Chronique de François Simon : Trouble, histoire d'y voir clair

CHRONIQUE CHAUD DEVANT - François Simon a testé la cave à vin Trouble, dans le 9e arrondissement de Paris. Un établissement qui a saisi qu'aujourd'hui l'appétit est un animal indocile et volatil.
(Crédits : DR)

L'appétit est un curieux animal. Si on l'écoutait un peu plus, il nous rendrait différents. Mais nous ne l'écoutons guère. Nous suivons nos schémas mentaux, administrons raisonnablement notre nutrition alors que l'estomac a ses fantaisies; nos désirs, leurs excès. Prenons l'univers des restaurants où nos appétits sont réglés comme du papier à musique : entrée/plat/dessert ; pain/vin/eau ; café/addition/chocolat. C'est entendu. Essayons une cave à manger, cette nouvelle race de restaurants bienveillants. Ce soir, vous n'avez pas trop faim. Un verre avec des amis, un petit appétit, une petite assiette. Et voilà, parfois même, comme dans une partition de musique, on recommence le morceau à l'andante ; avec plus d'allant. Précisément, vous voici dans une toute nouvelle adresse du nord de Paris. Cette cave à manger s'appelle Trouble, un peu comme les vins naturels que Nicolas Phillips, le sommelier (Ex-Expérimental Group, Fulgurances), débouche à tour de bras. En cuisine, Stefano De Carli (ex-Grand Pigalle Hôtel, Passerini...) envoie des plats comme des frisbees, voltigeants, ramassés, percutants même comme ces sidérants culurgiones.

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Ce sont des raviolis sardes farcis faits à la main, à la seiche crue avec un condiment nduja (sorte de saucisse piquante à tartiner de Calabre) et, j'ai cru comprendre, une sauce asiatique dont le nom est entré par une oreille et est sorti par l'autre. C'est bref mais intense. On pourrait s'arrêter là, lever le camp, saluer la compagnie. Mais comme la marée sur le rivage, on revient sur une touche sucrée comme ce tiramichou, piégeux à souhait dans son intention (un tiramisu dans un large chou) mais bigrement réussi. On a alors envie de tourner les talons, même sortir se taper une clope ; tout va bien, ce genre d'établissement est souple, il dispose d'une terrasse, de banquettes, d'un comptoir. Il a compris qu'aujourd'hui l'appétit est un animal indocile, volatil. Un rien l'attire, le capte et l'immobilise, avec cette illusion jouissive que nous sommes les seuls maîtres à bord. (Tu parles.)

Trouble, 15, rue Hippolyte-Lebas (Paris 9e). Comptez 40 euros. Instagram : @trouble.winebar

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