Face cachée de la Lune : la sonde chinoise a prélevé des échantillons, un « exploit sans précédent »

Par latribune.fr  |   |  923  mots
La face cachée de la Lune est appelée ainsi parce qu'elle est invisible depuis la Terre et non parce qu'elle ne capte jamais les rayons du soleil (photo d'illustration). (Crédits : Henry Romero)
Le module d'ascension de la sonde chinoise Chang'e-6 a décollé avec succès de la surface lunaire ce mardi et a emporté des échantillons de la face cachée, a annoncé l'administration spatiale chinoise. Une première mondiale et surtout un d'espoir pour la recherche puisque ces fragments pourraient permettre d'en savoir plus sur la formation et l'histoire du satellite naturel de la Terre et de mieux comprendre « l'origine du système solaire ».

Nouveau succès pour les ambitions spatiales de la Chine. Lancée le 3 mai pour collecter des échantillons sur la face cachée de la Lune, la sonde Chang'e-6 a réussi sa mission. Son module d'ascension a décollé de la surface lunaire ce mardi 4 juin au matin en emportant des prélèvements de cette région du satellite de la Terre rarement exploré, selon l'agence officielle Chine nouvelle, citant l'administration spatiale chinoise (CNSA). Après son décollage, le module « est entré dans une orbite prédéfinie autour de la Lune », a précisé l'institution.

Il s'agit d' « un exploit sans précédent dans l'histoire de l'exploration humaine de la Lune », a souligné l'administration spatiale. « La mission a résisté à l'épreuve des températures élevées sur la face cachée de la Lune », a-t-elle ajouté.

Chang'e-6 a aluni dimanche sur la face cachée, dans l'immense bassin Pôle Sud-Aitken, l'un des plus grands cratères d'impact connus du système solaire, selon l'administration spatiale. Pour récupérer des prélèvements sous la surface, la sonde a disposé d'une foreuse. Un bras robotique lui a ensuite permis d'attraper de la matière directement sur la surface. Après avoir réussi à recueillir des échantillons, « un drapeau chinois emporté par l'atterrisseur a été déployé pour la première fois sur la face cachée de la Lune », a rapporté Chine nouvelle.

La mission de la sonde, d'une durée de 53 jours, n'est toutefois pas encore finie, bien que l'agence spatiale chinoise n'ait pas donné d'informations sur la suite. Selon des sites spécialisés, les échantillons devraient rester quelques semaines en orbite lunaire avant d'entamer leur retour sur Terre autour du 25 juin.

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Des échantillons prometteurs pour la recherche

Les scientifiques estiment que la face cachée de la Lune - appelée ainsi parce qu'elle est invisible depuis la Terre et non parce qu'elle ne capte jamais les rayons du soleil - est très prometteuse pour la recherche, car ses cratères sont moins recouverts par d'anciennes coulées de lave que ceux de la face visible.

Les échantillons prélevés sur la face cachée pourraient permettre d'en savoir davantage sur la formation et l'histoire du satellite naturel de la Terre. Ils permettront également de mieux comprendre « l'origine du système solaire » et de mieux préparer de futures explorations, a souligné un porte-parole de la mission Chang'e-6, Ge Ping, cité par l'agence Chine nouvelle.

« Les échantillons collectés par Chang'e-6 auront un âge géologique d'environ quatre milliards d'années », a estimé début mai Ge Ping, vice-directeur du Centre chinois d'exploration lunaire et d'ingénierie spatiale. « La collecte d'échantillons lunaires provenant de différentes régions et de différents âges géologiques et la réalisation d'expériences sont d'une grande valeur et d'une grande importance pour l'humanité », a-t-il ajouté.

Chang'e-6 est la première des trois missions sans équipage envoyée sur la Lune prévues par la Chine pour cette décennie. Elle sera suivie de Chang'e-7, qui explorera le pôle sud lunaire à la recherche d'eau, puis de Chang'e-8, qui tentera d'établir la faisabilité technique de la construction d'une base sur le satellite naturel de la Terre, un projet que nourrit la Chine.

Les grandes ambitions chinoises...

La Chine porte en effet un ambitieux programme spatial, qui vise, outre la construction d'une base lunaire d'ici 2030, à envoyer une mission habitée sur la Lune au même horizon. Et cette annonce de la mission réussie pour la sonde Chang'e-6 marque une nouvelle étape dans ce plan.

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La Chine a considérablement développé ses programmes spatiaux sous la présidence de Xi Jinping, injectant des milliards de dollars dans ce secteur afin de rattraper les leaders américain et russe. Elle a d'ailleurs déjà enregistré plusieurs succès, notamment la construction de la station spatiale Tiangong (« Palais céleste ») où a été envoyé en avril un nouvel équipage de trois astronautes. Parmi ses autres principaux faits d'armes, le pays a réussi à poser sans encombre un engin sur la face cachée de la Lune en 2019 - une première mondiale - sans rapporter d'échantillons. Chose faite en 2023, mais provenant de la face visible de l'astre, ce qui constituait toutefois une première pour un pays depuis plus de 40 ans.

La Chine a également fait atterrir un astromobile (un petit « rover » motorisé) sur Mars. Elle est aussi le troisième pays au monde à avoir envoyé un humain dans l'espace par ses propres moyens.

... dans le viseur américain

L'avancée rapide du programme spatial chinois suscite en tout cas l'inquiétude des États-Unis. En avril, Bill Nelson, le patron de la Nasa, a affirmé que son pays se trouvait engagé dans une « course » avec la Chine sur le plan spatial.

« Nous pensons qu'une grande partie de ce qu'ils appellent leur programme spatial civil est en fait un programme militaire », a-t-il déclaré.

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En plus de cacher des objectifs militaires, les États-Unis accusent le programme spatial chinois de vouloir assurer une domination de Pékin dans l'espace.

Côté américain, le retour d'astronautes sur la lune est prévu pour 2026, avec sa mission Artémis 3, mais le calendrier pourrait encore subir des retards.

(Avec AFP)