Cabinets de conseil : le Sénat adopte la proposition de loi sans certains amendements défendus par le gouvernement

Le Sénat a adopté à l'unanimité ce mardi, en deuxième lecture, la proposition de loi destinée à encadrer les prestations de conseil commandées par les administrations aux cabinets privés. La Chambre haute a retiré plusieurs amendements ajoutés par l'Assemblée nationale en février en première lecture, sous l'impulsion du gouvernement. La balle sera de nouveau dans les mains des députés pour une deuxième lecture.
La proposition de loi est largement inspirée du rapport d'une commission d'enquête du Sénat, qui avait qualifié le recours de l'État aux cabinets de conseil privés de phénomène « tentaculaire ».
La proposition de loi est largement inspirée du rapport d'une commission d'enquête du Sénat, qui avait qualifié le recours de l'État aux cabinets de conseil privés de phénomène « tentaculaire ». (Crédits : Firas Abdullah/ABACAPRESS)

Nouveau passage dans l'hémicycle pour la proposition de loi (PPL) encadrant les dépenses de conseil des pouvoirs publics, et nouvelles modifications. En deuxième lecture, ce mardi, le Sénat a adopté, à l'unanimité, un texte que les sénateurs ont vidé de plusieurs amendements défendus par le gouvernement. Pour rappel, cette PPL, initiée et adoptée par la chambre haute en octobre 2022 en première lecture, a ensuite été examinée par l'Assemblée nationale plus d'un an après, en février dernier. Les députés l'ont alors remaniée, sous l'impulsion de l'Exécutif.

Parmi les ajouts qui ont suscité le débat : l'intégration des collectivités de plus de 100.000 habitants dans le champ d'application du texte. Cet amendement a été supprimé par les sénateurs ce mardi. « Il existe d'ores et déjà des mécanismes de contrôle au sein des collectivités qui n'existent pas » pour l'État, a justifié la rapporteure du texte, Cécile Cukierman (groupe CRCE-K, à majorité communiste).

Le gouvernement a aussi échoué à imposer les nouvelles obligations aux seules prestations de conseil commandées par les administrations après l'entrée en vigueur de la loi. En l'état actuel du texte, les prestations en cours de réalisation au moment de l'adoption définitive du texte seront également concernées par ces obligations. Pas question non plus pour les sénateurs de laisser le gouvernement préciser par décret la nature des prestations de conseil visées par le texte.

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Des amendements néanmoins conservés

L'exécutif a tout de même enregistré de petites victoires ce mardi, en parvenant à exclure les établissements publics à caractère industriel et commercial (Epic), selon lui davantage exécutants que décisionnaires, du champ d'application du texte.

L'allègement des obligations déclaratives pesant sur les consultants pour prévenir les conflits d'intérêt, soutenu par le gouvernement, a également été maintenu. Conformément à l'écriture retenue en commission, le texte précise désormais que ces démarches ne s'imposent qu'aux consultants « ayant une fonction d'encadrement ou de supervision de la prestation de conseil ».

Un amendement des groupes écologiste et communiste permettant aux syndicats représentatifs de fonctionnaires de saisir la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) s'ils soupçonnent des manquements déontologiques des consultants a enfin été adopté.

Pas de quoi cependant emballer les professionnels du secteur. « La deuxième lecture du Sénat constitue un net recul », a regretté auprès de l'AFP David Mahé, le président de Syntec Conseil qui représente les cabinets, dénonçant des « sanctions disproportionnées » et « l'application de la loi aux contrats en cours ».

La PPL doit désormais être examinée en deuxième lecture à l'Assemblée nationale. Les députés pourraient d'ailleurs réintégrer les collectivités dans le champ du texte, comme ils l'avaient fait en première lecture en février.

Du mieux mais pas encore suffisant

Cette proposition de loi est largement inspirée des conclusions d'une commission d'enquête. Celle-ci avait publié en mars 2022, en pleine campagne présidentielle, un rapport explosif - et embarrassant pour Emmanuel Macron - qualifiant le recours de l'État aux cabinets de conseil privés de phénomène « tentaculaire », dont le coût avait été chiffré à plus d'un milliard d'euros en 2021 pour l'État et ses opérateurs.

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Depuis la publication de ce rapport, le gouvernement a multiplié les contre-feux : circulaires encadrant les dépenses de conseil informatique ou stratégique, recrutements de spécialistes du conseil à la DITP, nouveau cadre plus contraignant pour l'achat de certaines prestations de conseil... Ainsi, en mars dernier, l'Agence de conseil interne de l'֤État a été inaugurée, service qui doit justement permettre à l'administration d'effectuer en interne des missions de conseil autrefois confiées à des cabinets privés.

« Nous ne sommes plus dans la même situation qu'au moment de la commission d'enquête (...) Je pense que nous avons fait l'essentiel du chemin », a reconnu mardi Arnaud Bazin, sénateur Les Républicains, qui avait présidé cette commission. Un avis à moitié partagé par la rapporteure du texte. « On ne peut pas dire qu'il n'y a pas eu de prise en compte » de la part du gouvernement des dérives pointées par la commission d'enquête, a admis Cécile Cukierman la semaine dernière. Mais cette prise en compte n'est pas « suffisante », estime-t-elle.

Reste que la bataille s'annonce rude entre sénateurs et députés, sur les bancs de leur hémicycle respectif. Et le gouvernement n'ayant pas actionné de procédure accélérée pour l'examen de ce texte au Parlement, son adoption définitive pourrait prendre beaucoup de temps si les divergences persistent entre les deux chambres.

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 29/05/2024 à 9:52
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Pourquoi payer des politiciens alors qu'ils payent des cabinets conseils pour faire le taf à leurs places ??? "Du producteur au consommateur... et des intermédiaires à ne plus savoir qu'en faire !" L'Europe. Les fils de ne osnt plus que des futurs pa...

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