La frustration à l'égard de Netanyahu s'accroît à mesure qu'achoppent les pourparlers sur Gaza

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Le premier ministre israelien benjamin netanyahu[reuters.com]
(Crédits : Naama Grynbaum)

par Maayan Lubell

JERUSALEM (Reuters) - La frustration à l'égard du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'accroît à mesure qu'achoppent les pourparlers visant à parvenir à un cessez-le-feu à Gaza, que ce soit en Israël ou à l'étranger, ont déclaré trois responsables israéliens à Reuters.

Au cours des quatre dernières semaines, trois responsables israéliens, l'un faisant partie de l'équipe de négociation et les deux autres ayant une connaissance approfondie des pourparlers, ont exprimé leur inquiétude quant au fait que les stratégies politiques compromettaient les chances d'un accord.

"Le sentiment est que le Premier ministre évite de prendre une décision sur l'accord et ne le défend pas à fond", a déclaré l'un des responsables à Reuters dimanche.

Au sein de la coalition d'extrême droite au pouvoir, plusieurs responsables ont menacé de quitter le gouvernement si la guerre se termine avant que le Hamas ne soit vaincu.

Les tensions entre Benjamin Netanyahu, qui affirme préserver la sécurité d'Israël, et certains membres de l'équipe de négociateurs transparaissaient dans les déclarations publiques faites dimanche.

"Je suis prêt à aller très loin pour libérer tous nos otages, tout en préservant la sécurité d'Israël", a déclaré le chef du gouvernement lors d'une allocution télévisée prononcée à l'occasion de la réunion de son cabinet.

"Notre engagement contraste totalement avec les fuites et les informations mensongères sur la question de nos otages."

Les efforts déployés par les États-Unis, l'Égypte et le Qatar pour parvenir à un accord entre Israël et le Hamas s'étaient intensifiés en juillet, mais ils se sont pratiquement interrompus après l'introduction de nouveaux termes au projet d'accord présenté par Washington en mai.

Le président américain Joe Biden a présenté fin mai un "projet d'accord global" en trois phases, la première prévoyant un cessez-le-feu de six semaines et la libération des femmes, des personnes âgées et des otages blessés en échange de centaines de prisonniers palestiniens détenus par Israël.

Cependant, Israël aurait imposé de nouvelles conditions, notamment l'imposition d'un mécanisme de contrôle des Palestiniens qui retourneront dans le nord de l'enclave au début du cessez-le-feu, ont dit des sources à Reuters.

L'assassinat mercredi à Téhéran d'Ismaïl Haniyeh, le chef politique du Hamas, dans une explosion imputée à Israël, a encore compliqué la situation.

"Nous continuerons à exercer une pression militaire sur le Hamas et ses dirigeants jusqu'au retour de tous nos otages et à la réalisation de tous les objectifs de la guerre", a déclaré Benjamin Netanyahu.

"Quiconque souhaite la libération de nos otages doit faire pression sur le Hamas, et non sur le gouvernement israélien", a-t-il ajouté.

ENTRETIEN TENDU

Ces remarques ont été formulées en réponse à une série d'informations parues au cours du week-end. Selon N12 News, Joe Biden aurait eu un entretien téléphonique tendu avec Benjamin Netanyahu au lendemain de la mort d'Ismaïl Haniyeh, l'enjoignant à conclure rapidement un accord de cessez-le-feu et "d'arrêter de (lui) raconter des histoires".

Le bureau de Benjamin Netanyahu a déclaré qu'il ne commentait pas ses conversations avec le président américain. La Maison Blanche n'a pas immédiatement commenté ces propos, qui ont également été rapportés par le journal Haaretz, citant un haut responsable de l'administration Biden.

"Les personnes qui divulguent de telles informations veulent faire pression sur le Premier ministre pour qu'il conclue un mauvais accord. Mais le résultat de ces fuites, c'est qu'elles encouragent le Hamas à avoir de plus en plus d'exigences", a déclaré un quatrième responsable israélien à Reuters lundi.

Toujours selon N12 News, les chefs de la sécurité israélienne, dont Yoav Gallant, le ministre de la Défense et Ronen Bar, le directeur du service de renseignement intérieur(Shin Bet), auraient mis en doute, lors d'une réunion qui s'est tenue mercredi, l'engagement de Benjamin Netanyahu en faveur d'un accord sur les otages.

D'après le média, Yoav Gallant a déclaré au Premier ministre que les nouvelles conditions qu'il avait introduites rendaient tout accord impossible. Le Shin Bet a refusé de commenter les discussions à huis clos. Le bureau du ministre de la Défense n'a pas répondu à une demande de commentaire dans l'immédiat.

Lors de déclarations publiques, Yoav Gallant et le chef le chef d'état-major de l'armée israélienne, Herzi Halevi, ont cependant tenu à souligner qu'après des mois de combat à Gaza, les forces armées étaient en mesure de relever les défis posés par un cessez-le-feu, tout en insistant sur l'importance de conclure un accord qui permettrait de libérer les otages.

Leur message au cours des dernières semaines contraste fortement avec celui de Benjamin Netanyahu, qui cite fréquemment ses "lignes rouges" sur la sécurité d'Israël dans tout accord. Il a nié avoir introduit de nouvelles conditions et a rejeté la responsabilité de l'impasse sur le Hamas.

"Nous avons insisté sur nos lignes rouges et nous continuerons à le faire, tant face à nos ennemis qu'auprès de nos amis", a déclaré Benjamin Netanyahu dimanche.

(Avec Stephanie Kelly à Washington et Nidal al-Mughrabi au Caire ; version française Kate Entringer)