Rétrofit : Manitou dévoile le premier chariot télescopique électrique

C’est un grand jour pour Manitou ! En ligne avec ses engagements environnementaux, le constructeur d’engins de chantier situé en Loire-Atlantique dévoile ce mardi 4 juin son premier chariot télescopique rétrofit électrique. Si cette solution répond au besoin d’accélérer la transition vers des matériels moins émetteurs en carbone, elle s'inscrit aussi pleinement dans la démarche d'économie circulaire du groupe. Explications.
En collaboration avec le groupe Kiloutou, Manitou présentera en avant-première le premier chariot télescopique retrofit électrique, le 4 juin 2024 à Ancenis.
En collaboration avec le groupe Kiloutou, Manitou présentera en avant-première le premier chariot télescopique "retrofit" électrique, le 4 juin 2024 à Ancenis. (Crédits : Manitou)

En 2022, Manitou signait un partenariat exclusif avec le loueur de matériels pour le BTP Kiloutou pour le développement d'un kit d'électrification pour des chariots télescopiques thermiques d'occasion. Deux ans plus tard, l'heure est venue de présenter en avant-première ce modèle rétrofité (diesel transformé en électrique), ce mardi 4 juin au siège du constructeur à Ancenis (Loire-Atlantique). L'occasion d'en savoir plus sur sa feuille de route environnementale.

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-33,7 % des émissions de CO2 liées à l'utilisation des machines

D'après une étude de la FNTP (Fédération Nationale des Travaux Publics), l'acte de construire les infrastructures représente 3,5% des émissions de CO2 en France (soit 22,9 millions de tonnes équivalent CO2). Et, sans surprise, le gazole pèse lourd dans la facture carbone du secteur de la construction. 20% des émissions carbone est imputable aux seuls engins de chantier. « L'énergie qu'ils utilisent représente le second poste de l'empreinte carbone, juste derrière la production des matières premières (50%) », constate Aude Brezac, directrice RSE chez Manitou (5.500 collaborateurs dont environ 3.000 en France et 2,9 milliards d'euros de chiffre d'affaires 2023). L'enjeu pour la profession est donc de trouver des alternatives à cette énergie fossile.

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Conscient de ses responsabilités, le groupe Manitou qui conçoit, produit, distribue et assure le service de matériels de manutention à destination de la construction, de l'agriculture et des industries a donc décidé d'agir. Dans le cadre de sa démarche RSE enclenchée depuis 2012, il s'est notamment fixé deux priorités environnementales (la décarbonation et l'économie circulaire) et deux objectifs à horizon 2030.

« Réduire de 46,2 % les émissions de carbone directes et indirectes (scopes 1 et 2) par rapport à 2019, tout en réduisant de 33,7% les émissions de CO2 liées à l'utilisation des machines (scope 3), qui représentent, à elles seules, 89% du total des émissions générées », poursuit Aude Brezac.

Ce qui correspond à atteindre un objectif de 43% de machines dites "bas carbone" (électrique et hydrogène) commercialisées en 2030. Un chiffre qui atteint 11,56% aujourd'hui. « Nous avons un retard dans la trajectoire de réduction d'émissions liées au matériel électrique », reconnaît-elle.

Le rétrofit, un accélérateur de décarbonation

Si Manitou continue de travailler sur l'efficacité énergétique de ses matériels thermique et l'optimisation R&D de ses machines, le groupe s'est lancé dans un autre chantier : développer une offre sur la conversion des machines thermiques vers d'autres énergies moins intensives en carbone. Après avoir électrifié ses gammes de nacelles tout-terrain et de chariots télescopiques, le groupe s'oriente dorénavant vers le rétrofit pour offrir d'autres alternatives aux utilisateurs. Manitou ne serait pas le premier à s'emparer du sujet. D'autres avant lui l'ont déjà fait comme Hitachi (pelle électrique) ou JLG (nacelle).

« C'est une première sur les engins télescopiques », assure Aude Brezac.

Ainsi est né ce partenariat entre le loueur Kiloutou et le constructeur Manitou dont le projet a abouti à un kit qui permet de passer d'un moteur thermique à une machine fonctionnant en 100% électrique. Lequel a été installé sur un chariot télescopique. L'engin n'a pas été choisi au hasard : « Il fait partie des dix machines les plus émissives de CO2 dans le parc de Kiloutou », précise la directrice RSE.

Allégé de 400 kilos, ce chariot télescopique rétrofit, dont la structure n'a pas été modifiée, a exactement les mêmes performances que la version diesel, « conformément au cahier des charges de Kiloutou », souligne Pascal Graff, en charge du cycle de vie des produits chez Manitou et de ce projet. Mais il reste une inconnue : l'autonomie et plus particulièrement le temps de recharge. « En fonction de la disponibilité de la puissance électrique, le chargement pourra prendre une heure sur un superchargeur et jusqu'à 18 heures sur une prise domestique. En utilisation intensive, la durée d'autonomie est quant à elle de trois heures et demie. »

Concrètement, le rétrofit ne va pas permettre de prolonger la vie des équipements mais « de décarbonner tout en utilisant moins de matières premières, soit une tonne de matières extraites contre 14 tonnes avec un engin thermique », compare Aude Brezac. Selon qui la solution va surtout permettre de diminuer considérablement les gaz à effets de serre. Soit « une réduction 42% sur une durée de vie de 10.000 heures ». Autres avantages : « C'est aussi moins de particules fines, pas de bruit et donc moins de nuisances et de pénibilité pour les opérateurs. »

Des premières livraisons en 2025

Pascal Graff ajoute : « Dans quelques semaines, la machine sera mise dans le circuit de location avant une série de tests sur le terrain, pendant six mois, avec des clients afin de vérifier différents aspects d'usage (autonomie, bruit, performances...). Dans un premier temps, elle va tourner dans l'Ouest de la France. Puis, si tout se passe bien, elle se déplacera dans la région parisienne. »

Si elle passe tous les tests avec succès, les premières livraisons pourraient quant à elle démarrer l'an prochain.

« Nous testons encore la faisabilité économique du rétrofit. Cette étude sera finalisée avant la fin de cette année. Nous avons de bon espoir. »

A l'avenir, toute la gamme Manitou pourrait être équipée de kits d'électrification. « Nous sommes attentifs à toutes les demandes. » D'ailleurs, des discussions seraient « bien engagées » avec certains utilisateurs et d'autres partenariats pourraient voir le jour pour utiliser le rétrofit sur d'autres engins, « soit sur ceux qui sont très émissifs soit sur ceux pour lesquels nous avons des volumes importants ».

Mais un prochain challenge attend Manitou : convaincre les utilisateurs de passer au rétrofit. Car il n'en reste pas moins que cette solution a un coût non négligeable. Côté prix, il faut compter un surcoût compris « entre 20% et 30% », d'après Aude Brezac. Une fourchette qui peut varier selon la valeur de la machine sur le marché, tient à souligner Pascal Graff. Manitou en appelle donc au soutien des pouvoirs publics pour encourager le déploiement d'une telle solution dans la construction.

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