A deux jours du second tour, le RN face à l'inconnue du "front républicain"

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Une affiche de campagne du parti d'extreme droite francais rassemblement national (rn)[reuters.com]
(Crédits : Christian Hartmann)

PARIS (Reuters) - Confronté au rempart du "front républicain", le Rassemblement national (RN) s'efforçait vendredi de conjurer la perspective d'une majorité relative à l'Assemblée nationale à l'issue du second tour des élections législatives, au dernier jour d'une campagne tendue qui augure d'une âpre recomposition politique.

Selon le dernier sondage en date, une enquête Elabe pour BFMTV et La Tribune publiée vendredi, le RN de Marine Le Pen et Jordan Bardella remporterait dimanche 200 à 230 sièges sur les 577 de la chambre basse.

Aux élections législatives de 2022, le RN avait remporté 89 sièges.

Si ces projections soulignent une percée sans précédent de l'extrême droite, qui s'inscrit dans la dynamique observée aux élections européennes du 9 juin (31,37% des voix) et au premier tour des législatives du 30 juin (33,15%), elles montrent l'effet notable des désistements de l'entre-deux-tours - plus de 200 -, qui ont réduit le nombre des triangulaires favorables au RN à quelque 90.

Au total, 501 sièges restent à pourvoir dimanche, sur les 577 que compte l'Assemblée nationale, où la majorité absolue est de 289 sièges.

Selon l'enquête Elabe, l'alliance de gauche du "Nouveau front populaire" (NFP) est créditée de 165 à 190 sièges, le camp présidentiel ("Ensemble pour la République"), de 120 à 140 sièges.

Le scénario d'une tripartition politique, avec un bloc central aux contours incertains, semble se préciser, si l'on en croit les sondeurs.

Marine Le Pen veut toutefois y croire.

Interrogée vendredi sur la chaîne américaine CNN, l'ex-adversaire d'Emmanuel Macron aux élections présidentielles de 2017 et 2022 a estimé que son parti représentait "l'alternance".

"Nous sommes ceux qui remporteront la majorité absolue", a-t-elle assuré.

"On ne représente aucun danger si ce n'est celui de lui faire perdre le pouvoir", a-t-elle souligné en évoquant le chef de l'Etat et ses mises en garde à l'électorat français.

Sur Europe 1, Marine Le Pen a martelé que son parti avait "de sérieuses chances" de l'emporter. "Les projections en sièges ne sont pas une science exacte."

"TROISIÈME TOUR"

Le député RN sortant de la Somme Jean-Philippe Tanguy a dénoncé pour sa part sur France 2 les "magouilles" et "mensonges" des artisans du barrage républicain, Nouveau Front populaire et camp présidentiel au premier chef.

"Qu'est-ce qu'ils vont proposer aux Français une fois qu'ils auront dit qu'ils veulent battre le RN?", a-t-il lancé, assurant que le RN, s'il parvenait au pouvoir, mettrait en oeuvre sans délai un projet de loi de finances rectificative pour supprimer notamment une série de niches fiscales et appliquer la promesse d'une baisse de la TVA, sur l'énergie prioritairement.

En l'absence supposée d'une majorité absolue pour le RN, l'hypothèse d'une coalition gouvernementale allant de la gauche modérée (hors La France insoumise) à la droite (hors RN et alliés) fait son chemin.

Marine Tondelier, secrétaire nationale d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV), a même évoqué vendredi sur franceinfo un "troisième tour" en ce sens.

"On verra la carte des députés de chaque parti politique pour trouver des solutions", a-t-elle déclaré, demandant "aux électeurs centristes et de droite de continuer à réfléchir de sortir de cette effervescence et de se dire quelle France je veux".

"Ceux qui ne veulent pas du RN, je leur demande d'aller voter", a renchéri sur franceinfo Xavier Bertrand, président LR des Hauts-de-France, également partisan d'une forme de "Troisième force" post-législatives.

Le député européen Place Publique Raphaël Glucksmann a dit espérer sur RTL que "de ce chaos" émerge "une démocratie plus mature" avec des députés "qui devront sortir de leurs postures".

Il a cité pour exemple les accords de coalition noués au Parlement européen pour l'adoption des projets de loi.

Le Premier ministre Gabriel Attal a déclaré vendredi que le gouvernement actuel resterait en place "aussi longtemps que ce sera nécessaire" pour assurer la gestion des affaires courantes.

Mais, a-t-il précisé en marge d'un déplacement de campagne à Paris, "je ne veux pas dès aujourd'hui donner l'impression que j'enjambe le deuxième tour des élections, parce que ça voudrait dire quelque part que je méprise un peu le vote des Français".

(Rédigé par Sophie Louet, avec la contribution de Kate Entringer et Jean-Stéphane Brosse)