Les organisations syndicales devraient sortir galvanisées de ce samedi de mobilisation. Le 10 janvier dernier, la Première ministre Elisabeth Borne présentait la réforme décriée des retraites accompagnée d'un aéropage de ministres dans les locaux de l'avenue de Ségur à Paris en espérant convaincre les Français que cette réforme était « juste » et « équilibrée. » Un mois jour pour jour après cette présentation, la contestation ne s'est pas essoufflée.
« Une mobilisation exceptionnelle ce samedi dans toute la France : des familles, des jeunes, des travailleurs, des retraités sont venus dire non au report de l'âge », a déclaré sur Twitter la secrétaire générale adjointe de la CFDT, Marylise Léon.
« On a eu une très forte mobilisation ce samedi notamment dans les villes de province. Il y a eu énormément des salariés du privé et des familles qui n'étaient pas venus manifester en semaine. Il a fallu ajouter des parcours à Paris, » a expliqué Cyril Chabanier, président de la CFTC (Confédération française des travailleurs chrétiens) interrogé par La Tribune à l'issue de cette journée. Il estime que les syndicats sont sortis « renforcés » par ces manifestations du samedi. « J'ait été surpris par tous les applaudissements ». Il s'attend « à des écarts importants avec les chiffres de la préfecture en raison des rues annexes qui étaient bondées » et rendent difficiles les comptages des syndicats et des autorités. Les manifestations ont rassemblé 963.000 personnes en France, dont 93.000 à Paris, selon le ministère de l'Intérieur. La CGT a recensé de son côté 500.000 personnes dans le cortège parisien, et « plus de 2,5 millions » au niveau national.
Sursaut dans les villes moyennes
Depuis le premier mouvement de mobilisation en janvier, les défilés se multiplient dans les villes moyennes. L'exécutif scrute de très près ces mouvements. Surtout, les manifestants étaient plus nombreux ce samedi que lors des rassemblements en milieu de semaine mais moins que les deux premières journées selon les premiers chiffres des autorités, qui divergent de plus en plus de ceux des syndicats. « Les mouvements ont été importants dans les villes de sous-préfecture », a souligné Cyril Chabanier.
Le sursaut est visible dans les villes moyennes, comme à Roanne (Loire) où la police a compté 6.000 manifestants, contre 3.000 mardi. Même tendance à Périgueux, où 5.200 personnes ont défilé contre 3.700 quatre jours plus tôt. Ou encore à Guéret, avec 4.000 participants contre 2.900 en début de semaine.
Les syndicats prêts à durcir le mouvement...à partir du 7 mars
Avant le départ du défilé parisien, les syndicats réunis en conférence de presse ont assuré qu'ils ne renonceraient pas à aller au bras de fer avec l'exécutif. Ils ont indiqué qu'ils étaient « prêts à mettre le pays à l'arrêt dans tous les secteurs le 7 mars prochain » si le gouvernement et le Parlement restent sourds aux contestations. « On sera au moment le plus opportun. C'est dur de manifester toutes les semaines. Cela va permettre de repartir avec des salariés gonflés à bloc, » juge Cyril Chabanier.
Cette annonce d'un durcissement le 7 mars, « ça laisse un peu de temps s'ils veulent réagir, » a déclaré le numéro un de la CFDT, Laurent Berger, ajoutant qu' « on n'est pas dans la logique de grève reconductible ».
Son homologue de la CGT Philippe Martinez a souligné que « la balle (était) dans le camp » de l'exécutif. L'intersyndicale à la RATP a d'ores et déjà appelé samedi à la première grève reconductible du mouvement, à partir du 7 mars. Ce calendrier pourrait être jugé particulièrement tardif pour les opposants à la réforme.
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Les représentants des principaux syndicats français réunis avant les manifestations de ce 11 février à Paris. Crédits : Reuters.
Nouvelle journée de mobilisation prévue le 16 février
En attendant un possible durcissement du mouvement début mars, l'intersyndicale a appelé à une nouvelle journée d'action interprofessionnelle le 16 février prochain. Les différentes centrales ont prévu de se réunir le soir même pour élaborer une stratégie de mobilisation.
Les directions des syndicats ont notamment prévu d'écrire une lettre à chaque parlementaire « pour réaffirmer notre opposition et celle de la population. Parallèlement, nous appellerons nos structures locales à interpeller députés et sénateurs dans leurs circonscriptions. »
La bataille parlementaire reprend lundi
Après une semaine chaotique à l'Assemblée, les débats vont reprendre ce lundi au Palais Bourbon. Les députés de la majorité ont déjà voté l'article visant à supprimer les régimes spéciaux en fin de semaine dernière. En face, l'opposition devrait encore monter au front dans l'hémicycle et lors des points presse organisés mardi et mercredi. Dans un climat électrique, le gouvernement espère avancer ses pions alors que la mobilisation sociale est très loin de retomber. Les prochaines semaines promettent d'être particulièrement décisives sur le plan politique.
En effet, le gouvernement a fait des concessions à la droite LR sur les carrières longues ou l'âge légal de départ à 64 ans au lieu de 65 ans. Mais l'exécutif est loin d'être assuré d'avoir la majorité pour faire passer son texte. Le recours à l'article 47-1 ou 49-3 ferait alors l'effet d'une bombe sur une réforme aussi contestée.