📺 La semaine était foutue dès lundi. Le soir à l'Assemblée nationale, Gérald Darmanin a été interrompu en plein discours. Les députés examinaient le projet de loi sur la Nouvelle-Calédonie (on en reparlera).

Quand, soudain, tous les portables se mettent à sonner, plus personne ne semble écouter le ministre de l'Intérieur. Yaël Braun-Pivet, présidente de l'Assemblée : « Il y a une alerte en ce moment et personne ne vous entend ! » Darmanin hors-sol : « Personne ne m'entend car personne ne me laisse parler ! »

Gala, qu'on n'attendait pas là, ironise : « Ce message, qui a contraint Gérald Darmanin à couper court à sa prise de parole, a été envoyé par son propre ministère ! Eh oui, c'est Beauvau qui a déployé le dispositif FR-Alert en prévision de la cérémonie d'ouverture des JO de Paris. »

Le ministère a donc fait taire son propre ministre.

🗳️ Qui peut faire entendre sa voix ?

🧨🔥🚨 Cette question a littéralement embrasé la Nouvelle-Calédonie. À l'heure où j'écris ces lignes, les émeutes ont fait six morts et entraîné plus de 200 interpellations. Tout est parti de la volonté de Paris de permettre à de nouveaux électeurs de s'exprimer : ceux qui habitent sur l'île depuis plus de dix ans (donc 25 000 de plus). Sauf que le corps électoral était gelé à la suite de l'accord de Nouméa, signé en 1998. Promesse trahie donc. Mais au nom de la démocratie. D'où le chaos.

📲 Dans la nuit de mercredi, le haut-commissaire de la République impose le blocage de TikTok sur l'île (une première en France, et même en Europe), car le réseau a été identifié comme permettant la coordination des émeutiers. Comme si les plus déterminés n'étaient pas capables de passer par une autre appli : WhatsApp, Signal ou Telegram. On se demande : c'est parce que TikTok est chinois ? Certes. Mais Telegram est russe, alors...

⚽ L'Euro 2024 se tiendra dans un pays éminemment démocratique, fédéral même : l'Allemagne. Mais attention si tu l'ouvres sur le terrain. La grande nouveauté concerne l'arbitrage. L'Équipe prévient : « Seuls les capitaines pourront échanger avec les arbitres pendant les matchs. Si un autre joueur s'approche, il sera sanctionné. »

🟨 Écoutez Roberto Rosetti, responsable de la commission des arbitres de l'UEFA, et arbitre lui-même : « Expliquer une décision quand 22 joueurs vous entourent est impossible. Cela peut entraîner des problèmes de communication, et le football peut très rapidement prendre une tournure très négative. Cependant, dans l'optique d'améliorer la situation, à l'UEFA, nous voulons que les arbitres expliquent davantage leurs décisions aux équipes lors de l'Euro. »

Rosetti prévient que si un joueur ne respecte pas la règle, il sera d'office sanctionné d'un carton jaune ! Il vient d'inventer le tacle à l'oreille.

🎭 Fini l'agora dans la surface. Oubliez les débats socratiques sur le thème « y en a qui croivent pas qu'y a pas penalty ! » Podolski, grand attaquant allemand, nous avait avertis : « Le football, c'est comme les échecs, seulement il n'y a pas de dés. »

🤫 Un homme averti en vaut deux. À Cannes, Quentin Dupieux refuse toute interview. Le réalisateur du film Le Deuxième Acte avait prévenu de longue date qu'il ne ferait pas de promo.

📝 Dès la mi-avril, il avait écrit aux journalistes spécialisés : « Salut à tous !

Depuis la sortie de mon premier long-métrage en 2007, j'ai toujours pris le temps de dialoguer avec la presse et le public, pour préciser mes intentions et accompagner la promotion des films, comme le font presque tous les cinéastes sur cette planète. [...] J'ai accumulé, sans m'en rendre compte, un temps de parole dans les médias probablement supérieur à la durée de mes 12 films réunis. Un comble.

Aujourd'hui, j'ai envie de me taire. Non pas par lassitude ou prétention, mais simplement parce que ce film, très bavard, dit avec des mots bien choisis tout ce que j'ai envie de dire et contient déjà de façon extrêmement limpide sa propre analyse. Il serait donc inutile d'écouter un metteur en scène et ses comédiens paraphraser un film dans lequel tout est tout le temps dit et commenté en temps réel. »

Il conclut : « Vous remarquerez que ce texte est chiant comme la pluie, mais pourtant le film dont il est question l'est beaucoup moins. Encore une preuve frappante qu'il est temps pour moi de fermer mon clapet. »

🎞️ Mais ce mercredi, Dupieux était devant les journalistes pour la traditionnelle conférence de presse, passage obligé du Festival. « Je suis là pour être poli ! » balance-t-il avant de finalement laisser parler son équipe d'acteurs : Léa Seydoux, Vincent Lindon, Louis Garrel et Raphaël Quenard. Puis il prévient : « C'est un truc que je vais reproduire. J'ai l'impression que moins je parle, plus les gens ont envie de voir mes films... »

✍️ Salman Rushdie, lui, refuse de se taire, même après avoir été poignardé. Il a perdu l'usage d'un œil, mais pas des mots.

Mercredi soir, il était l'invité d'un exceptionnel numéro de La Grande Librairie sur France 5. L'écrivain vit depuis trente-cinq ans sous le joug d'une fatwa de l'ayatollah Khomeyni exigeant sa mort depuis la parution des Versets sataniques. Pour la première fois, il se livrait sur l'attaque dont il a été victime le 12 août 2022 aux États-Unis. Émission tragique et joyeuse, à la parole virevoltante. Augustin Trapenard l'interroge sur le prix de la liberté. Réponse de Rushdie : « La liberté, pour moi, c'est ce sans quoi on ne peut pas écrire. » Son nouveau roman s'appelle justement Le Couteau.

On repense à Paul Valéry : « Qui ne peut attaquer le raisonnement attaque le raisonneur. »

Tranchant.