De la crise sanitaire à la crise économique

OPINION. Avec un recul de 5,8% de son PIB au premier trimestre, un niveau inédit depuis 1949, l'économie française enregistre la pire chute de la zone euro. Cette crise économique du coronavirus n'est pas qu'un choc de demande comme la crise des subprimes, c'est aussi un massif choc d'offre. Par Marc Guyot et Radu Vranceanu, professeurs à l'ESSEC.
Marc Guyot et Radu Vranceanu.
Marc Guyot et Radu Vranceanu. (Crédits : Reuters)

Selon les chiffres de l'INSEE, la croissance du PIB de la France au premier trimestre 2020 a subi un recul historique de -5,8% ce qui représente la plus forte chute depuis 1949 et le début de la publication de cette statistique. C'est un des pertes d'activité les plus lourdes de la zone euro qui connait un recul de -3,8%, avec -5,2% pour l'Espagne ou -2,5% pour l'Autriche. La chute du PIB devrait être encore plus lourde au deuxième trimestre.

Il apparaît que parallèlement à la lutte sanitaire contre le Coronavirus se dessine une lutte économique à venir pour sauver l'économie française d'une crise d'une sévérité jamais vue. A court terme se dessinent une vague colossale de faillites d'entreprises avec son corollaire d'explosion du chômage et de la pauvreté.

Comportement à la gribouille

Les deux objectifs sanitaires et économiques peuvent sembler antagonistes. En effet, ce n'est pas le virus en soi qui a créé la crise économique, c'est la façon avec laquelle le gouvernement mène sa politique sanitaire étant donné l'état des infrastructures médicales en termes de capacité d'hospitalisation et de tests, et étant donné le nombre de masques disponibles. L'ensemble des données de la situation française ainsi qu'un comportement à la gribouille sur les masques et les tests ont amené à cette situation de confinement qui dure, qui ne s'arrêtera pas le 11 mai, et qui est en train d'anéantir l'économie française en détruisant ses entreprises et notamment ses petites entreprises.

L'arrêt décidé des activités non-essentielles, le climat de peur, et la fermeture des écoles ont provoqué le ralentissement brutal de toute activité économique. Il est urgent que le gouvernement intègre cet élément et se donne comme priorité de guider les entreprises, les commerces et les services vers la reprise de l'activité avec la mise en place des sûretés sanitaires nécessaires. En effet, cette crise économique du coronavirus n'est pas qu'un choc de demande comme la crise des subprimes, c'est aussi, un massif choc d'offre.

Priorité à la restauration de l'offre

Quand le système productif est cassé ou enrayé par des surcoûts et interdictions, les efforts du gouvernement doivent porter en priorité sur la restauration de l'offre. Stimuler la demande quand la production est dysfonctionnelle non seulement ne résout pas le problème mais peut aussi potentiellement réveiller l'inflation. La hausse importante des prix des produits alimentaires au mois d'avril en est l'illustration (3,8% en zone euro).

Pour relancer l'offre, il faut que l'État s'engage sur les guides d'organisation de reprise du travail dans des conditions sanitaires suffisantes de façon à faire baisser la peur des travailleurs face à l'incertitude et leur permettre de reprendre le travail au plus vite. Pour cela il faut que l'École puisse elle aussi redémarrer pour que les parents n'aient plus la charge de la garde des enfants.

Dans ce contexte, il serait dangereux que certains syndicats jouent la surenchère sanitaire et profitent de la situation pour prouver leur capacité à bloquer la production. Une telle approche est de nature à précipiter des entreprises fragilisées à la faillite et pourrait pousser le chômage vers les 20% de la population active. Le cas d'Amazon France est une triste illustration de cette dérive. Ses dépôts français sont fermés, ses employés sont sur le bord de la route et l'activité d'Amazon en France se poursuit à partir de l'Espagne et de l'Allemagne.

Les effectifs ne pourront pas être maintenus

Bruno Le Maire et Muriel Pénicaud semblent avoir pris la vraie mesure de la crise. Le soutien aux entreprises solvables mais à court de liquidités doit être renforcé. Les mesures de chômage partiel qui avaient du sens à la fois pour le soutien de la demande mais aussi pour la possibilité de repartir vite pour les entreprises doivent être amendées pour moins de générosité, pour ne pas devenir une incitation au non-travail. Il devient de plus en plus clair que les entreprises ne pourront pas maintenir les effectifs dans les mois à venir. Garder fictivement dans les effectifs des personnes qui ne retrouveront pas leur emploi n'a pas de sens d'autant que certains secteurs vont manquer de main d'œuvre du fait des restrictions de circulation et de la volonté de redévelopper en France certaines industries. Ainsi il faudrait renforcer le soutien aux chômeurs, notamment l'aide à la formation professionnelle et à la mobilité.

L'heure de la crise sanitaire aiguë est passée, il est temps pour le gouvernement de s'attaquer résolument à la récession corona.

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Commentaires 14
à écrit le 03/05/2020 à 19:10
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Le confinement, c'est partout : s'il y a récession, ce n'est pas la faute du gouvernement, c'est la faute à pas de chance. Mais c'est tellement plus tendance de critiquer et de donner des leçons. Et, bien sûr, il vaut mieux faire du chômage que de ...

à écrit le 03/05/2020 à 9:32
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Nous avons une crise sanitaire qui entraine une crise économique viendra le temps du chaos social et de la crise politique, éviterons nous la guerre ?

le 03/05/2020 à 10:20
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Une guerre contre qui?

le 03/05/2020 à 13:07
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Comme le confinement provoque des phénomènes mentaux : Déjà il y a induction des métiers de santé contre ceux du CAC 40 Ensuite induction des citoyens contre l’organe de santé autoritaire en France et contre les hauts fonctionnaires coincés Plus ver...

à écrit le 02/05/2020 à 20:58
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Les chiffres de la bourse sont bidouillés depuis de nombreuses années , les gains de cette année sont transférés, d’une autre manière , mais l’opinion publique croit que les dividendes ne sont pas prises .. le monde vivait à crédit depuis juillet 2...

à écrit le 02/05/2020 à 16:23
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et pendant ce temps les gavés ponctionnaires qui ne servent à rien vont continuer à vivre comme si de rien n'était !!!

à écrit le 02/05/2020 à 16:02
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Ce qui provoque de l'inflation c'est le confinement : - obligation d'acheter chez le commerçant le plus proche = fin de la libre concurrence entre distributeurs - obligation d'acheter les produits qui se vendent le mois. Les grandes marques sont ra...

à écrit le 02/05/2020 à 15:07
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Cette pandémie est pour « sauver l’économie mondiale de la récession «  qui s’était déclaré au moins 6 mois avant cette crise sanitaire et maintenant économique Maintenant, ils ont « un prétexte « pour licencier en masse

à écrit le 02/05/2020 à 12:26
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Donc , si j’en crois ces auteurs ...l’inflation serait plus insupportable que l’appauvrissement généralisé de nos concitoyens. Bref...la politique de la calculette doit être réinitialisée. A situation singulière, mesures singulières. Il faut faire...

à écrit le 02/05/2020 à 11:00
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Il y a quelques années Fillon avait dit que la France était en faillite, c'était pas vraiment faux , maintenant c'est sûr on est en liquidation judiciaire et banqueroute, il faut nommer un syndic et un administrateur judiciaire.

le 02/05/2020 à 11:28
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Oui mais un petit bémol : dette de la France environ 3000 milliards d'euros et avoirs financiers des ménages 5300 milliards d'euros je crois. En cas de faillite on ne se sert pas sur les avoirs disponibles ?

à écrit le 02/05/2020 à 10:32
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Assurer une demande c'est un retour a la réalité, repartir sur l'offre c'est envoyer du rêve, pour retourner au même cauchemar!

à écrit le 02/05/2020 à 10:16
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Notons quand même que cette crise majeur est due dans sa plus grande partie à l'hypocrisie générale concernant ce virus qui n'est pas comme les autres, que l'on peut attraper plusieurs fois et donc si au lieu de nous faire croie qu'ils sont vachement...

à écrit le 02/05/2020 à 10:13
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La plupart des gens ont beaucoup trop peur de cette pandémie. Le confinement va apporter d'énormes problèmes économiques.

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