Le moment Xavier Bertrand

Le nom du président des Hauts-de-France circule pour Matignon. Malgré un profil rassembleur et des soutiens en Macronie, l’ex-ministre sait que rien n’est joué.
Jules Pecnard
Xavier Bertrand aurait besoin de l’appui d’une partie
de la gauche pour gouverner.
Xavier Bertrand aurait besoin de l’appui d’une partie de la gauche pour gouverner. (Crédits : © LTD / Stephane Le Tellec/ABACAPRESS)

Alain Terrenoire en a vu d'autres. Plus jeune député de l'Assemblée nationale après les législatives de 1967, ce « gaulliste de gauche » a siégé dans le même hémicycle que Pierre Mendès France, Waldeck Rochet et François Mitterrand. Il a vu vaciller le gouvernement Pompidou, fragilisé par sa majorité étriquée, ses alliés centristes peu fiables et, surtout, la grève générale ordonnée par les syndicats. La fièvre étudiante est venue décupler les convulsions sociales de ces Trente Glorieuses finissantes. À l'issue des événements de Mai 68, le général de Gaulle a rebattu les cartes en prononçant une dissolution de la chambre basse. Alain Terrenoire a été réélu dans la Loire, chevauchant l'ultime vague de soutien au héros de la France libre.

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Xavier Bertrand aime à puiser dans ce genre d'expérience. Mi-juillet, celui qui revendique la filiation gaulliste a sondé l'ancien élu UDR, un ami, sur l'opportunité d'aller à Matignon. « Je l'ai senti disponible, rapporte Alain Terrenoire, maniant l'euphémisme. Xavier n'est pas un macroniste acharné, il a une expérience ministérielle sans tache indélébile, il a une orientation plutôt sociale, et il a été soutenu par la gauche aux régionales de 2015 contre le FN. Les socialistes ne lui sont pas hostiles par principe. Après, il n'est pas de Gaulle... En tout cas, il a la prétention de ne pas le prétendre. » Au minimum, le président des Hauts-de-France croit être l'homme du moment. Il l'a toujours pensé, sans que les circonstances lui donnent gain de cause. Depuis les dernières législatives, Xavier Bertrand a multiplié les consultations, activant ses différents réseaux. Du côté de l'Élysée, on n'écarte pas la piste.

Auprès des médias, l'ex-ministre de Nicolas Sarkozy teste des formules. Le 3 juillet, durant l'entre-deux-tours, il appelle à la formation d'un « gouvernement provisoire ». Le 9, il nuance ses allusions à l'après-guerre et parle d'un exécutif « d'urgence nationale ». Son entourage souhaite une « cohabitation », admettant qu'il s'agit là d'un abus de langage : sur les fondamentaux de la démocratie libérale, l'Europe ou l'économie de marché, l'intéressé et le président de la République sont proches. Comme tout le monde, le dirigeant du parti Nous France tâtonne. Comment obtenir une majorité à peu près stable dans l'Assemblée la plus morcelée de la Ve République ? Comment faire voter un budget censé aboutir, selon Bercy, à 25 milliards d'euros d'économies sans embraser le pays ? Comment entraîner des députés engourdis par la crainte, légitime, d'une nouvelle dissolution dès 2025 ?

35 « bonnes volontés » à trouver

À l'instar de nombreux caciques du centre et de la droite, Xavier Bertrand sait que rien n'est possible, à moyen terme, sans « arracher » la gauche modérée à son accord électoral avec La France insoumise. Un hypothétique socle alliant macronistes, Droite républicaine et indépendants de Liot aboutit à un total de 235 sièges au Palais-Bourbon. Si loin des 289 requis pour une majorité absolue. D'où l'insistance des bertrandistes dès qu'il est question de leurs bons rapports avec une partie du PS, des communistes et des syndicats réformistes. Un conseiller se hasarde au comptage. Il évalue à 35 le nombre d'élus du Nouveau Front populaire qui pourraient soutenir les textes d'un gouvernement issu de cet arc des « bonnes volontés », autre expression de l'ex-maire de Saint-Quentin.

Plus prudente, une autre fidèle s'en tient à évoquer le profil de Dominique Potier, l'un des rares socialistes à ne pas avoir voté la première motion de censure déposée par la gauche contre Élisabeth Borne. Un membre du groupe DR mentionne des échanges réguliers entre Xavier Bertrand et Arnaud Montebourg. La tribune signée récemment dans La Croix par Guillaume Garot, député PS réélu et ancien ministre de François Hollande, a suscité l'intérêt du candidat à Matignon. Son titre ? « Le travail transpartisan peut éviter les blocages ». Pour attirer sociaux-démocrates et gauche républicaine, l'équipe Bertrand invoque une martingale : la promesse d'instaurer la proportionnelle à un tour aux législatives. Ce mode de scrutin, arlésienne de la présidence Macron, délesterait le PS (sur le papier) d'un besoin de s'allier avec LFI, dont la radicalité déplaît aux électeurs des circonscriptions plus modérées.

Les Républicains divisés

Le président des Hauts-de-France a bien d'autres verrous à faire sauter. Sa relation glaciale avec le chef de l'État en est un. « C'est la grosse case qu'il ne coche pas », grince un sarkozyste qui a discuté il y a quelques jours avec Xavier Bertrand. Durant l'échange, ce dernier a donné son avis sur un autre nom qui circule, celui de Michel Barnier : « Il a pu l'imaginer, mais il n'y a pas la majorité pour. » Mais l'ex-député de l'Aisne l'a-t-il, lui, ne serait-ce qu'en Macronie ? Au sein du camp présidentiel, il sait qu'il peut compter sur l'appui d'Hervé Marseille, chef des sénateurs centristes, et surtout de Gérald Darmanin, jadis son bras droit à la Région. Les deux hommes se sont parlé avant et après les élections du 7 juillet. Le ministre de l'Intérieur démissionnaire a besoin de reprendre l'avantage dans son bras de fer avec Gabriel Attal, qui chapeaute désormais les 99 élus Ensemble pour la République. Or, avec un gouvernement Bertrand, le premier conserverait peut-être un ministère régalien, mais le second aurait la main sur le principal groupe du bloc central au Palais-Bourbon.

Chez LR, les choses ne sont pas plus simples. Les soutiens actifs de Xavier Bertrand y sont minoritaires, bien qu'une part croissante des députés Droite républicaine lorgne l'idée d'une coalition avec les macronistes. Laurent Wauquiez - qui veut être le recours de son camp pour la prochaine présidentielle - y est totalement opposé. Idem pour son homologue du Sénat Bruno Retailleau, dont certains collègues ont envisagé d'écrire une tribune pro-Bertrand. Le « pacte législatif » défendu par les deux leaders parlementaires a permis de temporiser. « Ils sont persuadés de pouvoir encore jouer l'indépendance, glisse un proche de Xavier Bertrand. Wauquiez pense qu'une coalition est vouée à l'échec et que ça ne sert à rien de s'abîmer en travaillant avec Macron. » Une autre estime que, justement, le député de la Haute-Loire « peut parier sur un plantage » et laisser son rival aller à Matignon. Si cela advient, aurait glissé le Nordiste à l'un de ses interlocuteurs récents, « vu la situation, il faut écarter 2027 ». Pour la droite ou pour Xavier Bertrand ?

Jules Pecnard
Commentaires 30
à écrit le 20/08/2024 à 21:02
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Impressionnant. Les français élisent dans l'ordre le rn, ps, lfi et très loin derrière lr et Macron veut désigner un lr??? C'est fou ils veulent une révolution à lancienne?

à écrit le 18/08/2024 à 22:15
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Le traite LR , celui qui quitte le parti LR pour esperer avoir un poste de ministre puis, voyant que cela ne marche pas, retourne au berceuil pour se ramasser une claque au primaire. Comme Valérie Pécresse, sa belle collègue haut fonctionnaire. Tous ...

à écrit le 16/08/2024 à 4:31
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Premier ministre : pour faire quoi ?

à écrit le 09/08/2024 à 20:58
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Emmanuel Macron a volontairement choisi en dissolvant l’Assemblée de plonger le pays dans une situation inédite d’absence de majorité, tout en sachant qu’elle allait être pénible, pour que les Français, après avoir subi ça pendant peut-être 3 ans, dé...

à écrit le 08/08/2024 à 11:00
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Avec Xavier Bertrand, c'est le règne du paraître comme Lucie Castets fonctionnaire de la chaise longue. Son rêve ? Rouler en voiture avec gyrophare, entouré de gardes du corps, pour impressionner sa jeune compagne. Mais ne vous y trompez pas : derri...

à écrit le 07/08/2024 à 20:13
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L'instant ? bref et éphémère ... revenons au réel 1984 d'Orwell c'est de la science fiction ... seul le NPF a été désigné, à un candidat, un programme et un plan d'action... que demandez de plus puisque c'est le chois des français, n'en déplaise aux...

à écrit le 07/08/2024 à 20:13
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L'instant ? bref et éphémère ... revenons au réel 1984 d'Orwell c'est de la science fiction ... seul le NPF a été désigné, à un candidat, un programme et un plan d'action... que demandez de plus puisque c'est le chois des français, n'en déplaise aux...

à écrit le 07/08/2024 à 17:33
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toujours en priere xavier? c'est grave docteur peut etre se demande t il comment il va etre mange s'il venait a etre premier ministre il est vrai que deux loubards ensemble sa risque d'etre complique mieux vaut miser sur cazeneuve competent et...

à écrit le 07/08/2024 à 9:10
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On sent que cela va finir en eau de boudin cette recherche de premier ministre par le biais d'une coalition! Le McKron va vous inventez la coalition européenne pour le désigner ! Européiste... vous avez toute vos chances de nous mettre entièrement so...

à écrit le 05/08/2024 à 16:33
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xavier serait il en meditation ou prie t il les dieux sur la photo ? sans doute se souvient il de ses sombres histoires avec les labos SERVIERS on a aussi la memoire longue le canard enchaine revelait qu'en 2006 2 medecins charges de conseille...

le 06/08/2024 à 12:03
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C'est sans doute l'air inspiré qui sied au Très Haut, celui qui préside les Hauts-de-France...

le 06/08/2024 à 17:45
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en 2016. s augmente de 4000 euros pour compenser la fin du cumul de ses mandats ! rien d illégal bref. mais un coüt pour le contribuable. le problème d éthique !

à écrit le 05/08/2024 à 13:43
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Xavier Bertrand ou Michel Barnier par exemple n’appartiennent pas à une majorité parlementaire pas plus d’ailleurs que Lucie Castets. Il est donc presque certain que la nomination du futur premier ministre sera totalement arbitraire et que le gouvern...

à écrit le 05/08/2024 à 9:51
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La France est trop fragmentée pour être gouvernable (LFI, Ecologie, PS, PC, LR, RN, Renaissance, etc..).

à écrit le 05/08/2024 à 9:49
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C'est parfait pour faire comprendre au peuple qui est le maître et pour qui il doit voter. Bon, les loosers sont toujours aux manettes, qu'ils gouvernent donc avec LFI pour qui ils se sont désistés. Et on en reparle très vite...

à écrit le 05/08/2024 à 9:49
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Il y a un réel danger à ne pas appliquer l’esprit de la Veme république concernant le programme arrivé en tête des législatives. Jouer avec le feu n’a pas vraiment marché en Nouvelle-Caledonie alors évitons la même cata en métropole. Mr. Macron ne dé...

à écrit le 05/08/2024 à 1:52
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L'assureur a matignon, de mieux en mieux.

à écrit le 04/08/2024 à 18:48
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L'Oligarchie recherche déjà un remplaçant à Macron pour 2027. Plusieurs "personnalités" (dont Bertrand!) sont ou vont être testées, puis une seule sera promue par les médias lui appartenant dans le but de berner une fois de plus les citoyens un peu n...

à écrit le 04/08/2024 à 15:43
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Xavier Bertrand, l'homme du passé qui pense d'abord â son avenir politique.

à écrit le 04/08/2024 à 15:10
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Bonjour, bien sûr, si Mr Macron pouvez assurer une majorité avec les élément du centre ,et maintenir sa politique ... Tous serait pour le mieux... Maintenant, la rentrée risque d'être sportive... Bien sûr, ils ne faut pas le dire... Mais nous avons...

à écrit le 04/08/2024 à 14:05
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La loge a parlé.

à écrit le 04/08/2024 à 13:59
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établir un parallèle entre le sport et la politique de la part de m macron est ignoble qu'il fasse son job d'unir tous les francais et d'arreter sa polemique sur les droites il ferait bien du suivre les ideologies des magistrats de gauche et de le...

à écrit le 04/08/2024 à 13:38
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"Le nom du président des Hauts-de-France circule pour Matignon." Bien sûr un membre du parti républicain qui a fait un score misérable (3,4 % des inscrits) au 2nd tour des législatives plutôt qu'un membre du RN (23,3 % des inscrits) ou de Renais...

à écrit le 04/08/2024 à 11:54
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Un véritable pied de nez aux hauts fonctionnaires purs produits de l’enarchie , un assureur pour rassurer affaire à suivre

à écrit le 04/08/2024 à 9:19
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en politique un leurre ne fonctionnera pas cette fois après les résultats !

à écrit le 04/08/2024 à 9:08
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On a enfin trouvé " the right man for the right place " ! ... ! ... ! .... La France est ... sauvée ! ... ! .... Restent bien sûr les .... Français ... Avec Emmanuel Macron nous aurons vécu de nouvelles " Années Folles " et même, disons le, d...

à écrit le 04/08/2024 à 8:54
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Si c'est pour continuer sur les mêmes rails, en culpabilisant les français des frasques de leur représentant, à la solde de la coalition bruxelloise ; on n'y voit aucun intérêt autre que médiatique !

à écrit le 04/08/2024 à 8:29
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Bertrand est un postulant crédible pour Matignon. Une possible nomination qui doit aller de pair avec une affirmation à ne pas se présenter à la fonction présidentielle pour chercher à défaut d'une majorité, éviter au moins une motion de censure.

à écrit le 04/08/2024 à 8:17
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Photo: Il a vu la vierge oui monsieur, et elle lui a dit tu dois devenir président pour sauver l'humanité ! LOL ! ^^

à écrit le 04/08/2024 à 7:56
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"Si vous ne trouvez plus rien cherchez autre chose" Brigitte Fontaine. Et là ça y est ils ne trouvent vraiment plus rien visiblement.

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