Bercy veut montrer qu'il sort les muscles. En 2023, « plus de 95.000 contrôles ont été effectués, soit 260 par jour », a déclaré la ministre des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, Olivia Grégoire, lors de la présentation du bilan de l'action 2023 de la DGCCRF ce vendredi. Tous ces contrôles concernent aussi bien des établissements physiques que les sites Internet. « La consommation évolue et les comportements des consommateurs aussi ». Il s'agit « de défendre les consommateurs face à des pratiques trompeuses ou abusives », a-t-elle poursuivi. Dans le contexte d'une forte envolée des prix en 2023, les enquêteurs ont mis l'accent sur les contrôles concernant le pouvoir d'achat.
Renforcement des contrôles sur les fraudes les plus graves et moins de visites
Dans le détail, les contrôles menés par la répression des fraudes ont abouti à 20.560 avertissements et 27.122 injonctions pour se mettre en conformité. L'administration a adressé 164 arrêtés de suspension ou des retraits de commercialisation. Et plus de 3.197 contentieux pénaux ont été transmis au parquet. Les contentieux peuvent concerner aussi bien les pratiques commerciales trompeuses que les règles d'étiquetage, la provenance et l'origine des produits, la traçabilité des produits alimentaires.
Globalement, la politique de cette direction de Bercy a marqué un virage. «Il s'agit de sanctionner sévèrement les plus grandes fraudes mais aussi accompagner les entreprises », a déclaré Sarah Lacoche, la patronne du bras armé du ministère des Finances. Ses équipes ont réalisé « moins de visites » et ont infligé « moins d'avertissements mais plus d'actions répressives par rapport à 2022 ». Interrogée par La Tribune, l'ex-conseillère de Christine Lagarde au ministère de l'Economie a expliqué que cette stratégie « peut nous amener à faire moins de contrôles mais il s'agit tout de même de maintenir une pression de contrôles forte » sur les entreprises.
Des amendes très concentrées sur les délais de paiement
L'année dernière, la répression des fraudes a délivré un paquet d'amendes (2.247) pour un total de 49,3 millions d'euros. Sur cette enveloppe globale, la majorité (34,5 millions d'euros) concerne les délais de paiement ou les problèmes de facturation. « Les amendes sont très concentrées sur les délais de paiement. Notre objectif est d'avoir des sanctions plus rapides et plus visibles », a affirmé Sarah Lacoche.
Le reste des amendes distribuées concerne principalement (6,3 millions d'euros) les démarchages et ventes hors établissements comme les foires et les marchés. Et enfin, les déficits d'information du consommateur ou encore les clauses abusives (6,2 millions d'euros). Du côté pénal, 1.502 transactions ont été réalisées pour un montant de 8,8 millions d'euros, selon le rapport d'activité dévoilé ce vendredi.
La « Shrinkflation » dans le viseur de la répression des fraudes en 2024
Parmi les axes prioritaires annoncés pour 2024 par la ministre Olivia Grégoire ce jeudi figure en premier lieu la « Shrinkflation ». Avec l'envolée des prix depuis 2022, beaucoup d'enseignes dans la grande distribution ont réduit la quantité d'un produit tout en gardant le même emballage.
Cette pratique commerciale parfois jugée trompeuse est dans le viseur de la répression des fraudes. Face au développement de cette stratégie, le gouvernement a mis en place un arrêté qui doit entrer en vigueur en juillet prochain. « Les distributeurs devront ainsi indiquer la diminution de la quantité vendue et la hausse du prix du produit ramené à l'unité de mesure », explique le rapport de Bercy. Ce tour de vis pourrait s'avérer très compliqué à mettre en place pour un grand nombre de produits.
La répression des fraudes pas concernée par des coupes budgétaires
En pleine tempête budgétaire, le gouvernement a annoncé en février dernier un décret de 10 milliards d'euros visant à faire des coupes dans les dépenses de l'Etat. Le ministère de l'Economie doit d'ailleurs être mis à contribution pour environ 458 millions d'euros selon le décret paru au Journal Officiel (JO). Concernant les moyens financiers, « nous sommes préservés des coupes budgétaires », a affirmé Sarah Lacoche.
Du côté du personnel, c'est « la stabilité », a ajouté la fonctionnaire. Par rapport à 2022 (2.885), les effectifs ont même légèrement augmenté (2.900 en 2023). A l'approche des Jeux Olympiques, la directrice a annoncé des renforts. « Cette année, notre ambition est de renforcer les services pour appliquer les contrôles sur la vente de goodies, les hôtels et restaurants ». Un moment décisif pour la répression des fraudes.