Emmanuel Macron, invité jeudi soir aux 20H de TF1 et France 2, n'a pas dit pour qui voter, mais pour qui ne pas voter. Le chef de l'Etat a appelé les Français à se rendre aux urnes pour contenir la poussée annoncée de l'extrême droite, qui entraverait selon lui les politiques communautaires si elle disposait « d'une minorité de blocage » au Parlement européen. Ainsi, selon lui, une nouvelle percée de l'extrême droite au Parlement européen compromettrait l'avenir de l'Europe, laquelle « n'a jamais été autant menacée ».
Dramatisant l'enjeu, comme lors de son discours de La Sorbonne le 25 avril, il a mis en garde contre « un vote défouloir ». « On voit monter partout en Europe l'extrême droite », a martelé Emmanuel Macron. « Si demain la France envoie une très grande délégation d'extrême droite, si d'autres grands pays le font, l'Europe peut se retrouver bloquée. »
Prié de dire quelles leçons il tirerait d'un éventuel échec dimanche soir, le président a répondu : « J'entends toujours les messages ». Mais, a-t-il lancé, « je ne crois pas aux sondages, je crois aux élections ».
« J'appelle vraiment nos compatriotes à aller voter le 9 juin », a insisté le chef de l'Etat lors de cet entretien sur TF1 et France 2 à Caen au terme d'une journée de commémorations du Débarquement du 6 juin 1944. « Je repense toujours à nos amis britanniques qui ne sont pas allés voter un certain jour de Brexit. Ne pas aller voter, c'est laisser l'avenir de notre continent et de notre pays à d'autres. »
Les oppositions ont saisi le gendarme de l'audiovisuel
Accusé par les oppositions françaises de s'immiscer dans la campagne des élections européennes au mépris du pluralisme, le chef de l'Etat s'est justifié : « Pourquoi je pense que c'est mon rôle d'intervenir aujourd'hui ? D'abord parce que je vois les niveaux d'abstention qu'il y a partout en Europe mais aussi en France ».
Les oppositions ont, en effet, saisi l'Arcom, l'instance chargée de réguler les médias et les services numériques en France, pour dénoncer une inégalité de traitement entre les listes concourant pour le scrutin du 9 juin. Le gendarme de l'audiovisuel a ainsi dû rappeler mardi que « tout ou partie des propos tenus lors de cette interview pourra être pris en compte » dans le temps de parole de la liste du camp présidentiel et les autres listes devront bénéficier en contrepartie « d'un accès équitable » aux antennes.
Le chef de l'Etat est « obsédé par une seule chose : c'est le score du Rassemblement national dimanche », a ironisé jeudi la tête de liste RN Jordan Bardella sur Europe1-Cnews. « Si Emmanuel Macron n'arrive pas très largement derrière la liste du Rassemblement national, il va se sentir pousser des ailes et il va accélérer », a-t-il ajouté, citant l'augmentation du prix du gaz, la réforme de l'assurance chômage ou la désindexation des pensions de retraite.
Malgré une implication notable du président depuis plusieurs jours dans la campagne, la liste de la majorité présidentielle patine dans les sondages : selon une enquête réalisée par l'institut Elabe pour La Tribune Dimanche et parue le 1er juin, la tête de liste de la majorité, Valérie Hayer, n'était créditée que de 16% des suffrages estimés, effectuant néanmoins une très légère remontée par rapport à la semaine dernière, aux dépens de son rival des Républicains, François-Xavier Bellamy, toujours bloqué dans une zone (6,5%) où la marge d'erreur peut se révéler fatale.
Ce dernier a fustigé la prise de parole du chef de l'Etat, jeudi soir, estimant que « faire croire qu'il faudrait dramatiser l'enjeu (...) c'est en vérité servir le RN », déplorant l'utilisation des « plages du débarquement pour organiser la mise en scène de ce combat aberrant qui ne correspond à rien en Europe ».
De son côté, Jordan Bardella caracolait toujours en tête, selon l'enquête pour La Tribune du Dimanche, avec, malgré une petite baisse depuis le 26 mai, un score estimé de 32,5%.
Des avions de chasse Mirage 2000-5 pour l'Ukraine
Par ailleurs, au cours de cet entretien, Emmanuel Macron a dévoilé que la France allait fournir des avions de chasse Mirage 2000-5 à l'Ukraine. Une annonce qui sera faite ce vendredi à l'occasion de la venue du président ukrainien Volodymyr Zelensky en France.
Les pilotes de ces avions de chasse seront formés en France et la France prévoit de former 4.500 soldats ukrainiens, a poursuivi le chef de l'Etat, assurant qu'il n'y avait pas « aujourd'hui » d'instructeurs militaires français sur le sol ukrainien. « La paix doit arriver par le biais d'une négociation », a-t-il estimé. Ce moment, a-t-il jugé, n'est pas encore là « puisque la Russie continue d'avancer ».
(Avec AFP)