Guillaume Kasbarian ne perd pas de temps. Trois mois après sa nomination au ministère du Logement, l'ex-président Renaissance de la commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale vient de présenter, en Conseil des ministres, un projet de loi « pour développer l'offre de logements abordables ». Ce texte reprend la philosophie du « choc d'offres » théorisée par le Premier ministre Gabriel Attal lors de son discours de politique générale et met en ordre les annonces du ministre Kasbarian au Marché international des professionnels de l'immobilier (Mipim).
Un article controversé sur les logements locatifs intermédiaires
Le premier chapitre de la loi vise ainsi à « offrir de nouveaux outils aux élus qui veulent construire ». Décrié par les bailleurs sociaux (Union sociale pour l'habitat), des acteurs de la solidarité (FAS) et de la Fondation Abbé Pierre, redoutant la marginalisation du logement social. l'article 1 entend ainsi inclure dans les objectifs de production de la loi SRU la construction de logements intermédiaires pour favoriser la mixité.
Par logement locatif intermédiaire (LLI), il faut entendre des habitats pour les classes moyennes trop riches pour le parc social, trop pauvres pour le parc privé. La loi SRU de 2001 impose la production de 20 à 25% de logements sociaux dans les communes en tension locative. Selon le gouvernement, 650 maires déficitaires pourront ainsi utiliser le LLI pour remplir leurs objectifs de rattrapage.
L'article 2 est tout aussi polémique, car il permettra aux maires de décider de l'attribution de logements sociaux neufs. Beaucoup d'observateurs redoutent un effet de clientélisme au niveau local.
Une réduction des deux tiers des délais de recours
L'article 3 vise à créer un nouvel outil de préemption pour réguler les prix des terrains. Les maires pourront ainsi préempter les terrains vendus trop chers si la cession d'un terrain ou d'un bien est « objectivement » déconnectée des prix du marché.
Au chapitre simplifier les procédures administratives pour construire plus vite, l'article 4 promet de réduire de 4 mois les délais de recours pour construire des logements plus rapidement. A savoir une réduction des deux tiers des délais de recours, « soit un gain potentiel jusqu'à 3% sur le coût des projets ».
Des maires effrayés par la ZAN
L'article 5 entend, lui, offrir aux élus la maîtrise de la densification pavillonnaire douce pour encourager la construction, alors même que les maires sont effrayés par la politique de zéro artificialisation nette (ZAN) des sols.
« Il est possible de concilier offre nouvelle et respect du foncier », a rétorqué, à La Tribune, le ministre du Logement qui a évoqué le plan visant à transformer les entrées de ville pour y construire 25.000 logements ou encore le Fonds friche né après la crise Covid de 2020 pour transformer ces zones déjà artificialisées.
Guillaume Kasbarian s'engage ainsi à accélérer les procédures administratives pour que les collectivités puissent définir d'orientations d'aménagement favorables à la densification douce et déployer des opérations de transformation urbaine.
C'est « gagnant » pour les maires, les propriétaires et la sobriété foncière, sachant que la moitié des maisons individuelles disposent d'un jardin d'une surface d'au moins 600 m², a insisté le représentant du gouvernement Attal.
L'article 6 répond à la demande des professionnels de simplifier d'aménagement global du territoire. Objectif: permettre de ne déposer qu'une seule autorisation pour plusieurs projets grâce à l'outil du permis d'aménager multi-sites.
Faciliter la vente de logements sociaux
Les chapitres 3 et 4 baptisés « libérer l'investissement dans le logement abordable » et « faciliter l'accès au logement des Français » concernent les bailleurs et les particuliers. Seul le dernier article 14 entend faciliter la vente de logements sociaux, alors même que cette disposition existe déjà depuis la loi sur l'évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan) de 2018..
Le ministère du Logement avance ainsi le chiffre de 13.000 ventes en moyenne par an sur les dernières années. Si 0,5% du parc social était vendu chaque année, cela représenterait 25.000 logements. Une vente qui permet d'investir dans la production de nouveaux logements sociaux, vante encore l'administration de Guillaume Kasbarian.
Pour atteindre ce nouvel objectif, le projet de loi confie au maire la responsabilité d'autoriser la vente directe aux locataires du logement social, en supprimant les autorisations préfectorales et en sécurisant la gestion des copropriétés.
Le texte est désormais attendu mi-juin au Sénat puis à l'Assemblée nationale en septembre.
Sujets les + commentés