![Cette crise diplomatique inédite entre les deux pays s'est emballée suite aux propos tenus dimanche à Madrid par Javier Milei, qui s'en est pris à l'épouse du Premier ministre espagnol sans toutefois la nommer.](https://static.latribune.fr/full_width/2376888/le-premier-ministre-espagnol-pedro-sanchez.jpg)
Il n'y a plus d'ambassadrice espagnole en Argentine. Rappelée dimanche en Espagne pour consultation, elle ne retournera finalement pas à Buenos Aires. L'annonce a été faite ce mardi par le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, à l'issue du Conseil des ministres. « L'ambassadrice restera définitivement à Madrid. L'Argentine n'aura plus d'ambassadeur » espagnol, a-t-il ajouté.
« C'est un fait sans précédent de voir un chef d'État venir dans la capitale d'un autre pays pour insulter ses institutions et pour commettre une ingérence claire dans ses affaires internes », a poursuivi José Manuel Albares, dénonçant un fait « unique dans l'histoire des relations internationales ».
La réaction du président argentin, Javier Milei, ne s'est pas fait attendre. Sur la chaîne argentine LN+, il a qualifié l'annonce du gouvernement de Pedro Sánchez de décision « absurde d'un socialiste arrogant ». « Une erreur » qui « ternit l'image internationale de l'Espagne », a-t-il insisté, en assurant qu'il ne retirerait pas en réponse l'ambassadeur argentin en Espagne. « On maintient tout comme jusqu'à présent », a-t-il précisé.
L'annonce du retrait de l'ambassadrice à Buenos Aires a suscité aussi les critiques de l'opposition de droite espagnole. Elle a accusé le Premier ministre espagnol de « surjouer » et de se victimiser à des fins électoralistes, à l'approche d'élections européennes pour lesquelles l'extrême droite a le vent en poupe dans les sondages. « Les intérêts électoraux de Sánchez ne sont pas plus importants que ceux de l'Espagne et de l'Argentine », a dénoncé sur le réseau social X le chef du Parti Populaire (PP), Alberto Núñez Feijóo.
Les raisons de la colère
Cette crise diplomatique inédite entre les deux pays s'est emballée suite aux propos tenus dimanche à Madrid par Javier Milei. Le président argentin terminait alors une visite de trois jours en Espagne, où il n'a d'ailleurs rencontré ni le roi Felipe VI, ni Pedro Sánchez. Lors d'une convention du parti d'extrême droite espagnol Vox, dont il était invité d'honneur, il a attaqué le socialisme, mais s'en est aussi pris à l'épouse du Premier ministre espagnol, Begoña Sánchez, sans toutefois la nommer.
« Quand vous avez une femme corrompue, vous vous salissez et vous prenez cinq jours pour y réfléchir », a déclaré le président argentin, coutumier des phrases chocs.
Des propos perçus comme une allusion claire à la récente décision du Premier ministre espagnol de suspendre toutes ses activités durant cinq jours pour réfléchir à une démission, après l'ouverture d'une enquête préliminaire pour « trafic d'influence » et « corruption » contre son épouse.
De premières tensions entre Madrid et Buenos Aires avaient déjà éclaté il y a deux semaines après des déclarations du ministre espagnol des Transports, Oscar Puente, qui avait suggéré que Javier Milei se droguait. La présidence argentine avait alors réagi en accusant Pedro Sánchez de n'apporter que « pauvreté et mort » en Espagne avec ses politiques. Cette passe d'armes avait finalement été considérée comme « terminée » par la présidence argentine et par Oscar Puente lui-même, qui avait admis avoir fait une « erreur » et n'avoir pas eu conscience des répercussions de ses déclarations. Force est de constater que la rancune est tenace coté argentin.
Nouvelle provocation
Provocateur jusqu'au bout, Javier Milei a poursuivi son escalade verbale contre Pedro Sánchez à son retour à Buenos Aires. Le président argentin a qualifié ce lundi le Premier ministre espagnol de « lâche » et a refusé de s'excuser, comme le lui demande le gouvernement espagnol. « Je ne vais en aucun cas m'excuser auprès de lui », a ajouté le président argentin, assurant que des représentants du gouvernement espagnol l'avaient qualifié de « xénophobe, raciste, d'ultra-droite (...) de négationniste de la science, de misogyne ». Il a, en prime, ironisé sur un « complexe d'infériorité » de Pedro Sánchez vis-à-vis de lui, lui conseillant « un psychologue » et « un bon avocat pour sa femme ».
Javier Milei en a rajouté une couche ce mardi, sur le réseau social X à propos de son prochain voyage en Espagne, prévu fin juin, pour recevoir le prix d'un think-tank libéral, l'Instituto Juan de Mariana.
« On va voir jusqu'où il a le totalitarisme dans le sang (...) si son complexe d'infériorité lui fait tolérer que les libéraux espagnols me récompensent en personne », a-t-il écrit à propos de Pedro Sánchez.
En arrière-plan, la cheffe de la diplomatie argentine Diana Mondino s'est efforcée ce mardi de faire baisser le volume. Elle a qualifié la tension « d'anecdote » et affirmé que « la relation personnelle qu'il peut y avoir ou pas entre des dirigeants ne peut ni doit affecter la relation bilatérale ». Sans être pour le moment écoutée.
(Avec AFP)