent atteignant 7 à 8 sur l'échelle de Beaufort, qui va de 0 à 12 », a indiqué un porte-parole des pompiers à la chaîne de télévision Skai TV.

Dans la matinée, des habitations ont été détruites dans les villages d'Aetohori et de Pefkax, comme l'ont signalé les pompiers cités par l'agence Athens News. Le feu menace actuellement les villages d'Agnantia et d'Anthia, se dirigeant vers le nord en direction de l'aéroport d'Alexandroupolis, toujours selon les informations fournies par les pompiers.

Les autorités aéroportuaires sont en état d'alerte à cause de la fumée épaisse qui réduit la visibilité, a précisé la même source. Trois bateaux des garde-côtes, assistés par des navires privés, sont également en alerte dans le port d'Alexandroupolis, conformément aux instructions des autorités. Trois autres navires de garde-côtes se dirigent vers la zone, ont-elles ajouté.

Au total, les autorités indiquent que 31 camions de pompiers, neuf équipes de pompiers au sol, 14 avions et 4 hélicoptères, soutenus par des volontaires, sont mobilisés pour combattre l'incendie dans cette région.

En Grèce, au cœur d'une canicule, un incendie déclenché le 18 juillet et attisé par des vents violents a ravagé près de 17 770 hectares en dix jours dans le sud de Rhodes, une île très prisée de la mer Égée (sud-est). Environ 20 000 personnes, principalement des touristes, ont été évacuées.

Fin juillet, le pays a subi la plus grande vague de chaleur enregistrée pour un mois de juillet, avec des températures dépassant les 40°C dans de nombreuses régions, selon l'Observatoire national d'Athènes. Cela a provoqué de multiples incendies, notamment sur une autre île très touristique, Corfou (nord-ouest), d'où environ 2 500 personnes ont dû être évacuées.

(Avec Reuters et AFP)

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