Narendra Modi en visite à Moscou, une première depuis l'offensive russe en Ukraine

Le Premier ministre indien, Narendra Modi a entamé, mardi, des entretiens approfondis avec le président russe, Vladimir Poutine, à Moscou. Objectif affiché, renforcer le partenariat des deux pays, à l’occasion le première visite du dirigeant indien depuis le début du conflit en Ukraine.
Le Premier ministre indien doit rencontrer ce mardi Vladimir Poutine pour des entretiens approfondis.
Le Premier ministre indien doit rencontrer ce mardi Vladimir Poutine pour des entretiens approfondis. (Crédits : ADNAN ABIDI)

[Article publié le 9 juillet 2024 à 9h42, mis à jour à 15h56] C'est une visite qui compte. Narendra Modi, qui a été reconduit en juin à la tête de l'Inde, est arrivé lundi à Moscou. Son arrivée est intervenue quelques heures après que la Russie a frappé massivement avec des missiles plusieurs villes ukrainiennes, dont Kiev, tuant au moins 36 personnes et en blessant plus d'une centaine.

Si ce voyage vise à approfondir les liens traditionnellement amicaux entre Moscou et New Delhi, il n'y a « aucune surprise » à attendre de cette visite, selon le Kremlin.

 « Il n'y a pas de surprise dans la préparation. L'essentiel est de créer une atmosphère propice à une interaction fructueuse », a déclaré le porte-parole de la présidence russe, Dimitri Peskov.

Poutine et Modi ont visité ensemble, mardi midi, une exposition sur l'histoire du nucléaire dans un centre d'exposition de Moscou et les discussions entre les deux dirigeants sur « le développement des relations russo-indiennes » et « l'agenda international » doivent se poursuivre dans la journée, d'après le Kremlin.

Poutine, « l'ami » de Modi

Narendra Modi et Vladimir Poutine se retrouvent donc pour des entretiens élargis, ce mardi, après un tête-à-tête « informel » lundi soir, autour d'une tasse de thé dans la résidence du dirigeant russe à Novo-Ogariovo, près de Moscou.

Lors d'un bref passage à la télévision, le président russe a vanté la compétence de son homologue, saluant son « énergie » et sa capacité à « obtenir des résultats dans l'intérêt de l'Inde et du peuple indien ». De son côté, Modi a dit « attendre avec impatience » l'entretien officiel avec son « ami » Vladimir Poutine, afin de « renforcer les liens d'amitié entre l'Inde et la Russie ».

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Washington exhorte Modi à évoquer l'Ukraine

Le Kremlin avait indiqué plus tôt dans la journée que les discussions porteraient sur le « développement des relations russo-indiennes » et « l'agenda international ». Ce qui semble avoir été le cas : le Premier ministre indien a confirmé dans l'après-midi avoir pris avec Vladimir Poutine « des décisions importantes pour renforcer la coopération » bilatérale dans « le commerce, la sécurité, l'agriculture, la technologie », qualifiant l'échange de « fructueux ».

Les deux dirigeants ont par ailleurs eu une discussion « constructive » au sujet de l'Ukraine, selon le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, sans plus de détails. Les États-Unis avaient préalablement exhorté Modi à insister sur la « souveraineté » et « l'intégrité territoriale » de l'Ukraine lors de cette visite.

Mais la Russie est un fournisseur clé d'armes et de pétrole bon marché à l'Inde, même si sa confrontation avec les Occidentaux et son rapprochement avec la Chine, dans le contexte du conflit en Ukraine, ont eu un impact sur leurs relations. En parallèle, les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux ont cultivé ces dernières années leurs liens avec l'Inde, pour contrer l'influence grandissante de la Chine dans la région Asie-Pacifique, tout en faisant pression sur elle pour qu'elle s'éloigne de Moscou.

L'Inde ne prend pas parti dans le conflit mais prône « la paix »

Reste que l'Inde a refusé de prendre clairement parti en ne condamnant pas explicitement l'attaque russe contre l'Ukraine depuis février 2022 et en s'abstenant de voter les résolutions de l'ONU contre Moscou. Membre des BRICS aux côtés de la Russie et de la Chine, l'Inde est partisane d'un monde multipolaire et continue parallèlement à développer ses relations dans le domaine de la sécurité avec les Etats-Unis.

Néanmoins, ce mardi, le Premier ministre indien, Narendra Modi, a dit au président russe Vladimir Poutine que « la paix est de la plus haute importance » et que « la guerre ne peut résoudre les problèmes ».

 « En tant qu'ami, j'ai également dit que pour un avenir meilleur pour la prochaine génération, la paix est de la plus haute importance », a déclaré M. Modi, s'exprimant en hindi, assis au côté de Vladimir Poutine.

« Lorsque des enfants innocents sont assassinés, on les voit mourir, le cœur souffre et cette douleur est insupportable », a-t-il aussi déclaré. « En tant que véritables amis, nous étions ensemble et nous avons parlé d'un éventail de questions, a-t-il ajouté. Et j'étais content que sur l'Ukraine, nous puissions tous deux exprimer nos opinions ouvertement et en détails. »

Pour le Premier ministre indien, « la guerre ne peut pas résoudre les problèmes, les solutions et les pourparlers de paix ne peuvent pas aboutir parmi les bombes, les armes et les balles ». C'est pourquoi le dirigeant a prôné, depuis la Russie, « un chemin vers la paix par le dialogue ».

La précédente visite en Russie de Narendra Modi, qui a obtenu, en juin, un troisième mandat à la tête du pays le plus peuplé du monde, remonte à 2019. Deux ans plus tard, fin 2021, il avait accueilli Vladimir Poutine à New Delhi. Les deux dirigeants se sont rencontrés officiellement pour la dernière fois en septembre 2022, en Ouzbékistan, lors d'un sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai, autre organisation rassemblant la Russie et la Chine.

Achat de pétrole russe à bas prix

Si les ventes d'armes russes à destination de l'Inde ont sensiblement baissé ces deux dernières années, l'Inde achète depuis le début de l'offensive russe en Ukraine d'importantes quantités de pétrole russe vendues au rabais.

Des sujets de frictions demeurent toutefois entre les deux pays. L'Inde voit notamment d'un mauvais œil le fort rapprochement en cours entre son grand rival chinois et Moscou. Elle a déploré également que des citoyens indiens ont été recrutés au sein de l'armée russe pour combattre en Ukraine. Après Moscou, Narendra Modi doit se rendre à Vienne, pour la première visite d'un dirigeant indien dans la capitale autrichienne depuis 1983.

Zelensky juge sévèrement le déplacement de Modi en Russie

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a jugé, ce mardi, le déplacement du Premier ministre indien, Narendra Modi, en Russie pour renforcer les liens avec Moscou « dévastateur » pour la paix en Ukraine.

« C'est une énorme déception et un coup dévastateur pour les efforts de paix que de voir le dirigeant de la plus grande démocratie du monde étreindre le criminel le plus sanguinaire du monde à Moscou », a dénoncé Volodymyr Zelensky sur les réseaux sociaux, quelques heures après une frappe russe particulièrement meurtrière sur les villes ukrainiennes.

Un bilan économique en demi-teinte pour Modi

Le parti nationaliste hindou du Premier ministre, Narendra Modi, a remporté avec une confortable avance les élections législatives le 4 juin. C'est un troisième mandat qui s'est ouvert pour l'homme fort de l'Inde dont le bilan économique est jusqu'ici contrasté. D'un point de vue macroéconomique, l'Inde n'a pas à rougir. Sa croissance annuelle atteint 8,2% sur son exercice budgétaire 2023-2024, contre 7% l'année d'avant. Le pays contribue pour 16% à la croissance mondiale en 2023, selon le FMI, et pour 2024, l'institution parie même sur une croissance de 6,8%, soit l'une des plus élevées dans le monde.

Mais si l'Inde affiche un PIB élevé, rapporté à son nombre d'habitants (3,730 milliards de dollars, selon les dernières estimations) la réalité est tout autre. Son PIB par habitant est ainsi de 2.410,9 dollars en 2022, d'après les chiffres de la Banque mondiale, soit le plus faible des pays du G20. Concernant son indice de développement humain, l'Inde se classait au 134e rang mondial en 2022.

« Les programmes sociaux mis en place ont pu faire reculer l'extrême pauvreté, mais n'ont pas permis l'émergence d'une vraie classe moyenne en mesure de consommer davantage », rappelle Catherine Bros, professeure d'économie et spécialiste de l'Inde à l'Université de Tours et chercheuse au laboratoire d'Économie d'Orléans (LÉO).

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 09/07/2024 à 13:53
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A). Concernant le titre, pas l'offensive, mais plutôt l'invasion. B). Pour le reste, l'Inde achète le pétrole russe avec des réductions importantes, en plus ce n'est pas en dollars/euros, mais en roupies. Mais le bilan commercial est très déséquilibr...

à écrit le 09/07/2024 à 11:49
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il vient renforcer les liens, c'est a dire voir ce qu'il peut avoir pour pas trop cher...

le 09/07/2024 à 12:14
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C'est quand même mieux que les américains : a) qui financent la guerre en UKRAINE, en nous faisant payer plein pot le gaz naturel. b) qui ont des agences de notation qui voient très bien la dette des autres pays, mais pas du tout la dette des USA....

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