Guerre en Ukraine : le patron de l'OTAN veut permettre à Kiev d'utiliser les armes occidentales sur le territoire russe

Par latribune.fr  |   |  756  mots
Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg. (Crédits : Johanna Geron)
L'Ukraine a les mains liées en raison des restrictions sur l'usage des armes fournies par ses alliés occidentaux sur le territoire russe, a déploré ce lundi à Sofia le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg. Ces propos ont suscité un tollé à Rome, qui aide militairement l'Ukraine, mais craint un élargissement du conflit.

L'Otan veut aider davantage l'Ukraine. Et ce, en levant certaines restrictions sur l'usage des armes qui lui sont fournies par les alliés occidentaux. C'est du moins ce qu'a demandé Jens Stoltenberg ce lundi. « Cela lie les mains dans le dos des Ukrainiens et rend très difficile pour eux d'assurer leur défense », a ainsi estimé le secrétaire général de l'OTAN à l'ouverture d'une réunion de l'organisation dans la capitale bulgare.

Des propos qui font écho aux demandes répétées de Kiev qui réclame de pouvoir frapper avec les armements occidentaux les bases arrières et positions situées sur le territoire russe, ce qu'Européens et Américains interdisent de crainte de provoquer une aggravation du conflit. En effet, plusieurs pays ont restreint l'usage des armes qu'ils fournissent à l'Ukraine à son seul territoire, Crimée et Donbass compris, interdisant des frappes sur le sol russe.

« Je pense qu'il est temps de reconsidérer certaines de ces restrictions », a souligné plus tard devant la presse Jens Stoltenberg, en marge d'une réunion de l'assemblée parlementaire de l'Alliance atlantique. Kiev « a le droit de se défendre » et a donc « le droit de frapper des objectifs militaires légitimes en dehors de l'Ukraine », a-t-il insisté.

Samedi déjà, Jens Stoltenberg avait déjà déclaré, dans une interview télévisée à l'hebdomadaire The Economist, que « le moment est venu pour les alliés d'évaluer la possibilité d'éliminer certaines restrictions sur l'utilisation des armes qu'ils ont fournies à l'Ukraine ».

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« Plus particulièrement maintenant, alors qu'il y a d'importants combats à Kharkiv », deuxième ville du pays visée régulièrement par les forces de Moscou, « nier à l'Ukraine la possibilité d'utiliser ces armes contre des cibles militaires légitimes situées en territoire russe, rend pour eux beaucoup plus difficile la possibilité de se défendre ».

Les États-Unis réticents à la levée des restrictions

Mais, a-t-il souligné lundi, cette décision appartient aux Alliés. Certains d'entre eux n'ont pas imposé de restrictions, mais d'autres l'ont fait, a-t-il ajouté, sans plus de détails.

Les Etats-Unis, principal fournisseur d'aide militaire à l'Ukraine, et d'autres pays européens comme l'Allemagne se sont montrés très réticents à fournir des armes sans aucune restriction. Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a néanmoins récemment estimé, lors d'un déplacement à Kiev le 15 mai, que cette décision revenait à l'Ukraine. « Nous n'avons pas encouragé ou favorisé les frappes hors d'Ukraine, mais au final c'est à l'Ukraine de prendre ses décisions sur la manière dont elle mène cette guerre », a-t-il dit, alors que la Russie met régulièrement en garde les Occidentaux contre toute attaque sur son territoire à l'aide d'armes occidentales.

Le Kremlin a, d'ailleurs, dénoncé dès jeudi, avant même l'interview de Jens Stoltenberg à The Economist, les appels d'élus américains à autoriser l'Ukraine à utiliser les armes fournies par Washington pour frapper le territoire russe, y voyant une « escalade ».

« A Washington et dans plusieurs capitales européennes, certains essayent avec zèle de provoquer, de hausser sans cesse le niveau d'escalade. À cet égard, on peut qualifier leur position d'irresponsable », a ainsi estimé le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Tollé en Italie

En Italie, qui aide militairement l'Ukraine, mais craint un élargissement du conflit, on s'inquiète, en effet, des conséquences d'une levée de ces restrictions. Giorgia Meloni a réitéré dimanche l'opposition de Rome à l'utilisation des armes fournies à l'Ukraine contre des cibles situées sur le territoire russe. « Je ne sais pas pourquoi M. Stoltenberg a dit une chose pareille, je pense qu'il faut être très prudent. Je suis d'accord que l'Otan doit rester ferme, ne pas donner le signal qu'elle cède », a dit la Première ministre lors d'une émission télévisée.

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De même, Matteo Salvini, vice-Premier ministre et chef de la Ligue anti-migrants, a vivement réagi aux déclarations de M. Stoltenberg : « Ce monsieur, soit il demande pardon, soit il rectifie ses propos, soit il démissionne », a-t-il lancé lors d'une manifestation électorale à Naples.

L'autre vice-Premier ministre et chef de la diplomatie, Antonio Tajani, avait dès samedi rappelé que « les instruments militaires envoyés par l'Italie » doivent « être utilisés à l'intérieur de l'Ukraine » et non contre le territoire russe.

(Avec AFP)