CSC. Cet acronyme, désignant la corrosion sous contrainte, est devenu le cauchemar d'EDF dès octobre 2021 lorsque l'exploitant du parc atomique tricolore a découvert une fissure sur une conduite d'eau, servant à refroidir le réacteur en cas d'urgence, dans la centrale de Civaux (Vienne). Identifié sur plusieurs sites, ce phénomène avait contraint l'électricien à mettre à l'arrêt de nombreux réacteurs, entraînant une importante baisse de la production nucléaire et des pertes records pour EDF en 2022.
Mais alors que la disponibilité du parc a retrouvé un niveau bien plus acceptable depuis début 2023, ce phénomène ne fait, pour autant, pas partie de l'histoire ancienne. « Personne ne peut dire, ni affirmer qu'on n'en trouvera pas de nouveaux [problèmes de corrosion, ndlr] », a lancé Bernard Doroszczuk, le président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), lors la présentation de son rapport annuel devant l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), réuni ce jeudi à l'Assemblée nationale. De fait, en mars dernier, EDF a indiqué avoir détecté des fissures sur deux soudures du réacteur de la centrale de Blayais 4, située en Gironde.
Des incertitudes persistent
Questionné par le député de Seine-et-Marne Maxime Laisney (LFI) sur les causes de ce phénomène qui a ébranlé le parc nucléaire, Bernard Doroszczuk a reconnu qu'il existait « encore des incertitudes ». Si une des causes avérées est liée à la géométrie des lignes de conduites des réacteurs les plus récents (les paliers de 1.450 mégawatts et de 1.300 mégawatts), le patron de l'ASN a aussi précisé qu'il pouvait « y avoir d'autres causes », en faisant notamment référence à la fragilité de certaines soudures ayant fait l'objet de multiples réparations lors de leur fabrication. C'est notamment la piste privilégiée pour expliquer l'importante fissure de 23 millimètres découverte sur l'un des réacteurs de Penly en mars 2023, ainsi que la fissure détectée sur le réacteur de Flamanville 1. Par ailleurs, d'autres travaux d'investigation actuellement en cours concernent « la chimie de l'eau ». « C'est une hypothèse qui n'est pas écartée », a indiqué Bernard Doroszczuk.
Selon le président de l'autorité, une certitude demeure : l'origine de ce phénomène relève d'un faisceau de facteurs. Celui-ci estime donc qu'il « ne faut pas baisser la garde », notamment parce que « les réparations ont été faites à l'identique ». Des opérations de contrôle seront ainsi faites systématiquement sur des endroits ciblés.
Quelque 700 soudures déjà contrôlées
En parallèle, EDF a entamé, fin 2022, un vaste programme de contrôles sur tous les réacteurs, qui devrait aboutir en 2025. Dans ce cadre, plus de 700 soudures avaient déjà fait l'objet de contrôles par ultrasons en mars 2024. Sur ce volume, 270 ont été expertisées en laboratoire. « Trois défauts qualifiés de relativement profonds, c'est-à-dire dépassant le quart de l'épaisseur de la soudure », ont été détectés, a indiqué à la presse Julien Collet, le directeur général adjoint de l'ASN. Ces défauts ont été identifiés au premier semestre 2023 sur les réacteurs de Penly 1, Penly 2 et Flamanville 1. Deux de ces fissures sont bien le résultat d'un problème de corrosion sous contrainte sur des soudures ayant fait l'objet de réparation tandis que la troisième est le résultat d'un phénomène de fatigue thermique. Par ailleurs, des fissures de plus de 2 millimètres de profondeur ont été identifiées sur quelque 90 soudures.
Contacté par la rédaction, EDF a indiqué avoir intégré dans ces estimations de production d'électricité l'éventualité d'avoir à procéder à des réparations liées à la corrosion sous contrainte. Pour 2024, la fourchette de prévision s'établit entre 315 et 345 térawattheures (TWh). En 2023, elle s'est établie à 320,4 TWh.
Sujets les + commentés