![Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse ce mercredi 12 juin.](https://static.latribune.fr/full_width/2389545/conference-de-presse-emmanuel-macron.jpg)
« Non à l'esprit de défaite, oui au réveil du sursaut républicain ! ». Après l'annonce fracassante de la dissolution, Emmanuel Macron est entré officiellement en campagne ce mercredi 12 juin. Passé l'effet de sidération, le chef de l'Etat a fixé un cap aux contours flous devant un parterre important de journalistes et de ministres au pavillon Cambon, dans le premier arrondissement de Paris. « Ce moment est celui de la clarification. C'est un moment historique », a tonné le président de la République.
Pendant près de deux heures, le locataire de l'Elysée a voulu convaincre des bienfaits de sa stratégie de dissolution. Prenant « acte des possibilités de blocage » au Parlement, Emmanuel Macron voulait « apporter une réponse démocratique ». « Cela ne pouvait pas passer par des changements de gouvernement mais la situation imposait une dissolution. C'est un acte de confiance dans la démocratie ». « Je suis convaincu que des sociaux-démocrates, des radicaux, des démocrates-chrétiens et des écologistes peuvent travailler avec la majorité pour gouverner au service des Français », a-t-il clamé.
Présents en nombre, les membres du gouvernement et des poids lourds de la majorité comme François Bayrou étaient venus assister au discours du président. Mais derrière cette mobilisation, la stupéfaction est toujours dans la tête de certains ministres. A Matignon, le Premier ministre Gabriel Attal a tenté de remobiliser les parlementaires après cette décision jugée « brutale ». L'entourage du chef du gouvernement a résumé le débat entre « le choix du KO financier et social » et celui « de la stabilité et de la construction ». À moins de trois semaines du scrutin, cette situation politique inédite risque de soulever encore de nombreuses questions chez les élus sortants de la majorité encore abasourdis.
« Plein emploi », « réindustrialisation » et « sérieux budgétaire »
Sur le plan économique, le chef de l'Etat a répété le triptyque « plein emploi », « réindustrialisation » et « sérieux budgétaire ». En plein marasme sur les finances publiques, Emmanuel Macron a tenté de rassurer les milieux dirigeants et financiers. Depuis l'annonce tonitruante de la dissolution et le raz-de-marée de l'extrême droite, le spread, c'est à dire l'écart de taux à 10 ans entre la France et l'Allemagne considéré comme le pays le plus sûr de la zone euro par les investisseurs, a bondi de 60 points de base. Mardi 11 juin, l'écart avait atteint un niveau inédit depuis 2020, dépassant même les pics de 2022 et 2023 au moment du durcissement de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). Les tensions sont certes légèrement retombées mais la volatilité sur les marchés obligataires devrait encore persister dans les semaines à venir compte tenu de l'incertitude politique.
Un programme budgétaire renvoyé aux résultats de l'élection
Le redressement des comptes publics va être d'autant plus périlleux que la Banque de France vient de réviser à la baisse sa prévision de croissance pour 2025 (1,2% contre 1,5% précédemment) en raison des prix de l'énergie plus élevés que prévu. Interrogé en marge de la conférence du chef de l'Etat, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a affirmé « avoir développé une stratégie de rétablissement des finances publiques qui a convaincu les investisseurs, les spread n'ont pas bougé depuis des mois entre l'Allemagne et la France ». Concernant, le programme d'économies à réaliser, Emmanuel Macron est resté également très vague. « La responsabilité budgétaire se fera en fonction de la majorité parlementaire ». Sur le plan fiscal, le quadragénaire a plaidé pour une stabilité dans les trois années à venir.
Pas de désindexation des retraites
L'autre annonce importante est que les retraites ne seront pas désindexées. « Les économies ne se feront pas sur le dos des retraités », a déclaré le chef de l'Etat. « Après une vie de travail, les retraités doivent pouvoir vivre avec quiétude », a-t-il estimé rappelant que le gouvernement avait « déjà beaucoup fait pour les petites retraites ». Le président de la République a dénoncé les programmes du RN et de la France insoumise en matière de retraites. « Leurs propositions pourraient mettre le système en banqueroute. Le COR (Conseil d'orientation des retraites) a déjà annoncé que le système était déficitaire. Les projets d'extrême gauche et d'extrême droite sont des projets d'appauvrissement ». Face aux critiques, Jordan Bardella, désormais député européen, a déjà annoncé que le RN allait faire marche arrière sur sa proposition de passer à la retraite à 60 ans.
Flous sur la réforme de l'assurance-chômage
Concernant l'assurance-chômage, le président a dit vouloir « assumer » la réforme mais il s'est montré ouvert à des modifications. « Je pense que la réforme de l'assurance chômage est bonne mais je ne pense pas que c'est un point intangible ».« Si certains veulent l'améliorer ou la changer, ce sera aux forces de la majorité de construire les modalités ». Accusé par les syndicats d'avoir passé en force cette réforme, le gouvernement a tenté d'esquiver la question en pleine campagne des législatives.
Les syndicats et plusieurs économistes sont montés au front mardi 11 juin lors d'une conférence de presse au Conseil économique social et environnemental (CESE). En mettant fin avec la dissolution aux travaux de l'Assemblée, l'exécutif s'est épargné l'examen le 13 juin au Palais Bourbon d'une proposition de loi contre la réforme de l'assurance chômage qui aurait dû rassembler une bonne part des oppositions. Le chef de l'Etat a laissé entendre que le décret de la réforme serait bien publié le premier juillet prochain pour une mise en route en décembre. Une perspective fustigée par les organisations syndicales.
Le chef du gouvernement et les responsables de la majorité seront chargés de bâtir le programme. « Nous sommes prêts à intégrer les visions qui viendraient nourrir cette cohérence. Il y a un idéal partagé », a déclaré Emmanuel Macron. Il s'agit de bâtir « des consensus et des compromis », a-t-il poursuivi. Une mission particulièrement difficile dans le contexte de la campagne éclair des législatives.Le premier ministre chargé de bâtir un programme