Procès Lagarde : le parquet demande la relaxe de l'ex-ministre

Par latribune.fr  |   |  665  mots
Christine Lagarde risque jusqu'à un an de prison et 15.000 euros d'amende
Lors de l'instruction, le parquet avait requis un non-lieu. Les derniers témoins sont entendus ce jeudi.

Article publié à 16h, mis à jour à 19h30

Christine Lagarde est depuis lundi devant la Cour de justice de la République (CJR). L'ancienne ministre de l'Economie de Nicolas Sarkozy est accusée de "négligence" dans l'affaire de l'arbitrage frauduleux de Bernard Tapie. Elle risque jusqu'à un an de prison et 15.000 euros d'amende. Mais ce jeudi après-midi, le procureur général Jean-Claude Marin a estimé que "les charges propres à fonder une condamnation pénale" n'étaient "pas réunies". "Les audiences n'ont pas conforté une accusation bien faible voire incantatoire", a estimé le représentant du ministère public, qui a donc demandé la relaxe.

Lors de l'instruction, le parquet avait requis un non-lieu, ce qui signifie qu'il n'était pas favorable à la tenue du procès. De plus, les deux magistrats qui mènent le réquisitoire, Jean-Claude Marin, procureur général de la Cour de cassation, et Philippe Lagauche, avocat général, n'ont guère malmené Christine Lagarde durant les audiences. Le jugement devrait être rendu lundi.

A la barre, l'ex-ministre a dit s'être en grande partie reposée sur ses collaborateurs à Bercy pour autoriser en 2007 un arbitrage dans un vieux contentieux entre Bernard Tapie et l'ancienne banque publique Crédit Lyonnais. Mais l'actuelle directrice du FMI a eu plus de mal à expliquer pourquoi elle n'a pas tenté de recours lorsqu'est tombée en juillet 2008 la sentence, très coûteuse pour les contribuables - 400 millions d'euros -  et désastreuse en termes politiques.

Richard contre Bézard

Le procès a également vu s'affronter - par déclarations interposées - Stéphane Richard, actuel patron d'Orange et ex-directeur de cabinet de la ministre, et Bruno Bézard, un ancien haut fonctionnaire et directeur de l'Agence des participations de l'Etat (APE). Ce dernier reproche à Stéphane Richard, mis en examen dans ce dossier, d'avoir voulu "quoiqu'il arrive aboutir à un arbitrage" en raison de sa "compréhension assez poussée des intérêts de M. Tapie".

Des propos "diffamatoires" aux yeux de l'avocat de Stéphane Richard, Me Jean-Etienne Giamarchi. "Il laisse clairement entendre que Stéphane Richard aurait délibérément privilégié les intérêts de Bernard Tapie au détriment de ceux de l'Etat", explique-t-il."Nous considérons que les accusations de M. Bézard sont nouvelles, inacceptables et diffamatoires. Nous allons donc demander une confrontation" aux juges chargés de l'information judiciaire.

Le visiteur du Palais

Les juges de la CJR se sont également penchés sur les visites de Bernard Tapie à l'Elysée, en 2007 et 2008, au moment où se nouait l'arbitrage. Face à la présidente Martine Ract Madoux, l'ancien secrétaire général adjoint de l'Elysée, François Pérol (actuel président du groupe BPCE), a assuré ne pas se rappeler de sa rencontre au sommet avec l'homme d'affaires au palais présidentiel.

Or, selon les magistrats instructeurs, cette rencontre, ainsi qu'une autre réunion à laquelle François Pérol aurait assisté, ont été décisives pour décider en 2007 un arbitrage dans le contentieux entre l'homme d'affaires et l'ancienne banque publique Crédit Lyonnais, puis pour valider en 2008 une sentence attribuant à Bernard Tapie plus de 400 millions d'euros.

Selon les archives officielles, François Pérol a reçu Bernard Tapie six ou sept fois en tout. Lui se souvient de "trois" rencontres: "Les registres de l'Elysée sont d'une fiabilité toute relative." assure-t-il.

"Il (Bernard Tapie) venait me voir pour me parler de son dossier, explique François Pérol.

- Mais à quoi ça sert puisque vous ne décidez rien? demande la présidente

- Ca sert à m'en débarrasser", assure François Pérol qui "préfère le voir vingt minutes", plutôt que de risquer que cet homme "extraordinairement entreprenant" et "assez accrocheur" fasse "le siège" de son bureau. Et d'assurer que dans toute affaire de ce genre, "la responsabilité appartient à celui ou celle qui signe". En l'occurrence Christine Lagarde.

 (avec AFP)