Transition énergétique : une ferme franc-comtoise teste un tracteur alimenté 100% au biométhane

C'est un cercle vertueux inédit. Les émissions de gaz des animaux de la ferme (bovins et porcs) située à Andelnans, près de Belfort, sont captées. Ce gaz permet ensuite de produire du biométhane, lui-même alimente ensuite l'un des tracteurs de la marque New Holland de l'exploitant. Ce même tracteur qui va enfin réaliser l'épandage pour les cultures qui nourrissent les bêtes. Un projet soutenu par GRDF, GRTgaz et l’Ademe. Reportage.
Antoine Gaber, agriculteur, fait le plein de son tracteur 100% au biométhane
Antoine Gaber, agriculteur, fait le plein de son tracteur 100% au biométhane (Crédits : AMANDINE IBLED)

Le gouvernement continue de soutenir le développement du bioGNV au sein de la filière agricole. Après la publication d'un guide pratique et le lancement d'un premier appel à projets en 2023, l'Ademe a clôturé une nouvelle édition de son appel à projets « bioGNV à la ferme » le 5 juillet dernier. Le taux de financement peut atteindre 70% des dépenses éligibles pour une enveloppe maximale de 300.000 euros hors taxe par entreprise et par projet sur une période de trois ans.

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L'ambition ? Favoriser la méthanisation - qui transforme une pollution en énergie verte - et ainsi activer trois leviers : la baisse du gasoil fossile sur les machines, la gestion des effluents chez les éleveurs (moins d'émission de méthane) et l'épandage du digestat sur les cultures en remplacement de l'engrais de synthèse (qui rejette du protoxyde d'azote).

Un cercle vertueux

Située non loin du réseau de gaz de Belfort-Montbéliard, la ferme de Longchamps à Andernans, dont l'élevage de porcins et de bovins provoquait, dans cette zone périurbaine, des problématiques d'odeurs, s'est rapidement positionnée sur une unité de méthanisation à injection.

Depuis 2015, la ferme utilise un digesteur de biométhane. Celui-ci transforme les déchets organiques issus des effluents d'élevage en énergie verte. Ce biométhane est ensuite injecté directement dans le réseau de gaz de Belfort-Montbéliard. En 2018, l'exploitation fait partie des pionnières à installer une station de production de gaz carburant (GNV) qui alimente les véhicules de la ferme (utilitaires et tracteur New Holland), ainsi que d'autres véhicules du secteur.

« Concrètement, nous utilisons les effluents d'élevage pour produire du biométhane, qui alimente le tracteur, lequel - à son tour - participe aux travaux liés aux cultures ou aux soins des troupeaux », explique Antoine Graber, agriculteur à la ferme de Longchamps.

A titre indicatif, une station de ce type coûte entre 100.000 et 200.000 euros, et peut être prise en charge par l'Ademe à hauteur de 70%.

3% de la production journalière du méthaniseur de la ferme

Depuis fin 2022, la ferme loue pour une durée de trois ans, le premier prototype de tracteur alimenté à 100% au biométhane, conçu par l'entreprise New Holland, deuxième fabriquant de tracteur derrière John Deere, et détenu par le groupe italo-américain d'équipements agricoles et de construction CNH Industrial. Ce projet est en partie financé par GRDF, GRT Gaz et l'Ademe.

« Le tracteur T6 Methane Power est 25% plus cher que son équivalent diesel », indique Nicolas Morel, responsable produit carburants alternatifs chez New Holland. Le tracteur est alimenté à la station de la ferme. L'avantage par rapport à l'électrique, c'est qu'il faut seulement entre 10 et 15 minutes pour faire le plein.

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La machine dispose d'une autonomie d'environ cinq heures, soit la moitié de son jumeau en diesel. « Pour les travaux difficiles dans les champs, il faut compter deux pleins par jour », précise l'agriculteur. Ce qui représente à peine 3% de la production journalière du méthaniseur de la ferme.

« On a un système de rack de bouteilles à côté de la station qui compresse le gaz dans les bouteilles et permet son stockage. Lorsque nous revenons, nous n'avons plus qu'à appuyer sur la poignée du pistolet pour remplir le réservoir », explique Antoine Gaber.

Un manque d'autonomie

« Le gabarit du tracteur est de 155 chevaux, soit le gabarit moyen des tracteurs utilisés en France », souligne Nicolas Morel. L'agriculteur qui exploite le tracteur T6 émet une réserve de taille : un manque d'autonomie et de confort. « Sachant que nos champs sont parfois à 15km, le tracteur consomme déjà une heure de travail pour le trajet, donc 5 heures d'autonomie, c'est parfois juste », constate-t-il.

L'agriculteur réserve l'usage du tracteur pour ramasser des intercultures ou de la paille ou encore aller chercher les bêtes en bétaillère. « Lorsqu'on rentre plusieurs fois à la ferme dans la journée, ce n'est pas gênant, car le plein de biométhane est rapide », poursuit-il.

Un modèle plus puissant pour 2025 ?

Un manque d'autonomie que reconnaît New Holland qui avait fait le choix d'un petit modèle, très simple, mais qui prouvait que la technologie fonctionnait, positionné sur le potentiel de marché le plus large.

« Les clients qui veulent rouler au méthane, sont les agriculteurs qui produisent du méthane sur des fermes dont les tailles d'exploitation sont supérieures à la moyenne, des outils plus gros que la moyenne, des besoins de transport supérieurs à la moyenne », constate Nicolas Morel.

C'est pourquoi les équipes de New Holland planche sur un nouveau modèle plus puissant : le tracteur T7 (270 chevaux contre 155 pour le T6), avec plus d'autonomie (entre 9h et 12h selon les travaux effectués). Les premières livraisons sont attendues pour fin 2025.

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