![En mai 2023, le gouvernement allemand avait instauré un abonnement à 49 euros par mois permettant de voyager sur l'ensemble du réseau de transports publics allemands.](https://static.latribune.fr/full_width/2381253/un-train-de-l-operateur-allemand-deutsche-bahn-a-berlin.jpg)
Pour la première fois depuis six mois, l'inflation est repartie à la hausse outre-Rhin. L'indice des prix à la consommation a atteint +2,4% sur un an en Allemagne, soit 0,2 point de plus qu'en avril, selon une estimation provisoire publiée ce mercredi par l'institut de statistiques Destatis. Sur un mois, les prix ont augmenté de +0,1%.
Ce n'est toutefois pas une surprise : cette augmentation, la première depuis novembre 2023, correspond en effet aux prévisions des experts de la plateforme d'analyse financière Factset. Elle s'explique par la fin d'un effet de base lié à l'introduction en mai 2023 d'un abonnement à 49 euros par mois permettant de voyager sur l'ensemble du réseau de transports publics allemands. Ainsi, jusqu'au mois d'avril, le prix des transports, comptabilisés dans l'inflation, étaient comparés à leur coût, nettement plus important, datant d'avant l'introduction de ce billet.
« Il n'y a pas lieu de s'alarmer », assure donc Elmar Völker, analyste pour la banque LBBW.
Dans le détail, les prix de l'énergie ont poursuivi leur baisse, de 1,1% sur un an, après 1,2% en avril. Du côté de l'alimentation, l'inflation a atteint 0,6%, soit 0,1 point de plus par rapport au mois précédent.
Pas de quoi changer les plans de la BCE
Servant de référence à la Banque centrale européenne (BCE), l'indice global des prix harmonisé atteint +2,8%. Un niveau qui l'éloigne de la cible de moyen terme de 2% visée par l'institution monétaire. Pour autant, ce résultat ne devrait pas la faire changer d'avis, elle qui compte commencer à abaisser ses taux directeurs lors de sa prochaine réunion de politique monétaire, le 6 juin prochain.
Cette hausse « nous rappelle à quel point il sera difficile pour la BCE de ramener durablement l'inflation à 2% », même si « ce serait une surprise majeure que la BCE n'abaisse pas ses taux » résume Carsten Brzeski, analyste pour la banque ING.
Pour rappel, pour calmer l'inflation galopante dans la zone euro, la BCE a augmenté les coûts d'emprunt à un rythme sans précédent à partir de juillet 2022. Son principal taux directeur, celui sur les dépôts, a ainsi atteint son plus haut historique, à 4%, tandis que le taux de refinancement et le taux de facilité de prêt marginal se situent respectivement à 4,50% et 4,75%. Mais depuis octobre dernier, l'institution a opté pour le statu quo, laissant, à chaque réunion, ses taux à un niveau inchangé. Elle envisage désormais de les baisser et il semblerait que la date de sa prochaine réunion soit celle où cette décision sera actée. Il existe de « solides arguments en faveur d'une réduction des taux en juin », a ainsi estimé pas plus tard que la semaine dernière le gouverneur de la Banque de Finlande Olli Rehn, qui compte parmi les vingt-cinq membres du conseil des gouverneurs de la BCE.
Les Allemands retrouvent le moral
Malgré ce léger sursaut, l'inflation s'affiche bien en dessous de ce qu'elle était il y a encore six mois - elle s'élevait à +5,9% en novembre dernier. Si bien que le moral des consommateurs en Allemagne devrait poursuivre sa remontée en juin, pour la quatrième fois d'affilée, selon le baromètre GfK publié ce mercredi également. L'institut prévoit un indice à -20,9 points en juin, en hausse de 3,1 points par rapport à sa valeur du mois de mai, révisée 0,2 point à la hausse. « La baisse du taux d'inflation, associée à une hausse considérable des salaires, renforcent le pouvoir d'achat des consommateurs », observe Rolf Bürkl, expert du GfK. Les revenus réels des salariés et fonctionnaires ont en effet augmenté, après des hausses obtenues lors des négociations par les syndicats dans de nombreuses branches, tandis que le chômage reste à un niveau bas. La baisse attendue des taux d'intérêt de la Banque centrale européenne (BCE) en juin devrait aussi soutenir la consommation.
Reste que la propension à ouvrir le porte-monnaie va rester freinée par « une forte incertitude en raison du manque de perspectives claires d'avenir pour le pays », selon le baromètre GfK. L'industrie, pilier de la première économie européenne, a souffert pendant plusieurs mois d'une crise multiforme, entre coûts élevés de l'énergie, faible demande domestique et difficultés du commerce international. Le renchérissement du crédit et l'incertitude politique, sur fond de divisions internes au gouvernement entre Verts, libéraux et sociaux-démocrates sur la politique budgétaire, ont freiné les investissements et la demande faible a handicapé les exportations.
Toutefois, l'économie bénéficie désormais d'une reprise, sur fonds d'augmentation de la consommation, des exportations et de coûts de l'énergie beaucoup moins élevés. Mais le rebond économique pour cette année s'annonce très faible. Le gouvernement allemand a récemment annoncé un léger relèvement de sa prévision de croissance pour l'année en cours, qu'il a portée de 0,2% à seulement 0,3%. Ce qui est bien moins que les prévisions de Bruxelles pour la zone euro, à 0,8% cette année puis 1,4% l'an prochain. Mais s'avérerait bien meilleur que l'année 2023, où la première puissance européenne était tombée en récession.
(Avec AFP)