Suppression des impôts de production : une bonne affaire pour les collectivités locales

Le gouvernement va baisser les impôts de production, en supprimant la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), entre 2023 et 2024. C'est inscrit dans la loi de finances pour 2023. Cette disparition représente une perte de 8 milliards d'euros au total pour les finances publiques mais un gain bien plus important pour les collectivités. Sans compter le coût politique pour le gouvernement. Explications.
Fanny Guinochet
Le gouvernement se passera cette année des recettes d'une partie de la CVAE.
Le gouvernement se passera cette année des recettes d'une partie de la CVAE. (Crédits : Reuters)

Le patronat le demandait depuis longtemps, au nom de la compétitivité française, Emmanuel Macron l'aura fait : la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, va bien être supprimée, en deux ans, entre 2023 et 2024. Près de 530.000 entreprises devraient bénéficier de la disparition de cet impôt de production qui, selon le patronat, pénalise leur compétitivité. L'industrie en sera le premier bénéficiaire, puisqu'à elle seule, elle abonde plus d'un quart de la CVAE. Les TPE/PME aussi verront leurs charges allégées. En revanche, pour les deux années à venir, ce sont 4 milliards d'euros estimées en moins pour les finances publiques.

La CVAE compensée par une fraction de TVA

Reste que cette suppression pourrait bien faire les choux gras des collectivités. En effet, la CVAE est prélevée localement puisqu'avec la cotisation foncière des entreprises, elle est un composant de la contribution économique territoriale (ancienne taxe professionnelle). Les premiers bénéficiaires de cette contribution sont les intercommunalités.

Or, l'Etat a d'ores et déjà promis de compenser cette perte, à l'euro près. « La CVAE sera intégralement compensée par une part de TVA dès 2023 », s'est ainsi engagée la Première ministre, Elisabeth Borne.

Et c'est là où les communes devraient être gagnantes : la TVA, en ce moment, est très dynamique avec l'inflation et la bonne tenue de l'activité. Et comme la compensation décidée par le gouvernement est une part de TVA, la somme engrangée devrait être supérieure à celle qu'auraient perçues les collectivités si la CVAE avait été maintenue en l'état.

Avantage supplémentaire, pour établir sa base de remboursement en direction des collectivités, le ministère de l'Economie a choisi de prendre pour référence de calcul les trois dernières années de CVAE perçues. Or, ce sont des années plutôt prospères puisque marquées par un regain d'activité des sociétés, dans un contexte de reprise après le covid.

Des sommes plus importantes et prévisibles

Les collectivités locales ont toutefois fait savoir à Bercy leurs inquiétudes. Pourtant, elles devraient être gagnantes. « Non seulement les sommes qu'elles vont percevoir en compensation promettent d'être supérieures à ce qu'elles auraient touchées avec le maintien de la CVAE, mais elles auront en plus une meilleure visibilité pour faire leur budget », fait savoir l'entourage de Gabriel Attal, le ministre en charge des Comptes publics. En effet, alors que les versements de la CVAE étaient volatiles puisque directement corrélés à l'activité - par nature, fluctuante - des entreprises du territoire, avec ce nouveau système de compensation, en revanche, le montant est déjà prédéfini. La collectivité sait donc à quoi s'en tenir.

Le gouvernement, lui, perd sur toute la ligne

En revanche, le grand perdant est l'exécutif. En effet, dans un contexte budgétaire tendu, maintenir la disparition de cet impôt de production n'est pas facile à défendre. Ce choix a vite fait d'être perçu comme un énième cadeau aux entreprises, largement soutenues par l'Etat pendant la crise Covid.

C'est aussi une décision prise sans qu'aucune contre-partie ne soit demandée aux entreprises - que ce soit en termes de maintien de l'emploi, ou d'exigences environnementales -, dénoncent les oppositions, au premier rang la Nupes.

Malgré les critiques, l'exécutif maintient sa ligne et répète à l'envi qu'il reste fidèle à la trajectoire annoncée : aider les entreprises tricolores à être plus compétitives notamment vis-à-vis de leurs voisines européennes, baisser les impôts, comme promis, etc.

Amertume vis-à-vis du patronat

En coulisses, une certaine aigreur s'installe, toutefois, au sein du gouvernement. « Disons, que l'on ne peut pas dire que le patronat soit très reconnaissant alors que ça fait plusieurs décennies qu'ils ont fait de ces impôts de production leur cheval de bataille », confie un ministre de premier plan. Et de détailler : « Lors de la présentation du budget, le Medef a insisté sur le peu de réductions des dépenses que nous avions prévues ; sur la réforme des retraites, ils sont aux abonnés absents ; et sur les salaires, il faut leur tordre le bras pour qu'ils les augmentent... »

D'ailleurs, en septembre dernier, lors de la présentation du projet de loi de finances 2023, agacés par ces critiques patronales, Bruno Le Maire, le ministre de l'Economie, ainsi que d'autres membres du gouvernement avaient alors agité le spectre de revenir sur la suppression de la CVAE....  justement, pour réduire les dépenses. La menace n'a pas été mise à exécution. Mais l'amertume envers le Medef, elle, n'a pas disparu.

Fanny Guinochet
Commentaires 7
à écrit le 11/11/2022 à 12:19
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Il ne faudrait pas attribuer aux collectivités locales que une part de TVA, mais aussi une part de l'impot sur le revenu et sur les profits des entreprises. Lier les recettes fiscales des collectivités seulement à la consommation c'est donner une ma...

à écrit le 11/11/2022 à 9:08
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Pendant ce temps : Le groupe Adecco est victime d’un piratage de ses données. Des centaines d’intérimaires, y compris du Nord et du Pas-de-Calais, ont été ponctionnés sur leur compte bancaire 'environ 50€. Impossible, pour l’heure, de connaître l’...

le 11/11/2022 à 10:34
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Un RIB ne permet pas de prélever de l'argent sur un compte bancaire sauf si un mandat de prélèvement SEPA a été signé par le titulaire du compte.

à écrit le 11/11/2022 à 8:36
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Quand on baisse des impôts il faut être capable de mettre une baisse de la dépense publique mais ce n’est pas le cas

à écrit le 11/11/2022 à 8:36
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Quand on baisse des impôts il faut être capable de mettre une baisse de la dépense publique mais ce n’est pas le cas

à écrit le 11/11/2022 à 4:34
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Francais vaches a lait. Votez mieux a l'avenir.

à écrit le 10/11/2022 à 23:42
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A l instar d autres pays européens qu’lon oblige par la loi le patronat/ l’état à garder les seniors sinon la réforme des retraites ne fera que des perdants : salariés du privés comme du public… qu on le dise à Macron s il ne veut pas la chiélig dan...

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