![Vu que rien n'a été présenté par le gouvernement, « nous voterons bien entendu notre propre motion de censure, mais aussi celle de la France insoumise », a ainsi indiqué la patronne du RN ce jeudi matin.](https://static.latribune.fr/full_width/2117604/marine-le-pen-lors-d-une-session-du-gouvernement-a-l-assemblee-nationale-a-paris.jpg)
La réponse est claire. En l'absence de projet de loi de finances rectificative, « nous voterons bien entendu » la motion de censure que déposera la France insoumise (LFI) dans les prochains jours pour tenter de faire tomber le gouvernement, a indiqué ce jeudi matin Marine Le Pen, sur franceinfo.
Ce vote est, selon la patronne du RN est la résultante de cette séquence : les groupes Rassemblement national et LFI à l'Assemblée nationale avaient en effet demandé à l'exécutif qu'un projet de loi dédié au budget rectificatif soit soumis au Parlement avant la fin mai. Ce qui n'a pas été le cas.
Vote de sa propre motion de censure
Vu que rien n'a été présenté par le gouvernement, « nous voterons bien entendu notre propre motion de censure, mais aussi celle de la France insoumise », a ainsi indiqué la patronne du RN ce matin. La motion du RN « sera déposée vendredi et elle sera débattue lundi ».
Marine Le Pen appelle « bien entendu » toutes les oppositions à voter le texte, demandant d' « arrêter avec le sectarisme de la France insoumise et de LR qui choisissent leur vote en fonction de la personne qui dépose ».
La motion de censure des Insoumis sera également déposée « d'ici la fin de semaine », avait indiqué le coordinateur du mouvement Manuel Bompard mardi sur Sud Radio. Pour rappel, le RN a déjà voté plusieurs motions de censure déposées par la gauche. La dernière, en octobre 2023, portait sur le projet de loi de programmation des finances publiques.
L'exécutif face au barrage des oppositions
Ces dernières semaines, les nuages se sont accumulés au-dessus du ministère des Finances. Après le sévère avertissement du Fonds monétaire international (FMI) la semaine dernière, le gouvernement affronte donc plusieurs tirs de barrage des oppositions parlementaires.
« C'est une question grave, car si notre assemblée n'a pas pu voter un budget depuis deux ans, le budget reste en théorie une prérogative essentielle de l'Assemblée », avait déploré le président de la Commission des Finances, Eric Coquerel (LFI), lors d'un point presse au Palais Bourbon. « Tout cela est consternant et antidémocratique », avait-il insisté.
Si la motion de censure, déposée par les députés de LFI, est soutenue par les élus communistes et socialistes, elle a cependant peu de chances de passer compte tenu de la composition de l'hémicycle, peu favorable à la France Insoumise. Par ailleurs, le groupe LIOT a déjà affirmé que les députés du groupe n'avaient « pas vocation à participer à cette logique », avait souligné la semaine dernière Benjamin Saint-Huile, porte-parole pour LIOT.
De leur côté, les députés LR envisagent de déposer leur propre motion de censure, mais n'ont pas l'intention de dégainer avant les élections européennes. Invité par l'Association des journalistes parlementaires (AJP) la semaine dernière, le député LR Philippe Juvin a assuré défendre « l'idée d'une motion de censure, dans l'hypothèse où, sur un des textes budgétaires (...), nos propositions seraient refusées ». Et d'ajouter : « Nos propositions sont toujours niées, que ce soit sur le budget ou dernièrement sur la fin de vie, donc il y a un moment où même les gens les mieux disposés comme moi (...), on prendra une décision ad hoc. »
Pour l'heure, Gabriel Attal n'a affronté qu'une seule motion de censure, largement rejetée, en février dernier. Sa prédécesseure Elisabeth Borne a réussi à en surmonter 31. Mais l'exécutif avait échappé de peu à un renversement (9 voix) l'année dernière lors du débat houleux sur la réforme controversée des retraites. Le groupe LIOT avait réussi à rassembler un grand nombre de voix suscitant de vives inquiétudes dans les rangs de la majorité.
L'économie française dans une phase difficile
En février, le gouvernement a annoncé une première salve de coupes de 10 milliards d'euros dans le budget de l'Etat. Mais pour parvenir à ces objectifs de réduction des déficits, le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, a finalement dévoilé une nouvelle série de coupes au printemps de 10 milliards d'euros, à réaliser cette année.
Par ailleurs, la France a enregistré un dérapage de son déficit public à 5,5% du PIB en 2023, au lieu de 4,9% anticipés. Ce qui menace l'objectif gouvernemental d'un retour sous les 3% en 2027, limite imposée par Bruxelles.
Un tel écart pourrait alourdir davantage la charge de la dette de la France qui, selon le gouvernement, va déjà s'envoler à 72,3 milliards d'euros en 2027 (plus que le budget de l'éducation nationale) contre 46,3 milliards en 2022. Ce, en raison notamment de l'effet des hausses de taux directeurs de la Banque centrale européenne (BCE) pour lutter contre l'inflation.
A cela, risquerait de s'ajouter un renchérissement lié à une défiance des investisseurs envers la France, même si, le pays bénéficie généralement d'un regard positif de leur part, grâce à la stabilité de ses institutions, la liquidité de sa dette et la diversification de son économie.
Pression de la note de S&P prévue pour vendredi
Quoiqu'il en soit, l'exécutif attend avec appréhension la note de l'agence de notation S&P Global Ratings prévue vendredi de cette semaine. Celle-ci pourrait en effet se prononcer sur une éventuelle rétrogadation de la note de la France.
La France est aujourd'hui notée « AA » par S&P, une excellente appréciation (équivalent à un 18 sur 20), mais assortie d'une perspective négative. Une révision à la baisse de la note peut donc survenir si l'agence estime que les efforts menés par l'État pour assainir ses finances ne sont pas suffisants.
Pour autant, les deux autres principales agences internationales, Moody's et Fitch, n'ont pas revu à la baisse la note française en avril dernier. Elles ont respectivement maintenu leur « Aa2 », équivalent de la note de S&P, et « AA- », un cran en dessous.
(Avec AFP)