Accord de libre-échange : l'Australie et l'UE échouent à trouver un terrain d'entente

Par latribune.fr  |   |  783  mots
Pour l'Europe l'usage du terme « roquefort » doit être réservé aux fromages au lait de brebis fabriqués autour du village français éponyme, ce que conteste l'Australie. (Crédits : Reuters)
Alors qu'Olivier Becht, ministre délégué chargé du Commerce extérieur, avait salué en fin de semaine dernière un « nombre d'avancées très positives », les négociations entre l'Union européenne et l'Australie ont échoué à déboucher sur un accord de libre-échange cette semaine. Il faudra sans doute plusieurs années avant une reprise des pourparlers.

Ce n'est pas demain que l'Union européenne et l'Australie arriveront à s'entendre sur les termes d'un accord de libre-échange. Le ministre australien de l'Agriculture, Murray Watt, a indiqué que les négociateurs de l'UE n'avaient pas fait évoluer leur position lors du dernier cycle de négociations, organisé en marge d'une réunion du G7 au Japon.

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« Malheureusement, nous n'avons pas obtenu le mouvement souhaité du côté de l'UE », a-t-il déclaré ce lundi 30 octobre, à la chaîne de télévision publique australienne ABC. « Il est peu probable que les négociations reprennent au cours de la législature actuelle », a-t-il ajouté, suggérant que le gouvernement australien pourrait ne pas revenir à la table des négociations... avant les élections législatives de 2025.

 « Je pense qu'il faudra un certain temps avant qu'un gouvernement australien ou un dirigeant de l'UE soit en mesure de négocier un accord. Et c'est assez dommage ».

Des négociations qui durent depuis 2018

L'Union européenne s'était pourtant montrée optimiste quant à la conclusion d'un accord au G7 d'Osaka. L'Australie a toutefois « présenté des revendications agricoles qui ne reflétaient pas les récentes négociations », a indiqué un porte-parole de la Commission européenne, qui est « prête à poursuivre les négociations », selon un communiqué. Le ministre français du Commerce, Olivier Becht, avait salué en fin de semaine dernière un « nombre d'avancées très positives », laissant espérer qu'un accord rapide soit trouvé.

Il faut dire que les discussions durent depuis un certain nombre d'années. Les négociations entre l'UE et l'Australie sur un accord de libre-échange durent en effet depuis 2018. En pratique, les deux parties peinent notamment à se mettre d'accord sur l'ouverture du marché européen aux exportations australiennes de viande ovine, de bœuf et de sucre.

La question de l'accès des produits agricoles européens et les appellations d'origine protégée européennes (fromages, vins, viandes...) complique en effet la donne. L'Australie voulant pouvoir exporter du roquefort, de la féta ou encore du jambon de Parme, ce que refuse l'Union européenne Cette dernière a soumis à l'Australie une liste de plus de 400 produits associés à ses territoires qu'elle souhaite protéger. De son point de vue, l'usage du terme « roquefort » doit être réservé aux fromages au lait de brebis fabriqués autour du village français éponyme.

Et seuls les producteurs hollandais devraient pouvoir revendiquer l'appellation « gouda », un fromage fabriqué aux Pays-Bas. Des exigences auxquelles refuse de céder Canberra. « Après la Seconde Guerre mondiale, l'Australie a connu une forte vague d'immigration arrivée de l'Europe », a expliqué début juin Murray Watt. « Nos producteurs ont ramené leurs produits de leur pays d'origine et les ont fabriqués ici ». Le ministre déclarait alors que si « l'Australie ne parvient pas à obtenir un bon accord, mieux vaut ne pas en conclure du tout ».

Un meilleur accès aux riches gisements australiens

L'Europe espère par cet accord un meilleur accès aux riches gisements australiens de « minéraux critiques », afin de réduire sa dépendance à l'égard de la Russie et de la Chine pour ces composants clés permettant la fabrication d'éoliennes et de batteries de voitures électriques. « Il convient de faire en sorte que les quotas qui sont attribués à l'Australie pour venir sans droits [de douane] sur le marché européen et français soit dans une jauge raisonnable par rapport à ce que le marché peut lui-même absorber », avait déclaré vendredi Olivier Becht. Mais « la France souhaite un accord » car l'île-continent « est un grand producteur de minéraux critiques » et il y a des « intérêts industriels » pour les entreprises européennes.

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De son côté, le gouvernement britannique a signé mi-juillet son adhésion au partenariat de libre-échange transpacifique (CPTPP). Le Royaume-Uni est le premier pays d'Europe à rejoindre le CPTPP, qui comptera ainsi 12 pays pour un PIB (Produit intérieur brut) de 12.000 milliards de livres sterling (14.000 milliards d'euros). La ministre britannique du Commerce, Kemi Badenoch, avait alors mis en avant les « milliards de livres sterling d'échanges supplémentaires » pour les entreprises britanniques. Signé notamment par la Nouvelle-Zélande, l'Australie ou encore le Canada et le Japon, le CPTPP est le plus important pacte de libre-échange de la région. La Chine a fait acte de candidature en 2021, mais plusieurs pays voient cette demande d'un mauvais œil.

(Avec AFP)