États-Unis : Biden et Trump en pleine préparation de leur premier débat électoral

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Joe biden et donald trump lors du dernier debat pour les elections de 2020[reuters.com]
(Crédits : Pool)

par Nathan Layne et Trevor Hunnicutt

WASHINGTON (Reuters) - Le président démocrate Joe Biden s'est enfermé avec ses conseillers à la résidence de Camp David afin de se préparer à débattre le 27 juin avec son rival républicain pour l'élection présidentielle américaine de novembre, Donald Trump, lequel a privilégié des réunions informelles en marge de sa campagne.

Jamais, dans l'histoire moderne des Etats-Unis, un débat présidentiel n'avait eu lieu aussi tôt dans l'année. Un second face-à-face télévisé est prévu le 10 septembre, soit moins de deux mois avant le scrutin.

Déjà opposés lors de l'élection présidentielle de 2020, les deux hommes prendront part jeudi prochain à Atlanta (21h00, vendredi 01h00 GMT) à un débat qui pourrait marquer un tournant dans la course à la Maison blanche.

Joe Biden, 81 ans, et Donald Trump, 78 ans, sont donnés au coude-à-coude dans les intentions de vote, selon les sondages réalisés à l'échelle nationale, qui montrent qu'une partie non négligeable de l'électorat américain est toujours indécis.

L'une des interrogations concerne l'âge et l'acuité mentale des deux candidats, alors que le vainqueur du scrutin du 5 novembre sera dans tous les cas le président-élu le plus âgé de l'histoire du pays.

Il s'agira d'un "incroyable test de leurs compétences cognitives", a déclaré Patrick Stewart, professeur en sciences politiques à l'université de l'Arkansas et auteur d'un livre sur les débats présidentiels. "C'est l'occasion pour nous de voir combien elles ont décliné ou si elles ont décliné".

Les modalités de ce débat de 90 minutes, diffusé sur CNN, vont sortir les deux politiciens de leurs zones de confort et les contraindre à se préparer à des questions difficiles, a ajouté Patrick Stewart.

Les temps de parole vont être strictement encadrés, les fiches seront interdites et aucun spectateur ne sera présent.

INSISTER SUR LE "CONTRASTE"

A Camp David, considéré comme la résidence secondaire des présidents américains, à une centaine de kilomètres de Washington, les sessions de travail de Joe Biden sont menées par Ron Klain, ancien secrétaire général de Biden et vétéran dans la préparation de débats.

Un porte-parole de la campagne Biden a refusé de dire si l'ancien avocat de la Maison blanche, Bob Bauer, allait encore jouer le rôle de Donald Trump pour des "répétitions" du débat, comme il l'avait fait en 2020.

Joe Biden et ses conseillers entendent avant tout peaufiner l'argumentaire selon lequel Donald Trump veut imposer des mesures extrémistes sur l'avortement et d'autres questions, représente un danger pour la démocratie et est redevable aux riches donateurs qui le financent, a déclaré à Reuters un représentant de la campagne du président démocrate.

Si Joe Biden n'hésitera pas à attaquer Donald Trump sur ses agissements, dont le rôle de l'ancien président républicain dans l'insurrection sanglante du 6 janvier 2021 au Capitole de Washington, l'actuel locataire de la Maison blanche veut projeter une image de sagesse et de stabilité pour se démarquer du chaos du mandat de Trump, a ajouté le représentant de la campagne Biden.

Ce que veut Joe Biden, "c'est montrer, dans cet écran partagé (en deux), ce contraste et que le président Trump soit contraint de rendre compte de ses opinions plus extrêmes", a indiqué un autre stratégiste ayant requis l'anonymat qui conseille la campagne Biden.

Dans le camp d'en face, on entend forcer Joe Biden à défendre le bilan de son administration en matière d'immigration et d'inflation, a déclaré un conseiller de haut rang de la campagne Trump. Le candidat républicain veut également demander des comptes à son rival démocrate s'agissant de sa gestion d'un "monde en feu", a ajouté Brian Hughes, en référence aux guerres à Gaza et en Ukraine.

UNE RÉPÉTITION ? "PAS LE STYLE" DE TRUMP

Ces dernières semaines, Donald Trump a multiplié les réunions avec des sénateurs américains et des conseillers à sa résidence floridienne de Mar-a-Lago et dans d'autres lieux afin d'examiner les points politiques clés sur lesquels il souhaite insister lors du débat.

Parmi les personnes impliquées dans ces discussions figurent les sénateurs J.D. Vance et Marco Rubio, considérés comme des prétendants de premier plan pour apparaître sur le "ticket" républicain avec Donald Trump et devenir son vice-président en cas de victoire le 5 novembre. Stephen Miller, haut conseiller de la Maison blanche lors de la présidence Trump, réputé pour sa ligne dure sur l'immigration, prend aussi part aux réunions.

D'après des conseillers, Donald Trump a adopté une approche du débat plus informelle que par le passé et ne devrait pas organiser de "répétition", au contraire de 2016 et 2020 - à l'époque, son ancien allié Chris Christie avait à chaque fois campé le rôle du candidat démocrate, Hillary Clinton d'abord, Joe Biden ensuite.

"L'idée que (Donald Trump) s'installe dans une pièce et se livre à un exercice de fiction - d'abord lui il fait ça, ensuite toi tu fais ça -, ce n'est tout simplement pas son style", a dit Brian Hughes.

"Si nous devons faire quoi que ce soit, c'est simplement revoir avec lui les politiques et les réussites, et regarder de l'avant vers ce qu'il fera lors des quatre prochaines années", a-t-il ajouté.

Aux yeux d'Alan Schroeder, professeur émérite en journalisme à l'université Northeastern, il y a un certain risque pour Donald Trump à adopter une approche moins formelle alors que, contrairement à Joe Biden, il n'a effectué aucun débat en quatre ans, s'étant abstenu d'affronter ses rivaux pour l'investiture du Parti républicain lors des débats des primaires.

L'une des règles du débat pourrait s'avérer une contrariété pour Donald Trump: les micros des deux candidats seront coupés lorsque la parole ne leur sera pas donnée.

"Il a participé à tellement d'événements télévisés de toutes sortes qu'il se dit qu'il peut improviser", a déclaré Alan Schroeder, expert en débats présidentiels. "Mais débattre est quelque chose de très spécifique. De simplement débarquer ne paie pas vraiment".

(Nathan Layne et Trevor Hunnicutt; version française Jean Terzian, édité par Blandine Hénault)