Relance du nucléaire : deux startups s'allient en Europe pour accélérer le développement de mini-réacteurs (AMR)

Par latribune.fr  |   |  864  mots
L'Etat a fait du développement des « petits réacteurs innovants » une priorité de sa relance du nucléaire (Photo d'illustration). (Crédits : Unsplash licence - Lukáš Lehotský)
Dans un contexte marqué par la décarbonation de l'industrie nucléaire, deux jeunes pousses ont annoncé le lancement d'un partenariat stratégique et industriel pour accélérer le développement des petits réacteurs en Europe. Naarea et Newcleo sont soutenues dans le cadre du plan d'investissements France 2030.

Peut-on rendre l'énergie nucléaire plus verte dans le cadre de la transition énergétique ? Deux startups du nucléaire, Naarea et Newcleo, lancent « un partenariat stratégique et industriel » ont annoncé mardi à l'AFP les deux sociétés soutenues par le programme d'investissement France 2030. Objectif affiché, accélérer dans la course au développement des petits réacteurs innovants en Europe, dits de 4e génération.

« Ce partenariat stratégique et industriel (...) a pour ambition d'accompagner l'ensemble [des] acteurs dans leur déploiement industriel, technologique, scientifique et réglementaire », font valoir les deux sociétés, premières lauréates de l'appel à projets « réacteurs nucléaires innovants » de France 2030, selon le communiqué commun.

Plus concrètement, cette alliance aura ainsi vocation à s'étendre à l'ensemble des acteurs travaillant en Europe sur les technologies de réacteurs de 4e génération, aussi appelés les AMR (Advanced modular reactors).

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 « Nos deux entreprises veulent simplifier le travail des pouvoirs publics et in fine favoriser le développement et le déploiement d'un nucléaire de 4e génération européen, dans un contexte de concurrence mondiale forte », a notamment explicité Jean-Luc Alexandre, président-fondateur de Naarea cité dans le communiqué.

« En unissant nos forces, Newcleo et Naarea encouragent l'essor et le déploiement d'une technologie nucléaire de 4e génération en Europe », a vanté Stefano Buono, cofondateur et PDG de Newcleo.

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« Mutualiser » les efforts

Pour réussir leur pari, les deux sociétés jouent sur deux tableaux : Newcleo table sur un mini-réacteur à neutrons rapides refroidi au plomb. Quant à Naarea, elle s'appuie sur un micro-générateur à neutrons rapides et sels fondus. Ces deux technologies utiliseront des déchets nucléaires comme combustibles, assurent leurs promoteurs, qui visent une première commercialisation de leurs solutions « à l'horizon 2030 ».

Ce partenariat permettra aux deux entreprises et par la suite aux autres acteurs du secteur de « mutualiser leurs efforts » et de « gagner en efficience » en travaillant sur divers terrains de coopération : accès aux combustibles nucléaires usagés, « optimisation » des procédures auprès des autorités de sûreté, développement des installations d'essais mutualisés, constitution d'une plateforme de recherche commune...

Les deux sociétés font valoir qu'il s'agit d'une « démarche complémentaire » à la création d'une alliance industrielle pour les petits réacteurs modulaires réclamée par douze pays européens dont la France, la Suède, les Pays-Bas, la Pologne et la Slovaquie, initiative soutenue par la Commission européenne.

EPR, AMR, SMR... La course est lancée

Les noms de Naarea et Newcleo ne sont pas inconnus. Début 2023, les sociétés ont intégré le programme d'investissements France 2030 (pour 25 millions d'euros à deux). Elles avaient alors rejoint Nuward (filiale d'EDF créée début 2023). Plus récemment, en novembre dernier, six projets supplémentaires de réacteurs nucléaires « innovants » feront l'objet d'un soutien de l'Etat français, à hauteur de 77,2 millions d'euros, auquel s'ajoute un accompagnement par le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) pour 18,9 millions, avait annoncé le gouvernement l'an dernier.

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Les six projets soutenus, à des stades de maturité variables, couvrent tous types de technologies : réacteur de fission au sodium, ou à haute température, ou réacteur à fusion. Certains visent à produire de la chaleur, un autre ambitionne de recycler les combustibles usés. Ils avaient alors été sélectionnés parmi 15 projets candidats.

Ces six projets sont le projet GTA porté par la start-up Jimmy Energy (microréacteur à haute température pour produire de la chaleur industrielle), RF01 de Renaissance Fusion (réacteur compact à fusion deutérium-tritium) et Calogena (réacteur modulaire pour apporter de la chaleur aux réseaux urbains). Les trois autres sont Hexana (réacteur à neutrons rapides pour produire chaleur et électricité), Otrera (réacteur à neutrons rapides permettant le recyclage de combustibles usés) et Blue Capsule (réacteur à haute température).

L'Etat a fait du développement de ces « petits réacteurs innovants » une priorité de sa relance du nucléaire, avec la construction en parallèle de gros réacteurs puissants pour compléter le parc existant avec six nouveaux EPR2 dans un premier temps.

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L'idée est de soutenir des « innovations de rupture » pour l'avenir dans la R&D de la filière nucléaire française, qu'il s'agisse de production combinée d'électricité, chaleur et/ou hydrogène, de favoriser le recyclage des combustibles ou d'améliorer la gestion des déchets, avaient justifié les ministères de l'Industrie et de la Transition énergétique.

Quelque 70 à 80 projets de réacteurs SMR (pour « small modular reactor » en anglais) et AMR (« advanced modular reactor ») coexistent déjà notamment aux Etats-Unis, au Canada, en Russie. Le projet Nuward d'EDF a pour objectif un premier béton pour sa tête de série en 2030.

(Avec AFP)