Nouvelle-Calédonie  : la vie reprend doucement son cours, l'économie du nickel à genoux

En Nouvelle-Calédonie, particulièrement dans l'agglomération de Nouméa, la vie reprend doucement son cours après une période inédite de violences qui a entraîné la mort de sept personnes. L'archipel va maintenant devoir panser ses plaies et composer avec un secteur du nickel qui ne pourrait pas se remettre après avoir été à l'arrêt depuis le 13 mai.
Depuis le début de la crise en Nouvelle-Calédonie, usines métallurgiques et centres miniers tournent au ralenti, voire plus du tout.
Depuis le début de la crise en Nouvelle-Calédonie, usines métallurgiques et centres miniers tournent au ralenti, voire plus du tout. (Crédits : CC 2/00)

La Nouvelle-Calédonie peine à panser ses blessures après la plus grave crise que l'archipel a connu depuis les années 1980. Si l'état d'urgence a été levé mardi, le Haut-Commissariat a souligné dans son communiqué de mercredi que « les mesures d'interdiction de rassemblements, de vente et de transport d'armes et de vente d'alcool ainsi que le couvre-feu de 18H00 à 06H00 du matin sont maintenus sur l'ensemble du territoire ».

A Païta nord, dans l'agglomération de Nouméa, ils sont plus de 200 militaires chargés de déblayer la route tout en s'assurant qu'aucun barrage n'y sera réintroduit la nuit. L'objectif est que cet axe, qui permet de relier la capitale au nord de la Grande Terre, « soit libéré d'ici la fin de la semaine », affirme à l'AFP, Stéphane P., commandant du groupe tactique du Mont-Dore. Le centre-ville de Païta est ravagé et de nombreux commerces ont brûlé. Sur les murs, des tags insultants visant Sonia Backès, la cheffe de file des loyalistes, ou dénonçant la « justice coloniale » sont légion. Les locaux de l'Institut agronomique néo-calédonien, l'équivalent local du Cirad, ont pour leur part été saccagés.

Une catastrophe pour l'industrie du nickel

Les habitants du Grand Nouméa attendent par ailleurs avec impatience le retour de collecte des ordures ménagères qui a été interrompue le 13 mai, les images de déchets débordant dans la rue ou de dépotoirs sauvages ont fait le tour des réseaux sociaux, faisant aussi naître des interrogations sanitaires.

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Au-delà de la reprise des services quotidiens, c'est toute l'économie de la Nouvelle-Calédonie qui est à genoux. Ainsi, depuis le début de la crise dans l'archipel, usines métallurgiques et centres miniers tournent au ralenti, voire plus du tout. Un coup dur de plus aux conséquences catastrophiques pour une industrie du nickel déjà en grande difficulté. La SLN, société historique de l'exploitation du nickel en Nouvelle-Calédonie lancée à la fin du 19e siècle, a été la cible de plusieurs intrusions et de destructions sur ses sites de Thio et Kouaoua, sur la côte Est de la Grande-Terre. Un coup dur pour l'entreprise, déjà en difficulté: en février, la filiale du géant minier Eramet a obtenu un prêt de l'Etat de 60 millions d'euros pour lui éviter la cessation de paiements.

Dans le sud de la Nouvelle-Calédonie, l'usine Prony Resources, à la recherche d'un repreneur, a elle aussi dû le maintien de son activité à un prêt de l'Etat de 140 millions d'euros en mars, qui assure sa survie jusqu'en mars 2025. Or le site est totalement à l'arrêt depuis le début des émeutes, a confirmé l'entreprise à l'AFP.

L'usine Koniambo Nickel (KNS) enfin, dans le nord de l'île, est en sommeil depuis février à la suite de la décision du groupe anglo-helvétique Glencore, actionnaire à 49%, qui souhaite vendre ses parts après avoir accumulé les pertes. Reste le secteur de l'extraction, le nickel en Nouvelle-Calédonie étant divisé entre les trois usines métallurgiques et les mines parfois aux mains de petits exploitants. Menacées de fermeture, les trois usines métallurgiques sont suspendues aux discussions sur le « pacte nickel » proposé par Bruno Le Maire et qui est censé sauver le secteur, moyennant un important apport financier de l'Etat. Mais les discussions sont au point mort, une partie des indépendantistes étant opposés à l'accord, dont les engagements demandés à la Nouvelle-Calédonie sont jugés trop coûteux.

Deux parlementaires demandent de la transparence de la part du gouvernement

Sur le plan politique, les chefs des députés et sénateurs socialistes, Boris Vallaud et Patrick Kanner, ont adressé mardi un courrier au Premier ministre Gabriel Attal pour que les « conclusions de la mission de médiation » menée par trois hauts fonctionnaires soient « portées à la connaissance des parlementaires » le moment venu. Ils demandent une déclaration du gouvernement et un débat dans les deux chambres au titre de l'article 50-1 de la Constitution.

« Il est inenvisageable que la représentation nationale ne puisse examiner les voies et moyens qui favoriseront la conclusion d'un accord global sur l'avenir politique et institutionnel de la Nouvelle-Calédonie », insistent les deux responsables socialistes.

Emmanuel Macron a donné jusqu'à la fin juin aux élus et responsables politiques de l'archipel, aidés par une « mission de médiation » de trois hauts fonctionnaires, pour trouver « un accord global » qui « puisse être soumis au vote des Calédoniens. » Le détonateur des troubles a été le vote à Paris d'une réforme prévoyant d'élargir le corps électoral des élections provinciales à environ 25.000 personnes établies depuis au moins dix ans en Nouvelle-Calédonie, un casus belli pour les indépendantistes qui demandent le retrait du texte.

L'interdiction du réseau social TikTok a été levée

L'interdiction du réseau social TikTok en Nouvelle-Calédonie a été « levée » ont annoncé mercredi les autorités de l'archipel français du Pacifique sud, après une mesure inédite prise le 15 mai pour limiter notamment les contacts entre émeutiers. Cette interdiction de TikTok avait été permise par la proclamation de l'état d'urgence le 15 mai et la présence d'un unique opérateur télécoms sur le territoire. Le gouvernement a considéré le réseau social, propriété de la société chinoise ByteDance, comme un des vecteurs de communication préférés entre les groupes qui commettaient des violences la nuit.

Cette mesure d'interdiction était également intervenue sur fond de craintes d'ingérences et de désinformation sur les réseaux sociaux venant de pays étrangers qui chercheraient à attiser les tensions, selon des sources gouvernementales et de sécurité, évoquant la Chine ou l'Azerbaïdjan.

Jeudi dernier, le Conseil d'Etat, plus haute juridiction administrative française, avait confirmé le blocage du réseau social en tenant compte du « caractère limité et temporaire de la mesure » de blocage, ainsi que « de l'intérêt public qui s'attache au rétablissement de la sécurité », selon la décision dont l'AFP a eu copie. Il notait également que « les autres réseaux sociaux et médias restent accessibles ».

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 29/05/2024 à 9:19
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Photo: La vache ils ont fait énormément des dégâts les émeutiers hein, je n'ai jamais vu ça !? Ah ces barbares ! :-)

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